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JUIF (PEUPLE)

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sentiments religieux. L’on a pu uiainles fois élablir des lappioclienicnls frappants entre telles liymues babyloniennes et certains de nos psaumes ; les chants de pénitence sont à cetéf^ard particulièrement remarquables. Il y a loin toutefois — et personne ne sera tenté de le nier — de l’inspiration religieuse qui préside au culte babylonien à celle qui se traduit dans la liturgie israclitc. De plus, la religion des vieux sanctuaires clialdéens est largement ouverte à un élément que le yaliwisme autlienti(iue rejette de la façon la plus formelle, la magie et les incantations. Kt puis, ce n’est i)a3 pour rien que le panthéon des rives de l’Euphrate admet dans ses rangs et à une place d’honneur la déesse Istar, proche parente de l’Aslarté cananéenne. EnQn aucun représentant olliciel de la religion babylonienne n’aurait songé à dire que le culte extérieur n’est rien si la justice ne coule comme un fleuve intarissable (Am., v, 21-24). La religion est tout entière dans la contribution aux .liturgies pompeuses et à l’aiiprovisionnement des temples. La pralicpic de la morale et du droit, si élevée qu’en soit i>arfois la formule, ressortit au domaine de la vie civile, et non à l’observance religieuse. A tous ces titres, il y a un abîme entre la religion du plus puissant des peuples sémitiques et celle du tout petit royauuie d’Israël. (Cf. Hehn, op. laud., p. i-ioi ; Duorme, La ielii, ’ion assyi-obabjlonienne ; Conuamin, Babylonb kt la Biiîlb, dans Dictinnnaire apologétique, I, col. Sa’j-Scjo.)

D. Chez les E< ; ypliens. — On peut parler, à beaucoup d’égards, de la religion des Egyptiens comme de celle des Assyro-Babyloniens, et a]q)rccier à peu près de la même manière les faits qui, de part et d’autre, sont allégués dans le sens du monothéisme ou d’une tendance vers le monothéisme. — a) Tout d’abord, depuis les plus lointaines origines et jusqu’à la On du royaume des Pharaons, la religion pratique se ramena à un polythéisme très toulfu, allant sans cesse se compliquant à mesure qu’à leurs dieux primitifs, chaque nome, chaque cité ajoutaient les dieux de leurs voisins, à mesure aussi que certaines divinités faisaient fortune dans toute la vallée. — b) Il est vrai que la spéculation théologique intervint pour mettre un peu d’ordre dans le panthéon. Les prêtres d’Héliopolis jouèrent à cet égard un rôle considérable : de la multitude des divinités protectrices, ils isolèrent une ennéade de dieux universels, alioutissant à son tour à une triade, sous la suprématie du dieu solaire lla-Thoum. — c) Il en était évidemment de Ka-Tlioum comme de Afarduk. Les titres que l’on accumulait, pour le glorifier au-dessus des autres dieux, pouvaient accentuer la subordination de ces derniers, mais ne leur enlevaient nullement leur caractère divin. En outre, de même qu’en Chaldée, le dieu suprême du panthéon variait avec les cités, avec celles-là mêmes qui se réclamaient de la synthèse héliopolitaine : à Memphis, le premier rang était à Phtah ; à Thèbes, on l’attribuait à Amon. Le développement de la puissance Ihébaine attira à son souverain céleste des honneurs tout particuliers. Comme le Pharaon, Amon devint le seigneur de toute l’Egypte ; il alla conlisquanl à son bénéûce les charges et les fonctions de ses collègues. Plus tard même, sous la vingtième dynastie, il devînt un dieu suprême, principe de vie universelle, ayant une action sans pareille dans le monde, exigeant des hommes, en plus du culte extérieur, l’observation de véritables lois morales. Mais, s’il ne faut pas méconnaître la grandeur de ces conceptions, il ne faut pas non plus en exagérer la portée. La morale des hymnes à Amon Uà n’a pas certes la vigueur et la pureté de la morale prophétique, et l’on n’oserait pas dire qu’elle apparaisse comme la base même et le

fondement du culte. D’autre part, si haut qu’on place Amon Uà, il ne paraît pas qu’en son nom on ait démoli aucun temple, pas même celui d’Ilathor, ni détruit aucune idole, pas même celle de Hès. A Thèbes, on n’a renversé ni la demeure de Moût, femme d’Ainon Rà, ni celle de Khons, leur (ils. — (/) La suprématie d’Amon rayonnait sur son clergé ; bienlùl le sacerdoce thébain devint si puissant ([u’il contrebalança le pouvoir royal lui-même. Jaloux de ces in’ivilèges et décidé à en avoir prompte raison, le l’iiaraon Aménophis IV, au quatorzième siècle, s’en prit au dieu Amon lui-même. Ses statues furent sorties de leurs temples, son nom fut martelé dans toutes les inscriptions, et, naturellement, sou sacerdoce fut aboli. Un dieu nouveau, Aten ou le Disque solaire, fut proclamé le seigneur des dieux de l’Egypte et le dieu de tous les pays tributaires alors fort nombreux. En son honneur, le pharaon lui-même composa une hymne religieuse de très hau’.e inspiration. On a voulu y voir une profession de foi monothéiste. C’est trop dire. Si en elTct Aménophis IV a fait la guerre à Amon, pour des raisons qui relèvent, au fond, de la politique autant et plus que de la religion, il a respecté les noms et les cultes des autres divinités. S’il a voulu que le nom d’Aten franchit les limites de l’Egypte et fût honoré des pays tributaires, ce n’est pas premièrement pane qu’à ses yeux le sentimentreligieux devait relier les divers peuples dans une même pensée touchant l’être suprême ; en conformité avec les idées du temps, il a tout d’abord voulu faire hommage au maître céleste de l’Kgypte des pays qu’il avait conquis. Enlin, pas plus que les spéculations relatives à Amon, la réforme d’Aménophis n’a eu d’influence sur la religion populaire ; le peujjle est demeuré attaché à la multitude de ses divinités étranges. Puis, après la mort du pharaon émancipateur, Amon est rentré dans tous ses droits et honneurs. Le principal résultat durable de l’action d’Aménophisa été, comme on le constate au temps de la vingtième dynastie, une épuration du culte du grand dieu thébain, peut-être une importance plus grande attribuée à l’élément moral, sans rien toutefois qui puisse entrer en parallèle avec les exigences des prophètes d’Israël.

E. Chez les Grecs. — On sait qu’en la personne de Platon et d’Arislote.la philosophie grecque a abouti à une idée monothéiste très élevée. Mais l’on ne saurait assimiler cette doctrine à la religion d’Israël. — rt) Chez les Grecs, le monothéisme est le fruit d’une spéculation philosophique. La masse du peuple trouve dans un polythéisme très riche l’explication du monde et des divers phénomènes qui s’y déroulent ; elle voit partout l’action et l’intervention immédiate des dieux. Cependant, certains esprits poussent plus loin l’étude de la nature. Par delà les faits ouïes groupes de faits auxquels s’arrête le vulgaire, ils voient des catégories plus amples, ils découvrent en même temps des lois ipii président à ces séries de phénomènes ; ils remarquent que, comme divers groupes de faits se subordonnent les uns aux autres, les lois elles-mêmes s’unissent et se hiérarchisent en systèmes ; ils en arrivent à l’idée d’un système général du inonde. La notion de la cause invisible progresse dans la même proportion, jusqu’au moment où une seule cause suprême sullit à expliquer un monde envisagé dans un système unique. C’est alors que des génies de premier ordre peuvent édifier leur magnifique théorie du divin. — b) De celle origine, le monothéisme grec se ressentira fatalement. Laissons de ciilé un certain nombre de lacunes de détail, même fort importantes, qui déparent cette magnifique conception. Il est un premier défaut général