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JESUS CHRIST

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ta es le FiU de Dieu, et descends de la croix ! Mt, , xxvii 39-40.

Et ceux qui passaient là le bafouaient en branlant la lète et en disant : q’a donc ! Toi qui détruis le Temple et le réédilies en trois jours, sauve-toi [donc] en descendant de la croix ! » Mc, iv, 30-31.

On traîne le diacre Jitienne Jetant le Conseil.

Et ils subornèrent des témoins menteurs qui dirent : (( Cet homme ne cesse de déblatérer contre le Lieu saint et la Loi, car nous l’avons entendu dire que ce Jésus de Nazareth détruira ce Lieu [saint] et changera les coutumes que Moïse nous a transmises. >>

Act., Ti, 13-14.

419. — Il ressort des textes’que cette parole de Jésus eut un retentissement considérable et que son caractère mystérieux prêta largement à interprétation maligne, voire calomnieuse. Il va de soi qu’en la mettant dans la bouche de n faux témoins » les Synoiitiques n’entendent aucunement contester l’aullienticilé du dire : l’étrangeté même de celui-ci le place au-dessus de tout doute. Le faux témoignage portait sur la signification matérielle, anarchique, révolutionnaire, donnée à une parole énigmatique. Rien dans la carrière et l’attitude du Sauveur ne permettait de présumer ce sens. Quant à la portée véritable de la déclaration, elle ne nous a été livrée que par le quatrième évangéliste. Encore prend-il soin d’observer que l’intelligence de cette parole ne se fit jour pour les disciples eux-mêmes qu’après la résurrection. Jusque-là, ce fut lettre close pour les amis, pierre de scandale pour les adversaires.

Le signe est en effet, comme celui de Jonas, dont il est en somme une réplique, et plus exclusivement encore, prophétique. Il ne vise les interlocuteurs actuels de Jésus qu’en tant qu’ils appartiennent à la génération qui sera témoin de la mort du Sauveur et sûrement instruite de la résurrection. Les Juifs qui contestent le bien-fonilé du pouvoir exercé par le Maître sont’assignés à ce jour prochain. Alors le mystère s’éclaircira, et l’on verra nettement de quel côté est le droit. Le grand duel tragique des deux esprits et.pourainsi dire, des deux religions, se résume et se symbolise dans les deux Temples. Au magnifique édilice ( « quelles pierres et quelle structurel ») où résidait exclusivement, pour tout bon Israélite, la gloire de Dieu, va se substituer un culte plus large, en esprit et en a érilé ; aux figures et aux promesses, la réalité du Règne de Dieu. Mais actuellement toute cette immense réalité se cache et se réduit en Jésus : son corps est le frêle temple oii résident, mieux que jamais en aucun édilice fait de main d’homme, la gloire et les complaisances du Père. Et à tous ces grands de chair, à tous ces illusionnés qui réclament des signes du ciel, et devant lesquels il vient d’allirmer ses prérogatives, le Maître jette ce mot profond qui est à la fois un défi et une prédiction : n Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverait » Il n’importe pas que les esprits de ses auditeurs s’égarent présentement sur l’édifice matériel, en supputent la grandeur, opposent aux forces présumées du prédicateur nazaréen l’énormité de la lâche qu’il assume ! Ce sont là erreurs d’interprétation qu’il ne plaît i)as

1. On peut consulter à ce propos.). Knabenbauer, Commeniarius in Iclianiient ^ Paris, 1898, p. 132 sqq. ; J. E. BprSEK, Das Evangeliuin des heil. tiJiannes, Freiburg i. H.. 11105, p. S.") sqq. ; Th. Z.vii.n, Das Erangeliuin des loJiannes aus^ele^f, Leipzig. 1908, p. 170 sqq. — Le commentaire de M. A. Loisv, Le Quatrième Efan^ile, P.iris. 1903, p. 288-3011, est tr.s complet et, en quelques points, i>énéti’ant. Il est malheureusement dominé et gâté parles vues de l’auteur sur le caractère général du quatrième évangile.

au Maître de corriger : les esprits droits ne s’y tromperont pas. Us attendront en paix le signe annoncé dans ces paroles mystérieuses.

L’avenir se chargera de mettre chaque chose à sa place, de renverser, à la façon divine, les vues humaines ; de faire germer dans le tombeau oii le corps de Jésus, travaillé jusqu’à la mort, sera enfin déposé, la gloire du Fils de l’homme ; de bâtir, sur cette pierre rejetée par les maîtres d’œuvre ofiiciels, un Temple que nulle tempête, nul assaut des hommes, nulle action du temps ne pourra renverser.

420. — Les deux signes allégués par le Christ en faveur de sa mission divine s’éclairent ainsi l’un l’autre, et tous deux renvoient à la résurrection. Constatée directement par les apôtres, attestée par eux au peuple, la réponse du Père confirmera les leçons et l’autorité du Fils. Sous les traits du vieux prophète surgissant de l’abîme, dans le symbole du nouveau Temple élevé de main divine sur les ruines du Temple écroulé, c’est le vainqueur de la mort, c’est l’auteur de la vie, c’est le Seigneur ressuscité qui se profile à l’horizon évangélique. Les termes restent énigmatiques aux disciples eux-mêmes ; les indifférents s’en moquent ; les ennemis y cherchent des armes contre le Nazaréen. Mais la forme paradoxale et incisive des dires les a gravés dans la mémoire de tous, et à l’heure prochaine oii Pierre proclamera : « Sache donc toute la maison d’Israél que Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous avez mis en croix ! » (--tct., ii, 30), on se souviendra des paroles du Maître et autour d’elles s’accomplira le départ entre les « fils de lumière n et les autres.

Conclusion

421. — En résumé, celui qui veut laisser aux textes du Nouveau Testament leur sens certain et aux origines chrétiennes leur consistance historique, doit reconnaître que, par une action divine incompréhensible, Jésus a été corporellement arraché à la mort et constitué dans un état nouveau, glorifié, mystérieux, tel pourtant que l’identité du ressuscité avec leur Maître ne fit aucun doute, après expérience et enquête, pour ses disciples.

C’est le verdict de l’Iiistoire honnêtement consultée. S’ajoiitant aux arguments dévelojipés précédemment, ce fait miraculeux les couronne, loin d’}' contredire, et achève en lignes sublimes une carrière que tout démontre plus qvi’humaine. Il y a entre la résurrection et la vie du Sauveur une harmonie interne qui rend celle-là plus croyable. Le triomplie final de l’esprit non aux dépens, mais à l’avantage de la matière ; la victoire du juste, du bien, du sacrifice volontaire ; la confiance au Père récompensée ; la foi au Fils motivée sans être imposée et devenant raisonnable sans cesser d’être méritoire : tels sont quelques uns des aspects religieux du fait de la résurrection.

422. — Il en est d’autres qui, pour n’être pas plus importants, sont plus explicitement mis en lumière dans le christianisme ancien : n mourir pour vivre » ou plus exactement « mourir pour ressusciter ». mourir au mal, au charnel, au temporel, à l’égo’isme, au péché, à la « nature > tarée et déchue, pour revivre en grâce, en pureté, en esprit ; — « perdre son âme pour la sauver », sacrifier sa vie temporelle à l’expansion en nous et hors de nous du Royaume de Dieu, dans l’espoir d’une vie meilleure, c’est tout le fond de la nouveauté chrétienne. C’est la leçon qu’après Jésus Paul et tous les apôtres ont constamment prêchce. Or la résurrection du Christ n’est pas-