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JESUS CHRIST

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ces fragments tles Acles des Apùlres, écrits à la première personne (OVrs/Hc/.e), où tous les crili<iues reconnaissent (les morceaux d’un journal de route rédigé par un témoin oculaire. Les distinctions rationalistes entre miracles et miracles n’ont donc aucun fondement dans l’histoire’.

303. — Plus encore que la place matérielle qu’ils occupent, c’est le nile attribue aux miracles qui ne permet pas de lesévincer. Ils sont en elTet supposés par les particularités les plus frappantes, les circonstances les moins contestables de nos récits : les éliminer n’équivaut pas à laisser, pour de longs chapitres, un canevas nu et dépouillé, mais à déchirer la trame même du livre.

Les miracles sont intimement liés à la foi des disciples en leur Mattre : le refrain johannique : « Ce fut, à Cana de Galilée, le début des signes qu’opéra Jésus, et il manifesta [ainsi] sa gloire, e< ses discijites crurent en lui », Jo., ii, i i (cf. Jy., iii, 2 ; vii, 31 ; xii, g-ii) n’est que l’écho des impressions notées parles Synoptiques : « Et ils se disaient les uns aux autres [après la tempête apaisée] : « Qui donc est celui-ci, pour que le vent et la mer lui obéissent ? » Mc, iv, 40 ; « Et comme [Jésus et Pierre | entraient dans la barque [après avoir marché sur les flots] le vent tomba. Et ceux qui étaient sur la barque l’adorèrent en disant : « Vraiment, vous êtes fils de Dieu ! » Ml., XIV, 33.

304. — L’émotion des foules et l’envie haineuse des adversaires ne sont pas moins nettement rattachées aux prodiges accomplis par le Sauveur. On ne peut citer ici que quelques-uns des textes :

Quand la foule eut éti’renvoyée. Jésus entra, et prit la main [de la petite morle] et la fillette se leva. El le bruit s’en répandit dans toute cette légion. Mt., ix, 2.j ; cf. iv, 23-24 ; XII, 22-23 ; xv, 30-31.

.u soleil couchant, tous ceux qui avaient des inlirnie.-’, atteints de diverses maladies, les amenèrent pi’ès de lui, et leur imposant les mains à chacun, il les guérit… Lt comme au lever du jour il sortait, olUint en un lieu désert [pour prier], les foules le recherchaieni, et on arriva jusqu’à lui, et on le priait de ne pas s’en aller. Z-c, iv, 40, 42.

Alors quelques-uns des scribes et des Phai-isiens lui réjiondiront, en disant : < Maître, nous voulons voir un signe [accompli] par vous. » Mt., xii, 38.

En ce teraps-lù, llérode le téti-urcpie ouït parler de la renommée de Jésus et ditù ses serviteurs : h C’est Jean le Baptiste : il est ressuscité des morts et par ainsi des miracles s’opèrent par lui !)) Mt., xiv, î-2.

Les princes des prêtres et les Pharisiens réunirent donc le Conseil, et ils disaient : « Qu’allons-nous faire ? Cet homme opère beaucoup de miracles. Si nous le laissons [faire] ainsi, tous croiront en lui… i) Jo., xi, 47, 48.

305. — Toute l’activité du.Maître : son enseignement, ses controverses, les missions qu’il donne, sup posent les miracles et parfois n’ont de sens que par eux. (’/est la discussion à propos d’un homme guéri le jour du sabbat : f.c, vi, j sqq. ; ce sont les apôtres investis de la puissance de guérir : Mt., x, 1-8 ; c’est la foule rassasiée par miracle, à qui Jésus conseille des pensées plus hautes, et dont il dirige les désirs vers une nourriture spirituelle : Jo., vi, 26 sqq.

La puissance thnumaturgique de Jésus forme une part intégrante de la tradition chrétienne primitive : au jour de la Pentecôte et dès la première fois qu’il parle au peuple, Pierre — au témoignage des Actes des apùtres — rappelle les miracles accomplis par Jésus :

1. Voir V. SiNDAV, Jésus Christ, dans DDII., II, p. (124 62r>.

« Hommes d’Israël, écoule/ ces paroles. Jésus de Nazareth, 

cet homme a[>prouvé de Dieu pour vous par des miracles, des prodiges et des signes, que Dieu a faits par lui au milieu de vous, ainsi ([ue vous-mêmes le savez… » .ici.. II, 22, 23.

Mémo rappel en présence de Cornélius et de sa maison :

« Vous savez ce qui â’cst passé dans toute la Judée…

Jésus de Nazareth, comme Dieu répandit sur lui l’onclion do l’Esprit saint et de puissance, comuio il a passé en faisant le bien, et en guérissant tous ceux qui étaient.-^ous la puissance du diable. Et nous sommes témoins des

« l’uvres qu’il a accomplies dans la région des Juifs et à

Jérusalem…)>.-ict., x, 37-39.

La première linale du quatrième évangile rappelle que Jésus fit « beaucoup d’autres miracles n en dehors des signes retenus, pour des raisons diverses, dans ce livre. Euskue enfin cite dans son Histoire ecclésiastique un passage de l’apologie présentée à l’empereur Hadrien (i 17-1 38) par un disciple des apôtres,

QUADRATUS :

« Les œuvres de notre Sauveur s’attestaient durable-^, 

car elles étaient vérilabUs : ceux qu’il a guéris, ceux qu’il a ressuscites des morts n’ont pas.seulement été vus guéris et lessuscités, mai^ le sont restés — non seulement pendant la vie, mais après le ilépart du Sauveur, durant un temps considérable, au point que quehiues-uns ont survécu jusqu’à nos jours’. »

A tous ces témoignages répond l’opinion des adversaires mêmes et des ennemis de Jésus. Ils ne contestent pas les faits : tout leur effort, des Phariciensà Celse et à Julien, va à les expliquer par la magie, les sortilèges ou un pacte avec le prince des mauvais esprits. La bizarrerie des hypothèses qu’ils imaginent prouve à sa façon leur embarras et l’immense effet produit par les signes du Christ.

306. — Cet embarras persiste. Il n’est rien dans l’Evangile qui cause plus d’ennui aux critiques et aux historiens rationalistes, et sur aucun point probablement la contre-apologélique n’a accumulé plus de conjectures arbitraires et d’explications violentes. Les Interprétations naturalistes auxquelles le théologien protestant Gottlob Paulus (-]- i 85 i) attacha son nom, sombrèrent vite sous le ridicule. D. F. Strauss trancha dans le vif, rejeta comme inaulhentique tout ce qui, dans les évangiles, racontait ou supposait le miracle : procédé radical et commode, mais trop commode ! On n’osa maintenir un parti pris aussi éclatant :

<( Mais ce merveilleux ! Tons ces récits île miracles ! Bien d’autres que Str-auss se sont laissé épouvanter par eux, reconnaît M. Ad. Harnack, au point d’en prendre texte pour nier en bloc la crédibilité des évangiles. Mais la science historique a fait encore, pendont la dernière génération, ce grand ]>rogrès d’apprendre à traiter ces récits avec plus d’intclli^cnce et de sympathie ; aussi peut-elle reconnaîli’e une valeur documentaire appréciable, même aux récits des miracles*. »

307. — Nous verrons par quels artifices le célèbre critique saura « solliciter doucement les textes », selon les besoins de sa philosophie. La plupart de nos adversaires n’y mettent pas tant de façons, et à l’édition, revue et très corrigée, de Paulus, que propose ^L Ilarnack, préfèrent une édition édulcoréc et légèrement nuancée, de Strauss.

1. //. £., iii, iv ; éd. Ed..Schvvartz, l, p. 302, 304.

2. « G est par le prince des démons qu’il chasse les démons ! » Mt., ix, 34.

3. Voir le Con « rrCc/s « d’ORici ; xK, i, i.xviii ; ed. P. Koetschau, 1. p. 121, 122.

4. L’Essence du Chrisiianismi, lr. fr. de 1907, p. 37.