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JÉSUS CHRIST


ûgures..VCésaréc de l’iiilippe, il vient de provoquer et de magnilier la confession de Pierre.

Or, il cimimeni ;.u de leur enseigner : (( Il fuul que le l’ils de riiomnie soullie lieiuicoup et soit rejeté par les nnciens et les prinii-s îles prélres et les scribes, qu’il soit mis ii mort et « près trois jours ressuscite. » Et il leur disait In cliose ouvertement. Lors Pierre, le tirant à part, commença de lui faire des re|>roches ; mais lui. s’étonl lelouriié et voyant ses disciples, lit des reproches à Pierre et lui dit :

« .Vriière, loiude inoi. Satan ! les sentimenls ne sont pas

ceux de Dieu, mais ceux des hommes. » Mc, viii, : U- ; >’i.

La leçon était dure : Jésus va la répéter. Après la grande émotion lumineuse de la transtiguralion,

Comme ils descendaient de la montagne, il leur commanda de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vii, sinon quand le Fils delhomme serait ressuscilé des morts. Et ils gardèrent la chose [pour eux], tout en se demaiidiint entreeux ce qu’ètaitcet » être ressuscité des morts ». Et ils l’interrogeaiejit, disant : « Qne disent donc les scribes, qu’il faut qu’Klie vienne auparavant ? » Il leur dit : i( Elle revient d’abord et remet tout en oidre ; et comment est-il écrit du Fils de l’homme qu’il soullrira force douleurs et mépris.’.Mais je vous le dis, Elle est déjà venu, et ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu, selon qu’il est écrit de lui ». Mr., ix, il-l’i.

Le spectacle qu’ils viennent de contempler et la mention de la résurrection ont ramené, tout en les intriguant, l’imagination des disciples sur le personnage d’Elie. Chacun le considérait eu ell’et comme le Iirécurseur de l’événement glorieux du Messie. Cependant, Jésusne permet pas aux esprits de s’égarer : le rôle de précurseur prédit par Malacliie a déjà été, dans un sens très véritable, rempli par Jean Baptiste. Mais ce rôle a Uni par la souffrance et par la mort, conformément aux Ecritures. Il en sera ainsi pour celui qu’annonçait le second Elle, pour Jésus lui-même. De ces notations sommaires, brèves jusqu’à l’obscurité, la grande leçon ressort en elair : avant d’entrer en sa gloire, le Fils de l’homme sera méprisé et souffrira : per cruccm ad Iticcm.

S58. — tes occasions d’insister vont d’ailleurs se multiplier et, au besoin, Jésus les fera naître :

Partis de là, ils traversaient à la hâte la Galilée et [Jésus ] ne voulait pas que personne le sût. Car il enseignait ses disciples et il leur disait : n Le Fils de l’iiomme est livre aux mains des hommes, et ils le tueront, et après avoir été immolé il ressuscitera au bout de trois jours. » Mais eux ne comprenaient pas cette parole et craignaient de l’interroger [à ce propos]. Mc, ix, 30-33.

Suit une nouvelle période d’enseignement publie et privé. Or, comme

Ils étaient en route, montant vers Jérusalem, Jésus marchait en avant d’eux, et eux étaient dans la stupeur, et ceux qui suivaient étaient effiayés. Et prenant derechef les Douze à part, il commença de leur dire ce qui allait lui arricr. (( Voici, nous montons vers Jérusalem, et le F’ils de l’homme sera livré aux princes des prélres et aux scribes ; ils le cotidamneronl à mort et le livreront aux gentils, et ou le bafouera, on le conspuera, on le flagellera, on le tuei-a et après trois jours il ressuscitera, n Me, x, 32-3.’).

Si Marc, pour des raisons d’après coup, et utilisant les idées théoriques de saint Paul, a traduit dans cet épisode saisissant in discours de Jésus « oi’i l’éventualité de sa mort était seulement indiquée* », que reste-til, je ne dis pas de son exactitude, mais de sa sincérité la plus essentielle’.' D’autant que cette prédiction est confirmée pardesdéclaralionsultérieures, allant tfmtes dans le même sens et amenées par des faits précis et circonstanciés.

1. A. Loisv, Le^ iU^angiln si/nnpiiijucs, II, p. 233.

S53. — Ainsi, les CIs de Zébédce réclament, en faisant passer la requête par leur mère (.WL, xx, 20), une place d’honneur dans le ftitur Royaume, conçu d’après leur rêve encore charnel. « Vous ne savez pasce quevous demandez, réplique le Maître. Pouvez-vous boire le calice que je boirai ? être baptisés du baptême dont je serai baptise ? » J/c, x, 38. Et comme l’ambition des deux frères provoque l’iniiignation des autres, Jésus tourne l’incident en leçon d’humilité, et conclut que « le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour beaucoup* » Mc, x, 1)5.

Parole capitale, qui porte, on peut le dire, toute la tradition primitive sur la mort rédemptrice de Jésus, trailition explicitement mentionnée par saint Paul comme préexistante à son entrée dans l’Eglise. Le commentaire ou, si l’on veut, l’annonce plus circonstanciée du fait, se trouve dans la parabole des Vignerons ;

« Un homme phiEita une vigne, l’entoura d’une l.aie, creus, -ï

un pressoir, bâiit une tour [de guel], puis confia [sa vigne ] ?i des vignerons et quitta le pays. Au temps voulu, il envoya vers les vignerons un serviteur, afin d’avoir par eux dos fruits de la vigne ; mais eux s’emparèrent de lui, le batlirent et le renvoyèrent à vide. Derechef, il leur envoya un aulE-e serviteur ; celui-là aussi, ils le blessèrent et l’insultèrent. Il leur en envoya un autre, qu’ils luèrcTil, puis beaucoup d’autres : ils battirent les uns. tuèient les autres. Il lui restait quelqu’un, un 61s bien-ainié. Il le leur envoya finalenient.disant : « Ils respecteront mon fils ! » Mais les vignerons se dii-ent les unsaux aulres : « Celui-ci est l’héritier ; venez, tuons-le et l’héritage est à nous !)> Et s’en emparant, ils le tuèrent et rejetèreni [son corps] hors de la vigne. Que fera le maître de la vigne ? Il viendi-a, perdra les vignerons et donnera sa vigne à d’autres, N’avez-vous pas lu cette Ecriture ;

I.a pierre qu’ont méprisée les construcleurs

Celle pierre-là est devenue la pierre maîtresse de l’angle ;

Chose accomplie par le Seigneur,

La merveille est sous nos yeux.’» Mc, xii, 1-1-.

SS4. — Désormais les événements se précipitent. Jésus donne en conséquence des instructions à ses disciples pour les jours où l’Epoux leur aura été enlevé (Me, xiii). Un touchant incident provoque des précisions plus grandes. Survenant au milieu du repas donné à Jésus par Simon le lépreux, une femme répand sur le chef du Maître un parfum de prix. Murmures des disciples.

Mais Jésus dit : « Laissez-la. Pourquoi lui faites-vous peine ? C’est une belle action tpi’cl le a accomplie pour moi. C, -ii’vous avez toujours des pauvres avec vous et chaque fuis que vous le voulez, vous pouvez leur faire du bien,

— mais moi. vous ne m’av'>z pas toujours. Ce qu’elle a pu [faire], elle l’a fait : d’avance elle a oint mon corps pour l’ensevelissement… » Mc, xiv, G-tt.

Et, le premier jour des Azymes, … au soir tombant, il ienlaiec les Douze. Comme lis étaient étendus à table

1. Les critiques radicaux ontappliqué à ce [lassage leurs procédés habituels. Ne voulant pas, ou n’osant rejeter tout l’épisode, dont ces mots forment la conclusion nécessaii’e et pour ainsi dii’e la morale, ils s’évertuent ô montrer que la première partie du verset (concernant le service ) peut subsister sans la seconde (concernant la mort rédemptrice^ qui (( apparliejit à un autre courant », A. LoisY, Les Efaiipilea synoptii/ites. H, p.’241. J. Wku.hai’-SKN (Dai Efangeiuim Muni. Berlin. 1U03. p. 91) va jusqu’à dire, contre toute évidence, que « le passage du service au sacrifice de la vie considérée comme rançon est une u-iT’LQv.-jt^ zU’jj’/'j ysvî ; }). L’honnête « r//o/rt/- juif C.-O. .Mo.NTEFiORK avoue qu’il trouve au contraire les deux idées très proches’Tite synopiic Gospeis, London, 190t>, , p. 2r>0). Et c’est ce qui est manifeste pour tout lecteur non pr-évenu ; le plus grand (( service », comme le plus grand amour, n’cst-il pas de donner sa vie ?