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JESUS CHRIST

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les églises chrétiennes, déjà en possession des synoptiques. C’est ce que conlirme, avec l’incomparable originalité du fond, l’existence, sous une forme plus ou moins enveloppée et concrète, dans tous les documents chrétiens antérieurs à notre évangile et en particulier dans tes synoptiques, d’éléments

« johaniiiques ». Il ya plus : ce tableau qui débute

par le prologue solennel où le Verbe est proclamé Dieu, qui se présente, de dessein prémédité, sans perspective en ce qui touche la dignité du Maître, révèle à l’œil attentif les traits les plus caractéristiques de l’histoire évangéliqueil’économie de la manifestation se marque dans la genèse, les reculs, les progrès de la foi îles disciples en Jésus (.S’» / ; r<7, n. I15). Il en va de même des limitations humaines du Seigneur, des oppositions acharnées qu’il rencontra, de la clairvoyance supérieure des haines que sa prédication suscita.

138. — Sans attribuer toujours à Jésus chaque détail de leur teneur intégrale’— encore que nombre de ces maximes brèves et pleines, aiguës et luisantes comme des épées, portent avec elles la preuve de leur authenticité littérale — nous devons donc faire conliance à ces déclarations. Elles représentent sûrement la pensée exprimée du Maître. Ce qu’il importe de préciser, pour les bien entendre, ce sont les « catégories » principales, d’ailleurs traditionnelles, oii l’enseignement de Jésus, dans la partie que nous a rapportée Jean, semble s’être maintenu avec prédilection : la lumière, la vérité, la vie.

La lumière, c’est, dans le domaine spirituel et religieux, ce don qui permet de discerner la route conduisant au Père. Plus généralement, elle est la joie et le soleil de l’àme ; elle rend pur, désintéressé, noble et splendide. Fille du ciel, elle vient d’en haut, s’oppose à ce qui est d’en bas, à ce qui est vil, égoïste, laid et dilforme, aux « ténèbres ». Elle révèle et réjouit ; elle discerne et juge : aussi les bons, capables d’alTronter son clair regard, l’aiment-ils ; les méchants, qu’elle condamne, la fuient et l’abhorrent. La vérité, c’est, en contraste avec le spécieux, l’ombre, la figure, le mensonge, ce qui constitue le réel, le solide et l’etUcace d’un agent moral et religieux — qu’il soit d’ailleurs une personne ou une chose. Au rebours de la viande creuse des chimères, le pain yéritahie rassasie l’àme et la repaît. La ri^ne véritable, au lieu de pampres tout en feuilles et en vrilles, bons à tromper le pèlerin en marche vers le ciel, porte des fruits savoureux et durables. Le témoin véritable est celui qui parle dece qu’il a vii, entendu, louché ; dece qu’il sait de première main…

La vie entin est l’attribut fondamental, qui rend tous les autres possibles et que rien ne supplée. Elle est le principe intérieur de toute action, dans l’ordre des esprits comme dans celui des corps. Comme telle, elle est susceptible de plus et de moins et d’épanouis J. K^ABE^BAL*ER f Cornmentarius in Joanncm, Paris. 1898. p. 49) avaient ex[>rin)é dei opinions analop-ues. Ce dernier eségète « admet que la forme, réellement bien ditférente, des discours rapportés par les Synoptiques d’une piirt et de l’autre pur le disciple bien-aimé, s’explique non seidement par In difTérence des auditoires, mais encore par un travail rt’dactitmnel de révangélistp : tout en reproduisant fidèlement les idées énoncées par le Sauveur. Jean leur a prêté une expression en harmonie avec son propre tour d’esprit ". Joseph Brucker. dans les Etudr>. t. L.XXXll, 1900, p. 383

t. Voul’dr établir dans cliaque cas ce qui revient avec vraisemblance au travail de l’évangéliste serait un effort in&ni, et à peu près stérile, de divination, de conjecture. Nous ne disposons pas ici. comme pour le synoptiques, de textes paralltdes, dont les diverjjences nous forcent à constater l’existence d’une part rédactionnelle, et nous permettent de la délimiter en quelque mesure.

sements successifs, allant de la vie simplement animale et humaine à une vie supérieure et spirituelle, elle-même ébauche et source d’une vie déiforme, stable et bienheureuse : la vie éternelle.

133. — Or, les hautes qualitications de ces biens, nécessaires au candidat du Royaume des cieux, Jésus les possède d’original, en plénitude, et les donne à qui lui plait. Il en est, non seulement le dispensateur souverain et normalement unique, mais la source : il est Lumière et Vérité. Et enfin il est tel — nous rejoignons ici l’incomparable déclaration rapportée d’après les textes synoptiques et interprétée plus haut, n. 123 parce qu’il est le Fils de Dieu, coéternel au Père, et une seule chose avec lui : jy’jj xr/À 6 T, a.-vr, p h è^/xitl Il faudrait, à l’appui, transcrire tout notre évangile : contentons-nous de quelques paroles plus nettes ou plus touchantes.

Jésus répondant [à celle femme de SamarieJ lui dit :

« Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : 

Donne-moi tt boire ", lu lui demanderais, et il te donnerait unee ; iu vive… Quiconque boira de cette eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif, mais l’eau que je lui donnerai devienfira en lui une source d’eau jaillissante i » la vie éternelle ! m /o., iv, 10, 14.

Les Juifs 1 poursuivaient Jésus parce qu’il faisait ces [guérisons] le jour du sabbat. Or, il leur répondit : « Mon Père traaille jusqu’à cette heure [sans se soucier du sabbat ]’- : moi aussi, je travaille, i) Jo., v, 17.

« Comme le Père ressuscite les morts et les vivifie, 

semblablement le Fils vivifie ceux qu’il veut. Le Père aussi ne juge personne, mais il a livré toute judicature au Fils, afin que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père. » Jo., v, ’21, 22.’Je suis le pain de vie : qui vient à moi n’aura plus faim, qui croit en moi n’aura plus jamedssoif. » Je, vi. 35.

({ En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme et si vous ne buvez son sang, vous n’aurez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair cl boit mon sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dei-nier jour. Ciar ma chair est une nourriture véritable, mon sang un véritable breuvage. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. » Jo., VI, 53-57.

Au dernier jour, le plus solennel de la fête, Jésus se leva et s’écria : m Si quelqu’un a soif, qu’il vienne h moi et s’abreuve. Qui croit en moi. de son sein (comme parle l’Ecriture) couleront des torrents d’eau vive ! » Jo., vii, 37-38.

Derechef Jésus leur parla en ces termes : « Je sais la lumière du monde : qui marche en ma compa^’nie ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de vie. » Les Pharisiens lui dirent : « Vous rendez témoignage de vous-même : votre témoignage n’est pas véritable. Il Répliquant, Jésus leur dit ; u Bien que je porte témoignage sur moi-même, véritable est mon témoignage, parce que je sais d’où je viens et où je vais… (D’ailleurs, si] je porte témoignage sur moi-même, mon Père aussi, qui m’a envoyé, témoigne à mon sujet. » Ils lui disaient :

« Où est votre Père ? » Jésus répondit : ci Vous ne connaissez

ni moi ni mon Père : ai vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. » Jo., viii, 12-19.

1. On sait que parcelle expression Jean désigne habituellement soit la masse du peuple juif, finalement infidèle à In gr.’ice de Dieu, soit (el plus souvent’les meneurs, les chois de l’opposiliim faite ii la prédication. Voir J. Dri’MMOMd, T/ie character and authorship of the fouith Gospel, London, 1903, p. 409 sqq, 416-417 ; J. Bel-SEB, der Aitsd’iick ïfjiv.î’ji im lohev^lm., dans la Tiibinger Quartalschrift de 1902, p. 168-222.

2. Le sens général est cerlain ; sur 1 « nuance suggérée ici, Th. Z*MN, Das Evan^elium des Joliannrs ausgelegt,

1 Leipzig, 1908, p. 285 sqq.