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JESUS CHRIST

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Dans les chapitres de la prophétie de Daniel où le Royaume de Dieu est montré en conflit avec les royaumes de la terre, symbolisés par des animaux, un passage capital nous met aux yeux le jugement déflnitir, porté sur les « bêtes n par le Juge, l’Ancien des jours, c’est-à-dire par Dieu même. Or, écrit le voyant,

Tandis que je regardais dans les visions de la nuit, sur les nuées vint comme un Fils d’homme ; il s’avança jusqn’an Tieillnrd et on l’amena devant lui. Et il lui fut donné domination, gloire et règne, et tous les peuples, nations et langiie> le servirent. Sa domination est une domination éternelle qui ne passera point, et son règne ne sera jamais défruit. Dan. vii, l ; S-14.

Si l’on rapproche ce texte des déclarations linales de Jésus devant le Sanhédrin, l’allusion de celles-ci à celui-là emportera l’évidence et nous forcera devoir dans le nom de.< Fils de l’homme » un titre messianique, puisqu’il ne saurait y avoir de doute sur le caractère messianique, de Roi et de Juge, du « Fils d’homme », décrit dans cette prophétie de Daniel.

105. — Le livre dit des Paraboles d’llénoch (Litre d’IIéiwch, ch. xxxvii-LXi) et en particulier les chapitres xLvi à LUI, qui s’inspirent manifestement du passage précité de Daniel, et décrivent le jugement final, font au « Fils de l’homme »’une place plus considérable encore :

J’interrogeoi l’ange qui marchait avec moi, et qui me faisait connaître tous les secrets au sujet de ce Fils de l’homme ; « Qui est-il, et d’où vient-il ; pourquoi marcliet-il avec la Tète [l’Ancien] des jours ? n

Il me répondit et me dit : « C’est le Fils de l’homme, qui possède la justice et avec lequel la justice hahite, qui révélera tous les trésors des secrets… Le Fils de l’homme que tu as vu fera lever les rois et les puissants de leurs couches, et les forts de leurs sièges ; et il rompra les reins des forts et il brisera les dents des pécheurs, et il renversera les rois de leurs trftnes et de leur pouvoir, parcequ’ils ne l’ont pns exalté et qu’ils ne l’ont pas glorifié et

« lu’ils n’ont pas confessé humblement d’où leur avait été

tlonnée la royauté…

Le Fils de l’homme fut nommé auprès ilu Seigneur des esprits et son nom fui nommé devant la « ’féto des jours ». Et avant que le soleil et les signes fussent créés, avant que les étoiles du ciel fussent faites, son nom fut nommé devant le Seigneur des esprits. II sera un bâton pour les justes, afin qu’ils puissent s’appuyer sur lui et ne pas tomber ; il sera le lumière des peuples et il sera l’espérance

mémoire érudit et vigoureux, mais un peu rigide et manquant parfois de nuances,.le Fritz Tii.i man.n, Œr Menscheruoltn Jesu Selbtizeusnis /iirseine messianiache Wiirdc, l’reiburg i. H., 1<.I07 (liiblische Sludien, xii, 1 et 2). Le P. Lagkange est revenu à mainte reprise sur la question, en particulier dans la / ?< « < Biblique, octobre lyO’i : Le Fds de V homme dans la prophétie de Daniel, vX avril 1908, Recension), p. 2sn.2 ! l3. — Parmi les Irnvaux anglicans, l’article Son of Man de S. R. Driver, Dictinnary oftlie Bible, éd. J. Hastings, IV. Edinburgh, 19(12, p. âT’J-âSl), et les notes de.M. R II. ChiRi.ES dans son édition anglaise du Livre d’Hénoch, Oxford. lS9 : i, appendice B, semblent dignes de particulière mention. — Personne ne peut écrire sur l’Evangile ou l’enseignement de Jésus snns prendre parti sur cette.piestion. Et comme elle est très obscure et délicate, elle est une de celles où les tendances et idées préconçues de chaque auteur se donnent la plus libre carrière. De là, dans l’école piotest intc libérale, une floraison d’hyjiotbèses et un éniieltement d’o|iinions vraiment iricui’s. Un peut en voir le relové, par le chef même de l’école libérale. II. J. Hoi.T/.MASN, Oa » measlaninehe Betvu^istsem Jeiii. Fin Beitrag zur l.eben-Jesu-Forschuns. Tilbingen, lïlOT.

Depuis les travaux cités ici, les articles ne ces « ent de se multiplier, muis il ne semble pas que des points Je vue vraiment nouvcaui, ou décisifs, aient été ouverts.

1. Le Livre d’Hcnnch, ch. xi.vi. iiviii, xi.ix, passim. Trnd. Fr. M.iRTiri. Paris, 1906, p. 95, 96, 99, 101, 102.

de ceux qui souffrent dans leur cœur. Tous ceux qui habitent sur l’aride se prosterneront et l’adoreront ; et ils béniront et ils gloritieront et ils chanteront le Seigneur des esprits…

En lui habite l’esprit de sagesse, et l’esprit qui éclaire et l’esprit de science et de force, et l’esprit de ceux qui se sont endormis dans la justice. C’est lui qui juge les choses secrètes, et personne ne peut prononcer de paroles vaines devant lui, car il est l’Elu en présence du Seigneur des esprits, selon son bon plaisir.

106- — L’ap[)lication au « Fils de l’homme » des prophéties messianiques les plus claires, en particulier de celles du Livre d’Isaie. est ici manifeste.

Si donc l’on admet que les Paraholes d’Hénoch sont, dans leur substance, antérieuresde troisrpiarts de siècle à la venue du Christ (et il semble bien que M. Léon Gry a rendu, après d’autres, cette thèse an moins probable), on est amené derechef à voir dans le titre de « Fils de l’homme » une désignation messianique.

107. — La seule diflieulté réelle opposée à cette constatation proviendrait de l’usage même qu’en fit Jésus. Après ce que nous avons dit, on s’étonnera peut-être que le Maître ait adopté un nom qui le désignait comme Messie ; on s’étonnera plus encore de l’impuissance de ses auditeurs à pénétrer la réelle signiflcation de ce titre. Mais cette dithculté n’est qu’apparente. Dans l’henreux rapprochement des prophéties messianiques anciennes qui aurait fait attribuer par l’auteur des Parahvles, au’< Fils de l’homme » de Daniel, (^/ze/i/Hes-H/^e^ des prérogatives authentiques de celui qu’on attendait, il faut voir surtout la réussite d’un autenr particulier. Rien de semblable dans les autres écrits apocaljptiques du même temps. Peu des contemporainsde Jésus avaient lu ces fragments que l’histoire postérieure rend pour nous si intéressants. Ceux-là même chez lesquels nous avons lieu, avec quelque vraisemblance, de supposer une connaissance présente des Paraholes, pouvaient-ils idenlilier, avec l’Etre surhumain, préexistant au ciel et à la terre, et apparaissant sondain près du trône de l’.Vncien des jours, un homme réel, vivant, parlant, soulTrant, mangeant, dont on savait, ou dont on croyait savoir les origines précises ? Quelle apparence de reconnaître le Héros céleste dans le charpentier Jésus, lils du charpentier Joseph, de Nazareth’.'

108. — Capable d’unsens niessianique.de par son origine scripturaire, et peut-être une partie de l’interprétation liHéraire postérieure, le nom <le a Fils de l’hominc » ne l’était d’ailleurs aucunement par sa formule. Il s’apparentait étroitement à l’appellation commune des ])rophétes : « Fils d’Iioinme ! » autant dire : « Homme ! » — Par là, il était à lui seul une sorte de jiarabole, une énigme, un mâchai du genre de ceux dont la tradition hébraïque nous offre tant d’exemples. De lui aussi on peut dire « qn’il posait plus de problèmes f(iril n’en rcsol*ait >, qn’il était plus fait pour [liquer l’allenlion que pour contenter la curiosité. Tout en reliant elTectivement la personne et la mission de Jésus aux plus hantes prérogatives messianiques, celles de Juge universel, il mettait en relief les caractères de faiblesse apparente, de condescendante fraternité. de soutt’rance rédeniptriee et, pour tout ilire, tVliiimiriité. qui devaient marquer la carrière du ÎMaitre, C’est en ce sens que l’ont surtout compris les anciens Pères : ils ont très bien vu que le nom de « Fils de l’homme » rejoignait celui du

« Servilcur de lahvé ii, l’évangile douloureux, le

it cinquième évangile u du Livre d’Isaie. Celte connexion, qui avait échappé à l’auteur des Purnlintes d’Hénoch, est visible dans l’usage fait par Jésus du titre qu’il s’est choisi.