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JESUS CHRIST

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54. — Parmi les juiveries delà Dispersion, mention spéciale doit être faite de celle d’Alexandrie, la plus considérable de toutes les façons. Au temps de Philon, qui est le contemporain de.) ésus Christ, deux des cinq quartiers de cette ville immense (peut-être un demi million d’habitants ?) s’appelaient « judaïques », à cause du grand nombre de Juifs qui y faisaient séjour. Philon ajoute que nombre d’Israélites habitaient çà et là, dans les autres quartiers (Philon, In Flacctijn, n.xui). Danslenienieecrit.il n’estime pas à moins d’un million le nombre de ceux qui étaient fixés en Eg^ypte. Fidèles à la Loi. à la circoncision et même, dans une large mesure, au Temple de Jérusalem qu’ils ornaient au mo3en de leurscontributions, et visitaient en pèlerins, les Juifs alexandrins jouissaient d’une certaine autonomie. C’est par eux et pour eux que les LiTes saints, ou du moins le Penl ; iteu’que’. avaient été, auni’" siècle av. J -C., traduits pour la première fois engrec’-. C’est encore par eux quele contact s’établit et se maintint entre la pensée grecque et la religion d’Israël, entre la philosophie platonicienne ou stoïcienne et la i Sagesse « biblique.

55. — Ailleurs, les juiveries, moins puissantes, l’étaient encore beaucoup. C’est chez elles ou dans leurs environs que nous transportent les missions de saint Paul décrites dans les Actes, et ses propres épîtres. C’est dans les synagogues et les proseuques que Patil, Barnabe, Silas. Apollo prêchèrent d’abord Jésus crucilié. C’est d’elles que se détachèrent les premiers convertis ; d’elles ou, plus souvent, du groupe d’âmes de bonne volonté, « craignant Dieu », (pii gravitaient autour d’elles. Ce sont elles aussi qui, se retournant contre les chrétiens affranchis de la Loi, provoquèrent les premières persécutions et les exaspérèrent toutes, méritant le nom de « font<"S persecutionuni » que leur inlligeait plus tard Tbrtcli.ikn. Scandalisé par le mystère de la croix, l’Israël de la chair poursuivit sans lelàcrtie l’Israël spirituel que Dieu lui substituait.

56- — En face de cette nation dispersée, mais énergiquement maintenue dans ses cadres par la Loi, les coutumes et la race ; émiettée, mais non fondue dans la masse des Gentils, il faut décrire brièvement le corps de nation qui occujiait le sol de la Terre Sainte au moment où Jésus de Nazareth commença de prêcher l’Evangile. C’était, nous dit saint Luc, u la qtiinzième année du règne de Tibère César, Ponce PUate étant gouverneur de la Judée ; Hérode, tétrarque de la Galilée ; Philippe, son frère, Ictrarque de l’iturée et du pays de la TracUonite : et Lysanias, tétrarque de l’Abiléne ; au temps des grands prêtres Anne et Caïphe… » (Le, 111, 1, 2). Cet enchevêtrement de noms, de fonctions etd’autorilés, nous avertit d’abord que nous avons affaire à un état de choses complexe. On sait en efl’et qu’après les régnes glorievix des premiers princes Asmonéens (de la famille des Macchubées)et lalongue anarchie.où s’étaient débattus leurs indignes descendants, l’unité politique avait été rétablie en Palestine, au prix d’une guerre atroce de trois années (40-3^ av. J.-C), par l’idumécn Hérode.

Ce (ils de l’étranger, astucieux, cruel et rude, qui devait finir son règne par le massacre des Innocents,

1. II. A. Redp.^th, The tintes « /" the liamlation nf Ihe variuus Hoitks ofthc Sepluagint, danse Journal o/t/ieological Sttidies. VII, (1906), p. 60C-G1.5.

2. C’est la fameuse ver.sion des Septante L’histoire légendaire des 72 traducteurs étant mise de cftté. il reste cerlain que la version est d’origine ïdexanfirine et qn’rlîe existait au m’siècle av. J.-C. L’Iielléniste Demetrnis s’en servait au temps de Plolémée IV (22J-20Ô av. J.-C.K

imposa du moins l’ordre et obtint, s’il ne le mérita pas, le nom de Grand (i-j- ! av. J.-C.’) Le Temple fut magnifiquement rebâti, la paix maintenue, l’aristocratie remuante des familles sacerdotales humiliée. Les noires intrigues de palais et les meurtres répétés qui assombrirent les dernières années du règne, n’empêchèrent pas Auguste de ratifier le testament de l’Iduméen. Celui-ci divisait le pays’- entre ses trois fils survivants : Archélaiis eut la Judée ; Hérode (Antipas : celui qui figure dans le récit de la Passion, et qui fit décapiter Jean Baptiste), la Galilée et laPérée ; Philippe, l’iturée et les districts du Nord-Est.

57. — Au bout de dix ans, des sujets d’.rchélaiis firent passer à Rome une pétition contre leur prince. Auguste intervint, déposa Archélaiis, mais au lieu de donner la Judée à l’un des fils survivants d’Hérode le Grand, il la déclara terre d’empire et la soumit directement au magistral romain (G ap. J.-C). Celuici, un Procurateur^ résidant à Césarée, d’où les communications avec Rome étaient moins malaisées, eut la haute main sur l’administration du pays. Toutefois, son habituel éloignement de Jérusalem — il y montait chaque année, avec une forte escorte, vers la fête de Pâques — et le souci des Romains de laisser aux peuples vaincus (et soumis) une part ou une ombre d’autonomie, firent que le haut conseil de la nation, le Sanhédrin, à peu près réduit à rien sous le règne d Hérode, reprit une certaine autorité. Composé de soixante-dix membres, « princes des prêtres » (c’est-à-dire chefs des hantes familles île la caste sacerdotale),

« scribes » (docteurs spécialisés dans l’interprétation

de la Loi), et k anciens n (personnages considérables, mais n’appartenant à aucune des deux catégories précédentes), le Sanhédrin était présidé par le grand prêtre alors en fonction. Ce tribunal était, à vrai dire, l’unique autorité juive *, en matière politique et ecclésiastique, au temps de Jésus.

58. — Sur le reste de la Palestine, les deux fils d’Hérode le Grand. Hérode Anlipaset Philippe, conservaient leur principauté. Pour apprécier leur pouvoir réel, il faut nous reporter par la pensée aux princes des pays « protégés r, : Tunisie, Maroc, et surtout aux « Etats indépendants i> de l’Inde anglaise. Les grands rajahs y gardent des troupes, une administration, des finances à eux, tout en reconnaissant la souveraineté de la Couronne d’Angleterre. Ils ont

Î.On sait que l’ère vulgairecommence plusieurs années, au moins.5, peut-être 6 ou 7, après la nais8 : ince de Jésus. Voir Ferd. Pkat, dans les Recherches de Science relii^ieitse. janvier 1B12, p. S2 sqq. ; et E. Schurer, G/T*, I, p. 41.) sfjq, , note 107.

2. La Terre Sainte proprement dite, ou Palestine, dans ses limites classiques, << de Dan à Bersabée ». est évaluée par les géographes du Palestine Exploration Fund » 9.700 milles carrés (anglais) : France, 207.000. En kilomélres carrés on obtient 28.000 km- environ C’est à très peu près l’élendne de la.Sicile ; 9.930 ml^ = 29.230 km’^. ou de la Belgique : 1 0.000 -mP = 29.400 km ». Tous ces chilïres, en ce qui concerne la Palestine, sont, bien entendu, a|iproximatifs : les frontières se sont déplacées.

3. Ce point, qui importe à l’histoire de. lésus, a élé contesté par certains éru dits isracliles.s’nppnyant sur quelques indications talnuiiliques très postérieures. Biiciii.ER a défendu la thèse de deux tribunau.t distincts, dont l’un numit été préposé exclusivement aux différends d’ordre religieux : e( cette vue est adoptée dans la Jeish Encyclopedia. Maw les textes (vangcliques, en plein accord avec ceux d «  Jtjsèphe, et les indications qu’on peut tirer du rétablissement, après la c.ilaslrophe de 70, à labné, du Sanhédrin, concordent à prouver qu’il n’y avait qu’un seul tribunal, à compétence universelle. Voir Ed. SciiuREii, C/f, 11, p. 2’i.’)Sqq., et G. Adam S.mith, Jérusalem, the Topography. Economies and Bistory, Edinburgh, 1908, 1, p. 418 sqq.