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JANSENISME

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.4li Mohammed, dit le Bàb, igoS) affirme qu’il put être enlevé par des adeptes, et qu’il reçut une sépulture déliiiitive au pied du Mont Carmel.

Après la uiurt du fondateur, deux frères, fils d’un ancien ministre d’Etat, se partagèrent la direction de la secte. Us se nommaient Mirza Yahya et Mirza Hoséin ; le premier fut surnommé Subh-i-Ezei, c’est-à-dire

« matin d’éternité », et le second Bélià ullah, 

u splendeur de Dieu ». Ils se séparèrent au bout de quelque temps, et leur schisme donna naissance aux deux rameaux actuels du Bâbisme : celui des Béhàis et celui des Ezélis.

En 185’^ eut lieu un attentat bàbl contre le cbab Nasr ed-Din. A la suite de ce fait on exécuta un certain nombre de bàbis ; les plus bauts personnages de la cour tinrent à honneur d’être eux-mêmes leurs bourreaux, et les tirent mourir dans des supplices atroces. A ce moment-là on lit périr aussi Kuiret ul-Ain, qu’on avait évité de condamner jusqu’alors. D’après M. Micolas, on l’étrangla à demi, et on la jeta encore vivante dans un puits que l’on combla ; selon une autre version, on l’enveloppa d’une natte, et on y niit le feu.

Le liàbisme étant traqué en Perse, ses deux chefs s’enfuirent à Bagdad, d’où ils continuèrent leur propagande. En 1864, le Chah demanda au Sultan de les éloigner de sa frontière ; le Sultan leur assigna pour résidence Andrinople : c’est là que les deux frères cessèrent de s’entendre. Peu de temps après, en 1868, il furent relégués, Subh-i-Ezel à Famagusta, dans l’ile de Chypre, et Béhà ullah à Saint-Jeand’Acre. Béhà est mort en 1892 ; son lils Abd ulBéhà. connu en Syrie sous le nom d’Abbas Efendi, a pris la direction de sa secte.

La secte des Béhàis, beaucoup plus importante que celle des Ezélis, a complètement supplanté le Bàbisme original. Le Bàb avait beaucoup écrit ; mais ses livres sont fort peu connus, aussi bien des savants européens que des Bàbis eux-mêmes. Les seuls que lisent les Bàbis sont le lii’yân, le commentaire de la sourate « de Joseph » (chap. xii du Coran) ; le commentaire de la sourate « de r.près-Midi > (chap. cm) et le livre des sept preuves. Ce dernier et le Béyàn ont été traduits en français par M. Nicolas. La langue de ces écrits, qui est du persan mêlé d’arabe, présente diverses particularités.

Béhà a écrit aussi beaucoup de livres, plus lus des Bàbis que ceux du fondateur. MM. Hippolvte Dreyfus et Habib Ullah Chirazi ont traduit en français le Livre de la Certitude et les Paroles cachées. Béhà a à son tour été divinisé par les adeptes de sa secte. Son fils a pris le surnom d’Abd ul-Béhà, c’est-à-dire serviteur de Béhà, de même que les

Musulmans aiment à s’appeler Abd Allah, « serviteur de Dieu ». Ce lils continue l’enseignement de son père. On peut lire sur sa vie et sur sa doctrine : Ahbos Ejendi, liis Life and teacliings, par Mvron H. Phelps, et les Leçons de Sainl-Jean-d’Acre, recueillies par Laura Clifford Bar.ney, traduction française, 1 go8.

D’après la doctrine bàbie, Ali a été le premier Bàb ; Mahomet a dit de lui : « Je suis la cité de la science, et Ali en est la Porte (Bàb). » Après la mort des imams successifs, cette porte a été fermée ; et elle ne devait être rouverte que par le douzième imam, lors de sa réapparation. Le Bàb a prétendu être cette porte et ce douzième imam ; il a dit : u La porte est ouverte et je suis cette porte, u Chez les Ismaéliens, Aaron a été considéré, par rajiport à Moise, comme « la porte » ou a l’introducteur », et en général chaque asâs a été bài, par rapport au nâtiq (imam). Chez les Bàbis, comme chez les Ismaéliens, Dieu produit son attribut, la Volonté, qui crée le monde, afin qu’il soit connu. Son autre allribut, la Vérité, s’incarjie dans un prophète au début de chaque période prophétique. Le prophète ou l’imam est « le point » de cette vérité. La doctrine est un peu moins nette chez les Bàbis que chez les Ismaéliens ; car, dans la terminologie bàbie, le bàb réunit les titres des imams, des asàs et des nàtiq, et il en est de même d’Ali.

Mais l’esprit général de cette religion est plus intéressant que sa théologie. C’est un esprit très doux, très libéral, qui se rapproche de celui de certaines sectes protestantes à tendances mystiques. Il puise un peu partout : dans la Bible et dans l’Evangile, dans la philosophie grecque et dans la scolaslique ; il cherche à unir les religions, comme faisait parmi nous il y a quelques années le néo-christianisme. C’est un esprit qui se complaît dans la religiosité, mais qui est peu soucieux de liturgie et de dogmes. Les apôtres bàbis s’adressent à chacun selon ses croyances, d’après l’ancienne méthode des missionnaires ismaéliens ; ils s’appuieront sur le Coran, s’ils parlent à un musulman, sur l’Evangile si c’est à un chrétien ; avec un libre penseui-, ils invoqueront des arguments scientifiques. On les voit très préoccupés de modernisme, et au courant des fait.- religieux les plus récents ; ils connaissent le théosophisnie, et le combattent sur quelques points, notamment en ce qui concerne la multiplicité des existences. En politicjue et en sociologie les tendances de la secte sont nettement progressistes. Le Bàbisme a séduit beaucoup d’àmes dans le monde anglo-saxon. Il a déjà joué, et il jouera sûrement encore un grand rôle dans l’évolution du monde oriental.

Baron Carra de Vaux.

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JANSÉNISME. — Le Jansénisme est tout à la fois un système théologique et un parti.

En tant que système théologique. c’est la doctrine de Jansénius — plusieurs fois condamnée par l’Eglise — sur la grâce et la prédestination. Tel est le sens propre du mot. Au figuré, c’est une sorte de rigorisme dans la conduite de la vie et dans l’application des principes de la morale. Dans cette seconde acception, Pon parle de la morale et des principes jansénistes.

Au sens propre, cette doctrine peut se résumer comme il suit : depuis la chute d’Adam, la volonté de l’homme est soumise tantôt à la grâce, tantôt à la concupiscence ; intérieurement, elle n’est donc pas vraiment libre, et sa liberté consiste simplement

Terne II.

en ce qu’elle est exemple de toute contrainte extérieure. L’homme ne résiste jamais à la grâce : si Dieu nous la donnait toujours, nous ne pécherions jamais. Il nous la refuse parfois et laisse dominer la concupiscence qui nous porte invinciblement au mal. La grâce du salut n’est pas accordée à tous ; car Jésus-Christ n’a pas répandu son sang pour tous. Il est mort pour les seuls prédestinés. A ce Jansénisme proprement dit, austère et sombre par lui-même, les Jansénistes joignaient d’ordinaire, dans la morale, en pratique comme en théorie, une austérité minutieuse et rigide, ennemie du probabilisme et des solutions accommodantes. Selon eux, les confesseurs devaient différer l’absolution au pécheur, l’éprouver par de longues pénitences même

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