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IRAN (RELIGION DE L* ;

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avec l’Evang^ile sur le point fondamental du royaume de Dieu (art. Zoroasliianism dans Jincycl. l/ihlicn). Des deux côtés on attend le royaume, on le désire, on } travaille, on le croit prochain. Puis la perspective s’éloigne et la tliéolojrie est chargée d’explirjuer eomment l’attente doit se reporter au monde futur de l’éternité.

On conviendra qne ces insinuations plus ou moins fermes, plus ou moins condensées en un système logique, jièsent lourdement sur l’étude de la théologie dans les deux Testaments.

Trois solutions sont possibles Ou bien chacune des religions a suivi sa voie, ou bien l’une des deux a intlué sur l’autre, le Judaïsme sur le Zoroastrisnic ou réciproquement. Secondairement on pourrait envisager l’hypothèse d’une influence commune, Babylone ou la Grèce.

Le théologien biblique supposera suffisamment connu dans les grandes lignes un des termes de la comparaison, le Judaisme. Il emprunte l’autre terme à r.vesta. Mais aussitôt surgit la question préalable : De quand date l’Avesta ? Question sur laquelle les éranisles sont loin d’être d’accord. U serait assurément téméraire de l’aborder directement, sans connaissances philologiques, mais on peut chercher uiodeslement à s’orienter en prenant pour base les points admis par les spécialistes. C’est ce que nous es-^ayerons de faire. D’ailleurs l’Avesta n’est point une source unique. Il y a les textes des Grecs et les inscriptions des rois Achéménides ; la date qu’on donne à l’.^vesta doit être en harmonie avec ces témoignages datés.

Voici, pour le dire en un mot, la question précise qui se pose en fait. L’Avesta, ou religion de Zoroastre, est un système religieux formel, une religion historique dans toute la force du terme, quelque chose d’analogue à la prédication de Mahomet. Avant d’embrasser ce système religieux défini, les Perses avaient une religion naturelle, comme tous les autres peuples de l’antiquité. A quel moment faut-il placer la prédication du prophète qu’on nomme Zoroastre, la réforme et la transformation qui l’ont suivie ? Si c’est avant les Achéménides, il peut être question d’une inQuence de Zoroastre sur la Bible ; si c’est après Alexandre, combien les conditionsdu problème sont changées ! Il est surtoutnécessaire de distinguer entre le système religieux des Mages et la religion qui l’a précédé. D’où notre i)lan : 1. De quand date l’Avesta et quel est le caractère de cette réforme ? — II. Quelle était auparavant la religion des Perses, surtout par rapport aux points controversés ? — m. Ces points fixés nous permettront d’envisager les rapports du Judaïsme avec les Perses.’I. La réforme attribuée à Zoroastre. — c L’Avesta, tel que nous le possédons, n’est que le débris d’une littérature beaucoup plus vaste, divisée en vingt [et un] livres ou JVasks, que l’on possédait au temps des Sassanides’. » (Dahmbstetbr, JCcnd-Avesla, m, p. VII.) Darmesteter, auquel nous empruntons ce début, ajoute que, d’après la tradition parsie, les vingt et un livres répondaient aux vingt et un mots de la célèbre prière Aliuna vairya. Ainsi les vingt-deux livres du canon hébreu répondent aux vingt-deux lettres de l’alphabet (saint Jiîhômk, Prolagiis galeatas). De plus, l’Avesta était divisé en trois parties : les Nasks relatifs aux Giitluis^ qui sont comme la promulgation inspirée delà loi nouvelle, les Nasks de la loi, dont fait partie le Vendidad, et les Nasks

1. Nous nous référons toujours, en cilunl Diirmpsteter, -i cet ouvrnge monunieatid qui nous sert de point d’appui, sinon toujours <ie guide, et au([uel nous empruntons toutes les traductions de r.vesla, sauf indictition contrait-e.

mixtes. Il est dîfiicile de ne point constater avec Darmesteter que cette division correspond à celle du canon juif : la Loi, les Prophètes et les Ecrits. Seulement dans l’Avesta l’ordre est interverti entre la loi et les prophètes, car les Nasks gâthiques contiennent plus de théologie que la loi et ont plus d’importance religieuse. Cette classification était d’ailleurs tout à fait artificielle, et les savants modernes n’ont point l’habitude de s’y référer. Par exemple les ïnshts, qui sont des hymnes aux dieux, sont rangés dans la section dàtique ou législative. Tout ce qui nous est parvenu n’a été conservé que par la liturgie. On est donc dans l’usage de citer le Yasna. ou le sacrifice, contenant un certain nombre de lias ou chapitres, parmi lesquels figurent les vingt-deux Gàthas, le Vendidad ou livre des purifications (jne nous possédons tout entier, et les Yashts. Ces indications sailliront à la présente étude.

L’Avesta sassanide avait donc incontestablement la physionomie d’un canon. Tout le monde accorde qu’il fut définitivement clos sous Sapor 1" (251-272). Le triomphe de l’orthodoxie fut asstiré sons Sapor II (30/|-37g). Adarbàd, fils de Mahraspand, mettant en action un vers des Gàthas, confondit les incrédules et tes hérétiques en se soumettant à l’épreuve du Var, c’est-à-dire en se faisant verser du métal fondu sur le cœur, sans en souffrir. « Maintenant que la vraie religion s’est montrée à nos yeux d’une façon visible, dit Shfthpfibr (Sapor), je ne souffrirai plus de fausse religion. » (D.

M., lII, p. xxxv.) A ce nionient

la religion de l’Avesta est otliciellement la religion des Perses. On peut dire (Qu’elle l’était déjà, ou du moins qu’elle le devint au temps du fondateur de la dynastie des Sassanides, Ardashir Bâbagàn (21 1--226, 126-2^i) et par son fait. Il se donne comme le restaurateur de l’Empire des Perses et se propose en même temps de restaurer leur religion. Il remplace sur ses monnaies le titre de Philhellène par celui de Mazdayasn, « adorateur de Mazda », et cette religion des Perse^ est incontestablement celle de l’Avesta ; il en établit le texte de telle sorte que les additions postérieures n’entrent pas en ligne de compte au point de vue religieux.

D’après Darmesteter, le roi sassanide a fait beaucoup plus. Son auxiliaire, le grand prêtre Tansar,

« que le roi charge de recueillir et de compléter

l’Avesta et dont il estampille l’œuvre du caractère officiel, fut le théoricien du règne et le véritable organisateur du Néo-Mazdéisme » (Darm., III, p. xxv). Masoudi le qualifie de platonicien, c’est-à-dire de néo-I )Iatonicien, et il aurait fait pénétrer dans l’Avesta ses théories particulières. Car il ne se serait pas contenté de le recueillir, il l’aurait rédigé pourunebonne partie. Cependant Darmesteter fait une place à part aux Gàthas. Avec tous les éranistes, il juge que ces hymnes, écrites dans un dialecte spécial et dans un rythme mieux marqué, sont les parties les plus anciennes de l’Avesta. Elles ont pu être composées sous Vologèse 1er (50-70). Elles sont postérieures à Philon, auquel elles ont emprunté la théorie des hypostases, mais à coup sûr antérieures au roi indo-scythe Kanishka (i io-130), parce que les noms de ces divinité* o hypostases figurent déjà sur ses monnaies sous leur forme pehlvie, c’est-à-dire sous une forme phonétique dérivée par rapport à la langue de l’Avesta’.

1. C’est par une confusion que cette langue est souvent désignée sous le nom de Zend. Les textes pehlvis (la langue dérivée de l’ancien perse, avec un fort mélange de termes oraméens) désignent sous le nom de Zend le commentaire de l’Avesta en langue pehlvie. La langue aveslique est ti-ês rapprochée de l’ancien perse. Darmesteter la regarde comme étant la langue parlée dans les pays <pii sont devenus lvfghnnistan.