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INVESTITURES (QUERELLE DESj

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voulu les plus zélés. Il avait prêté serment à Henri de ne pas lui demander raison du passé ; en rapportant ce qui dans les concessions faites à l’empereur était contraire aux droits de l’Eglise, le pape se croyait pour le reste tenu à ses engagements.

4° Le concile de lieims. — A la mort de Pascal II (il janvier iiiS), la solution du conflit semble plus lointaine que jamais, toutes les tentatives faites l)Our concilier les droits et intérêts en jeu ayant tour à tour échoué. Henri V, qui a cru remporter grâce à une défaillance du pape tléfunt, marche vers Kome dans l’espoir d’imposer au nouveau pontife, GhlaseII, les mêmes conditions qu’à son prédécesseur. Mais le pape nel’attend pas et s’enfuit. Henri Vlui oppose un antipape, Maurice Bourdin, comme son père avait ])iétendu substituer Guiberl de Ravenne à Grégoire VII. Gélase chercha, comme précédemment Pascal, un refuge en France. Arrivé à Cluny, il y mourut (29 janvier 1 1 19). Les cardinaux lirentchoix pour lui succéder de l’archevêque de Vienne, Guy, apparenté aux Capétiens, qui jouissait en Bourgogne et en France d’une grande autorité. L’un des premiers actes du nouveau pape, qui prit le nom de Calixte II, fut de convoquer un concile à Reiras, où Henri V promit de paraître en personne, mar(ji : anl ainsi que l’antipapequ’il avait créé ne comptait pour rien à ses propres yeux.

Deux grands personnages du royaume de France, l’abbé de Cluny, Pons, et l’évêque de Châlons, Guillaume de Champeaux, furent députés par le pape à l’empereur pour négocier les bases d’un accommodi-meut. La paix n’était possible, déclara Guillaume à Henri, que s’il renonçait à l’investiture. Le prélat ajouta que l’autorité royale pouvait n’en recevoir aucune atteinte : « Quand j’ai été élu évcque, dit-il, je n ai rien reçu du roi de France ni avant ni après mon sacre, et cependant par les tributs, le service militaire, les impôts et les autres droits qui appartiennent à l’Etat, je le sers aussi fidèlement que les évêques de votre royaume vous servent en vertu de l’investiture. » (Ilessotiis scliolastici relatio de concitio Bliemensi, Mon. Germ., Scriptores, t. XII, p. 423.)

L’empereur ayant paruacquiescerà ces ouvertures, des instruments de paix furent préparés. Henri V déclarait renoncer à toute investiture de toutes les églises. Mais quand on voulut préciser le sens de cette formule, on s’aperçut que l’empereur entendait donner 1 investiture des régales.. la vérité, les papes tolèrent qu’en France elles soient délivrées par le roi ou le seigneur à l’évêque après son sacre, mais la papauté, qui n’a pas sanctionné cet usage, n’a fait accord avec le roi d’Angleterre qu’au jour où il renonça purement et simplement à investir les évêques. La même exigence fut maintenue vis-à-vis d’Henri V, dont on se déliait, et les négociations furent rompues. Au concile de Reims, Calixte II renouvela les décrets de ses prédécesseurs qui prohibaient toute investiture, puis le pontife et les 427 évêques ou abbés présents jetèrent l’anathème sur l’enqiereur et l’antipape, déliant les sujets d’Henri V de leur serment de lidélité.

5* Le concordat de W^orms. — Soutenu par l’adhésion de toute la chrétienté, Calixte II rentre en Italie, où l’antipape lui est livré. Le schisme est éteint. Au même moment, l’Allemagne se soulève, la féodalité laïque et ecclésiastique du royaume fait entendre à Henri V qu’on est las du conllit et qu’il ne sera plus obéi s’il n’obtient d’être relevé de l’anathème. Calixte Il manifeste d’ailleurs les dispositions les plus conciliantes ; il écrit au roi excommunié : « L’Eglise ne cherche pas à revendiquer rien de ce qui vous appartient : que l’Eglise possède ce qui est à Jésus-Christ, que l’empereur garde ce qui est à lui : que

chacunedes deux parties se contente de son ofliee. » {liullaire,. ii, p. 6.) Des négociateurs envoyés par le pape et par l’empereur s’abouchèrent à Worms.De part et d’autre, de nouvelles concessions furent faites.

En vertu d’un premier instrument de paix, l’empereur non seulement renonce à investir de l’évèché, mais abandonne toute investiture par la crosse et l’anneau. L’élection et le sacre seront lil)res :.( Dimitto oinnein ifiyesliiuram peranuliim et baciitum et concedo in uninihiis ecclesiis que in vegno vel iinperio meo sunt, canonicam fien electioneni cl liberam consecralioneni. » (Weiland, p. 159.)

Un second acte renferme les concessions pontificales qui constituent un privilège accordé non pas aux empereurs, mais à Henri empereur ; c’est une faveur qui lui est faite personnellement « iibi dilecto filii) lleinrico concéda ». En Allemagne, les élections se feront en présence du roi, mais sans simonie et sans violence. Si un différend s’élève, le roi soutiendra la partie la plus saine du corps électoral..-Vvant de se faii-e sacrer, l’élu recevra du roi les régales par le sceptre. Il remplira à l’égard du roi tous les devoirs qui lui sont dus en raison des régales. Dans le reste de l’empire, c’est-à-dire en Italie, en Bourgogne et Provence, le roi conférera aussi les régales par le sceptre, mais seulement après le sacre, et il n’aura aucune part dans l’élection.

Les idées de Grégoire VII ont donc triomphé : l’investiture laïque de l’cvêché est supprimée ; l’élection et le sacre font seuls l’évêque ; il est élu selon les régies et consacré librement. D’autre part, la papauté, ayant obtenu gain de cause sur l’article essentiel, a admis que le roi investisse les évêques de leur seigneurie. Sans doute, en droit, le temporel entier est la propriété de l’Eglise seule ; en fait, la papauté a reconnu qu’elle ne peut déposséder le roi du droit de conférer les régales. Pascal II avait songé même un instant, on l’a vii, à dépouiller les prélats des regatia. C’eut été sacrifier le droit des églises. La concession faite à Worms consacrant une pratique déjà établie et tolérée en France, laisse au roi l’investiture du temporel, à condition que l’investiture du spirituel soit nettement abolie. Calixte H, qui d’abord avait refusé de laisser auome investiture au roi, s’est contenté d’en obtenir l’abandon de toute investiture par les insignes sacrés ; il admet que le roi investisse des régales par un symbole qui caractérise la souveraineté temporelle, le sceptre. Enfin les concessions faites à Henri constituent un privilège, et bien qu’en fait ses successeurs en aient aussi joui, il laisse intact le droit ecclésiastique dont la papauté consent à relâcher pratiquement la rigueur.

Dans tous les pays qu’elle avait agités, la querelle des investitures se termina donc d’une part par le triomphe des idées grégoriennes et de la doctrine que les églises sont libres, — difautre part par une transaction dans le domaine des faits. La solution donnée par la papauté à ce grand conflit est une application de l’attitude prise par le pouoir ecclésiastique dans toutes les questions qui relèvent à la fois du spirituel et du temporel : maintien des conditions essentielles à la liberté de l’Eglise, tolérance de pratiques qui répugnent au droit ecclésiastique strict, mais que l’ordre politique et social ne permet pas d’abroger.

pales. — Pour la

vera dans la Patrologie latine (t. CXLVIII), publiées par jAKFii avec l’œuvre d’un des partisans