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INSTRUCTION DE LA JEUNESSE

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défense de l’école chrétienne n’a pas une direction unil’oriue. Presque tous les diocèses ont des comités diocésains j)ré<idés par l’évêque, mais organisés difl’éreminent selon les circonstances ; d’autres ont de nombreux comités locaux nés sur place, le jour nièuie d’une laïcisation qui avait soulevé une ]iopulalion tout entière. En général, les comités se proposent [)rincipalcnienl de recueillir dans tout le diocèse les ressources nécessaires aux paroisses les plus pauvres et hors d’état d’entretenir elles-mêmes des écoles libres. Là, ce sont des mères de famille de tout ran^ qui se sont constituées en comité local, sous la présidence de leur curé ou d’un laïque notal )le.Ici, c’est un pauvre curé achetant à crédit la maison dans laquelle il oUrait asile aux religieux qui tenaient hier l’école coninuinale. Il ne savait comment payer cette maison, il adressait des appels à ses paroissiens dont quelques-uns formaient le comité de l’œuvre des écoles. Dans certaines villes, on organise le denier des écoles catholiques. Dans beaucoup d’autres aussi, des sociétés civiles ont été fondées, en vue de construire et d’entretenir des immeubles qu’elles louent pojir des écoles catholiques.

— L’autorité épiscopale tend très heureusement à instituer à l’heure actuelle — on peut dire presque partout — un directeur diocésain de l’enseignement primaire libre, souvent assisté d’un ou de plusieurs inspecteurs, centralisant les conseils, les renseignements juridiques et pédagogiques nécessaires aux instituteurs et aux institutrices libres du diocèse, dont il règle la nomination et l’avancement, organisant les examens, les concours entre les écoles, décernant les diplômes, recevant les protestations dans les cas où la neutralité promise est v’iolée et les signalant à l’autorité administrative. Les Congrès diocésains, qui se multiplient, sont les très fécondes écoles d’application de cette organisation.

Depuis trente ans, la question de l’enseignement religieux agite plus vivement les esprits. De très louables et de plus en plus nombreuses Associ.ilions de pères de famille se fondent présentement pour surveiller l’enseignement donné dans les écoles oflleielles. UVninn des Associations catliolir/iies de chefs de famille, qui s’est donné la mission de grouper ces forces éparses, comptait, au i" avril 1913, 21 Fédérations diocésaines d’.ssociations comprenant plus de 600 Associations déclarées et groupant 62.0 1 5 chefs de famille. Celte surveillance de l’école laïque a contraint certains instituteurs olFiciels à garder plus de réserve ou de prudente modération dans leur enseignement.

Les catholiques ont entrepris un aussi heureux mouvement pour la revendication d’un régime scolaire plus conforme à l’équité. En igog et en 1910, quelques évêques et quelques publicistes proposaient la répartition des fonds publics entre les écoles neutres et les écoles confessionnelles, en proi)ortion du nombre de leurs élèves et delà qualité de leur enseignement. Us citèrent les exemples de l’Angleterre et de la Hollande, pays protestants dans lesquels les écoles confessionnelles reçoivent des subventions de l’Etat. Ces faits, ces idées, peu connus, peu compris en France, ne trouvèrent pas d’abord grand écho. Mais aujourd’hui, après trois années d’intelligente et d’activé propagande, peut-être même à la faveur du succès des projets de représentation proportionnelle dans les élections politiques, la répartition proporlionnelle scolaire a fait des progrès considérables dans l’opinion ; elle figure présentement au premier rang des revendications catholiques.

On ne saurait redire trop haut et trop souvent que le bon sens et l’équité condamnent le privilège de l’école laïque, trop habituer les esprits à la per.spec tive d’une séparation nécessaire des Ecoles et de l’Etal. Citons encore M. DR la BuniRE, Eludes, t. CXXXV, p. 407-409, 5 mai igiS :

« Le principe de la répartition proportionnelle scolaire, 

intégralement compris et appliqué, n’aurait-il pas pour conséquence normale la disparition pure et simple de celle création napoléonienne qu’on appelle l’école publique, l’enseignement d’Etat ?… Dans l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, les écoles seraient constituées, organisées, régies par des associations autonomes, les unes laïques et les autres confessionnelles. L’école laï<iue cesserait d’être un établissement otliciel, pour devenir une école libre, soumise en toutes choses au même régime légal que l’école confessionnelle. On ne conserverait plus d’école publique et ollicielle que dans les communes où l’initiative privée, même stimulée par les subventions budgétaires, n’aurait pas déterminé l’ouverture d’écoles autonomes. L’Etal se contenterait, normalement, d’exercer un contrôle supérieur, pour la sauvegarde légitime de l’ordre public, et de pourvoir à l’équitable distribution des ressources budgétaires entre les écoles laïques et les écoles confessionnelles, en proportion même des charges auxquelles les unes et les autres seraient tenues, respectivement, de subvenir.

a Il nous semble que ce régime présenterait un double avantage. D’une part, l’école laïque perdrait le prestige et les privilèges d’école ollicielle, la concurrence entre l’école laïque et l’école confessionnelle se ferait à armes égales, et, par le seul jeu de la complète liberté ainsi rendue au choix du père de famille, l’enseignementconfcssionnel gagneraitindubitablement des recrues en proportion considérable. D’autre part, les maîtres de l’école laïque, cessant d’être fonctionnaires de l’Etat, seraient affranchis des influences extra-professionnelles, libérés de la tyrannie des politiciens, dont ils se plaignent à si juste litre : tout ce qu’il y a de raisonnable dans les revendications corporatives des instituteurs syndicalistes ne se réalisera peut-être que par le « désétablissement » de l’école laïque…

« Lorsque les évêques et les catholiques commencèrent

à revendiquer, sous Louis-Philippe, la liberté de l’enseignement secondaire, et, sous Napoléon III, la liberté de l’enseignement supérieur, le succès n’était pas beaucoup plus vraisemblable que ne l’est aujourd’hui la transformation de notre régime scolaire dans le sens de la répartition proportionnelle des fonds publics entre les écoles laïques et les écoles confessionnelles. Pouvait-on prévoir en 1844 ou en 1868 quels prochains bouleversements politiques et sociaux allaient faire de l’impossibilité de la veille une réalité du lendemain et permettre une organisation partielle de la liberté de l’enseignement secondaire par la loi du 15 mars1850 et de la liberté de l’enseignement supérieur par la loi du 12 juillet 1876 ? Mais ces deux lois auraienl-elles été concevables si, depuis plusieurs années, les catholiques n’avaient pas mené une campagne retentissante et persévérante pour réclamer le droit d’ouvrir des collèges catholiques, puis des universités catholiques ?


« Aujourd’hui, c’est en faveur de la grande liberté

d’enseignement, c’est-à-dire en faveur de la répartition proportionnelle scolaire, … c’est contre le monopole budgétaire de l’école laïque que les catholiques vont mener une campagne retentissante et persévérante. Sur un pareil terrain, l’offensive deviendra facilement redoutable. Qu’on n’ait pas la témérité de proclamer la victoire à jamais impossible 1 »

I.éon XIII et l’école neutre. — La plus haute autorité de l’Eglise n’a cessé de rappeler les dangers de