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INSPIRATION DE LA BIBLE

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qu’est l’inspiration en Dieu qui la produit. b) L’inspiration dans l’hagiograplie : i" dans sa volonté, 2° dans son intelligence, 3° dans ses facultés d’exécution, c) L’inspiration dans son terme, qui est le texte biblique lui-nicnie.

III. Etendue DE l’ixbpiratiox. — i. Inspiration totale du contenu de la Bible, a. Inspiration verbale.

IV. Critères de l’inspiration. — l. Critères insuffisants. 2. Critère traditionnel.

V. L’iNSl’inATION CHEZ LES PROTESTANTS. — I. LeS

débuts de la Réforme, a. Nationalisme biblique. 3. Positions actuelles.

l. Croyance en des livres inspirés. — i. Chez les Juifs. — La croyance au caractère sacré de certains livres est aussi ancienne que la littérature liébraïque. Moïse et les Prophètes avaient mis par écrit une partie du message qu’ils devaient transmettre à Israël de la part de Dieu. Or le nabi (prophète), qu’il parlât ou qu’il écrivit, était pour les Hébreux l’interprète autorisé des pensées et des volontés de lahvé. Aussi bien, l’appelait-on « l’homme de Dieu » ou encore

« l’homme de l’Esprit ». Osée, ix, ’j. C’est autour

du Tein])le et du Livre que se lit, après l’exil, la restauration religieuse et nationale du peuple juif. Néhéiuie et Esdras s’étaient préoccupés de bonne heure de collectionner les écrits des anciens prophètes, et Judas Macchabée en lit autant après la persécution d’Antiochus. Il Macch., ii, 13, 14- Trente ans plus tard, la collection comprenait trois groupes, qu’on appelait déjà des noms qui devaient leurrester : la Loi, les Prophètes, et les autres Ecritures. Cf. iE’cc/ ;., Prologue du traducteur grec. Il importe peu pour la question présente qu’à cette même époque (vers 130 av. J.-C.), le canon des Juifs d’Alexandrie ait été ou non plus complet que celui de leurs coreligionnaires de Palestine ; ce qui est sûr, c’est que les uns et les autres reconnaissaient à certains écrits un caractère religieux. Cf. Canon catuolujub, col. Ijlio 442.

Philon (de — 20 à-(-50) parle de « livres sacres », de « parole sacrée >i, d’ « Ecriture très sainte ». De vit. Mosis, iii, 23. Cf. H. E. Ryi.e, Philo and HoW Scripture, iSgS, p. xvi. Quant au témoignage de Fl.vvius JosÈi’iiE (S^-gô), il est plus caractéristique encore. C’est sous sa plume que l’on rencontre pour la première fois le mol d’inspiration (inirviia). « Nous avons vingt-deux livres renfermant une histoire de tous les temps et qui passent, à bon droit, pour être divins… De quelle vénération nous entourons ces livres, c’est ce qui est de soi manifeste. En elTet, après un si long laps de temps, personne n’a encore osé y ajouter, en enlever ou y changer quoi que ce soit ; mais on inculque à tous les Juifs, dès le berccati, de croire que ce sont là des conuuandements de Dieu ; de telle sorte qu’ils s’attachent tout d’abord à ces Livres, et savent mourir volontiers pour eux, quand c’est nécessaire. » Contra Apion., I, 8. Pourquoi cet attachement poussé jusqu’au martyre ? Le même auteur nous le dit : a Ce n’est pas au premier venu qu’il a été donné d’y mettre la main, mais aux seuls Prophètes, qui ayant appris les choses de la |)lus haute anti([uité par inspiration divine, ont aussi écrit clairement les choses de leur temps, comme elles se sont passées. » Ibid., I, ^,

La foi des Juifs dans l’inspiration de leurs Ecritures ne s’est pas alTaiblie à partir du jour où ils ont été disperses par le monde, sans Temple, sans autel, sans sacerdoce ; au contraire, elle est allée en grandissant, et elle a même fini par tenir lieu de tout le

reste. La Bible, parole de Dieu, qui seule a survécu à tant de catastrophes, demeure le suprême soutien des Israélites croyants.

2. Chez les Chrétiens. — L’Evangile ne contient pas de déclaration expresse sur l’origine et la valeur des Ecritures, mais on y voit que Jésus-Christ les a traitées comme la parole de Dieu, conformément à la croyance générale. La chose est manifeste dans le récit de la tentation du Christ au désert, dans l’entretien avec les disciples d’Eiumaiis, dans les discussions avec les Scribes et les Pharisiens. Ces paroles les plus décisives à cet égard sont rapportées par saint Jean, v, 39 ; x, 35. Dans la bouche et sous la plume des Apôtres, les mots Ecriture, Parole de Dieu, Esprit de Dieu, Dieu lui-même sont des tenues équivalents, qu’on peut échanger à volonté. En se servant des formules : // est écrit, l’Ecriture dit, ils entendent désigner quelque passage d’un des écrits tenus pour inspirés de Dieu ; et, par le fait, presque tous les livres de l’Ancien Testament (sept ou huit seulement font exception) sont cités par eux comme Ecriture. Saint Paul en appelle plus de quatre-vingts l’ois, d’une façon expresse, à ces " oracles divins dont Israël a reçu le dépôt ». Hom., m. 2 ; cf. ix, 4 Cette persua’sion des premiers chrétiens n’est pas simiilement l’effet d’une tradition juive acceptée de couliance et restée incomprise, saint Pierre et saint Paul en avaient donné la raison. C’est que u toute Ecriture est inspirée de Dieu » SicrvtyjTOs. II Tim., iii, iG. Aussi bien, la foi îles fidèles ne repose pas sur de « savantes fables », mais sur « un discours prophétique plus ferme |qne n’importe quelle parole hunuiiiie] ; car c’est sous l’impulsion de lEsprit-Saint {i-i TTji-i/uiKTîi ù/i’, j tfîp6u.vj-yt) que [dans 1 Ecriture] des hommes ont parlé de la part de Dieu ». Il Pelr., i, 20, 21. -V ne tenir compte que de la grammaire, on peut d<inner à SsoTr.’ivjT » ; un sens actif et traduire

« toute Ecriture qui respire Dieu », qui est animée

de son Esprit (cf. H. Crembr, Hibl. Theol. U’orterbuch der Seutestam. Griicitat, 1902^, p. 480) ; mais c’est un fait que les Pères grecs (qui devaient connaître leur langue) l’ont entendu au passif, comme fout les Pères latins. la version syriaque et notre Vulgate, qui traduit Untnis.'>criptura divinitus inspira ta.

Les Apôtres et leurs premiers disciples n’ont pas restreint l’inspiration aux livres quils tenaient des .liiil’s. Ils étendent cette prérogative à des textes de date récente et d’origine chrétienne. C’est déjà l’attitude prise dans la H’Pétri, iii, 15-16, à l’égard de » Epitrcs de saint Paul, et l’on sent que l’auteur de r.pocaIypse avait une conscience très nette de sa propre inspiration. Cf. i, 10, 11 ; xxii, 18, 19.

La tradition chrétienne a lidèlement gardé la croyance primitive dans l’inspiration de l’Ancien et du Nouveau Testament. C’est là un fait dont témoigne l’histoire du Canon. Des ouvrages spéciaux (P. Dausch, Die Schrifïinspiralion, 1891 ; Chr. Pbsch, De inspir..S’,.’^cripturae, 1906 ; p. 40-3^9) citent et discutent les textes du point de vue jiartioilier que nous envisageons dans le présent article. L’Iiistoire sullit à établir que, de tout temps, Juifs et Chrétiens ont cru à linspiration de la Bible, quaiil à la vérité (le leur croyance, elle repose sur les titres mêmes que le judaïsuie et le christianisme ont d’être tenus pour la religion véritable. S’opposer à cette prétention sous prétexte que toutes les religions ont regardé comme divins les textes qui racontent leurs origines et contiennent leur loi, c’est répéter le sophisme banal : il existe plusieurs religions, donc il n’en est aucune de vraie, ou bien elles le sont toutes également.

L’Eglise a toujours rangé l’inspiration de la Bible au nombre de ses dogmes. Dbnz.’", n. 348 (296), 421