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INSOUMIS

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INSOUMIS. — I. Par le nom â’insoitmis nous désignons le jeune homme qui, ayant reçu un ordre d’appel sous les drapeaux, n’a pas rejoint, se caclie et se soustrait ainsi au devoir militaire. Il se distingue du déserteur qui, lui, a été soldat et s’est enfui. La presse, à commencer parla France militaire, jelle de nouveaux cris d’alarme à propos de l’accroissement du nombre des insoumis et des déserteurs. Les staiistitjues comparées, dont les plus importantes données proviennent du rapport sur le budget de la guerre (igii) présenté au Sénat par M. Waddington, mettent en un douloureux relief la plaie, autrefois presque ignorée, de l’insoumission, dont on indiquera sommairement les causes et les remi ; des.

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On voit la gravité du péril. El encore y a-t-il lieu d’observer qu’il y a un très grand nombre d’om/s.Eri effet, les tableaux de recensement, qui constituent la base essentielle de la formation du contingent, présentent de très nombreuses lacunes, parce que les intéressés, qui négligent de s’y faire porter, ne sont pas punissables. Dans certaines mairies, on inscrit au tableau de recensement tous les jeunes gens nés dans la commune, quitte à rayer ensuite ceux qui sont signalés comme s’étant fait inscrire dans une autre localité. Mais en beaucoup d’endroits, et principalement dans les grandes villes, on suppose a priori inscritsailleurs, et l’un passe sous silence tous les jeunes gens qui ont quitté l’arrondissement, ou au moins tous ceux dont les parents ont transporté leur domicile dansune autre commune. Il sullit donc, pour éebajjperà tout service militaire, de disparaître de la ville ou du village où l’on est né, d’aller habiter ailleurs et de ne faire aucune déclaration. On ne court même pas le risque d’être déclaré insoumis. Si un hasard malheureux vous fait découvrir, on est un simple omis, tenu seulement d’accomplir son service avec la première classe à incorporer.

Que fait-on pour atteindre les véritables insoumis, ceux qui, régulièrement inscrits, ont sciemment fait défaut ou n’ont pas été touchés par leur ordre d’appel ? Chaque bureau de recrutement dresse la liste de ses insoumis et envoie leur signalement non pas, comme on pourrait le supposer, à toutes les brigades de gendarmerie de France, non pas même à toutes les brigades du département ou de l’arrondissement, ainsiqiiecela était prescrit autrefois, mais aux seules brigades « qui, en apparence, peuvent être intéressées », et au l’ar<]uet du lieu de naissance. En fait, la seule brigade informée est celle du lieu de naissance, c’est-à-dire celle qui a le moins de chances de pouvoir mettre la main sur l’inculpé.

Celui-ci peut donc, sans aucun danger, s’installer dans les communes les plus proches de son lieu de naissance ; pourvu qu’elles dépendent d’une brigade différente, il y demeurera en parfaite sécurité. C’est ainsi que des milliers déjeunes gens dépassent l’âge de servir sans avoir été inscrits sur aucune liste, ou, inscrits et insoumis, ne sont l’objet d’aucune recherche sérieuse.

Les statistiques font ressortir une très forte proportion d’insoumis parmi les jeunes gens résidant hors de France. Comment un si grand nombre de jeunes gens peuvent-ils se tenir dans les marges de la loi ? L’article 50 de la loi de 1889 tes exemptait, en temps de paix, de tout service militaire. La loi militaire du 21 mars igoS a omis de reproduire une des dispositions de la loi de 1889, qui Uxail à 50 ans l’âge où la prescription était acquise par l’insoumis. De plus, elle décide que les déserteurs et insoumis ne seront pas astreints à un service actif au delà de leur trentième année révolue ». Si elle impose aux jeunes gens résidant hors de France de venir passer deux ans à la caserne en France, elle autorise à leur accorder dessursisjusqu’à vingt-cinq ans. Qu’arrivet-il ? C’est qu’à cet âge beaucoup sont définitivement établis, mariés, et que l’obligation de rentrer leur est beaucoup plus pénible qu’elle ne l’aurait été quatre ans plus tôt. C’est pourquoi ils augmentent le nombre des réfractaires au devoir militaire.

II. Causes d’augmentation de l’insoumission. — On doit assigner, comme causes de l’augmentation croissante des réfractaires : 1" les développements de l’enseignement antipatriotique donné dans un grand nombre d’écoles publiques ; 2° les progrès de l’antimilitarisme ; 3’la faiblesse du Parlement et des pouvoirs publics ; 4" l’incohérence des mesures de répression.

i* L’enseignement de l’école laïque a sa grande part de responsabilité. Il suffit de comparer les chiffres respectifs de 1662 insoumis en 1879, avant les lois de laïcisation, avec ceux de 5. 000 en 1898, 1900 et igoS, de 8.000 en igoô, de 10.000 et plus, de 1906 à 1910, c’est-à-dire depuis l’extension de l’enseignement laïque, pour établir péremptoirement l’étroite corrélation entre les progrès de l’insoumission et ceux de l’école laïque. On a relevé maints exemples de prol )agande antipatriotique donnés par trop d’instituteurs publics… La presse a signale le ravalement pédagogique, longuement toléré, sinon encouragé, du devoir militaire ».

2° La diffusion, trop longtemps tolérée et point encore suffisamment réprimée, des doctrines antimilitaristes. Ce n’est point impunément que les jeunes gens qui vontêtre appelés sous les drapeaux peuvent couramment lire ou entendre répéter que la caserne est un bagne, que les officiers sont des brutes galonnées, et que l’uniforme constitue une livrée déshonorante. Les insulteurs du drapeau ont encore la partie belle, puisque l’on n’ose point s’attaquer ouvertement à la Confédération générale du trai ail qui est le quartier général de tous les révolutionnaires et l’académie des professeurs d’antipatriotisme et d’indiscipline. — Les doctrines antimilitaristes de la C. G. T. et antipatriotiques de nombreux instituteurs laïijues, en écartant la croyance à une autre vie, en faisant appel aux pires sentiments d’égoïsme et de lâcheté, ont préparé ces myriades d’insoumis — l’effectif de deux corps d’armée, a-t-on calculé — contre lesquels n’ont été prises, jusqu’ici, que des mesures dérisoires.

3" La fréquence des amnisties, votées le 27 avril 1898, le 27 décembre 1900, le i avril igo4 et le 12 juillet igoû. Cette absolution législative, pério-