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INQUISITION

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particulière pendant la guerre et surtout lorsque la résistance méridionale sembla définitivement vaincue.

En 1 228, le comte de Toulouse, Ka^mond VII, nég : ocia à Meaux avec Blanchb db Castille et Louis IX la paix qui devait être définitivement conclue à Paris l’année suivante. GnKGoinE IX donna alors pouvoir à son légal, le cardinal Romain de Saint-Ange de régler, à la conclusion du traité, les questions religieuses intéressant le Languedoc (Auvbay, liegistres de Grégoire I.V, n" 229-230, 232-23^).

Le cardinal Uomain avait une inlluence considérable sur Blanche de Castille auquel il avait rendu les plus grands services pendant les difficultés de la régence. Il n’eut donc aucune peine à obtenir d’elle une constitution, datée du 28 avril 1228, ordonnant l’exécution des décrets du Latran et de Vérone dans les anciennes terres du comté de Toulouse cédées à la France par le traité de Meaux Dans son article 2, elle portait condamnation contre les hérétiques reconnus tels par l’autorité religieuse, postquam fiieriril de hæresi per episcopum toci el pcr alinni ecclesinstiram personam qiiæ potestaiem liaheat, cundemnati (LACRiÈnE, Les ordonnances des rois de France de la troisième riice, I, p. 50).

Ce fut sous l’inlluence du cardinal légat que, par le traité de Meaux-Paris, Raymond VII s’engagea à réprimer l’hérésie dans les états qui lui restaient. Sur l’ordre de Romain, cardinal-diacre de Saint-Ange et légat du Saint-Siège, il promettait de combattre de toutes SOS forces les hérétiques, Parfaits et Croyants, leurs partisans et quiconque leur donnerait asile, et de les chasser de toutes sesterres.il ajoutait qu’il ne se contenterait pas de punir les hérétiques manifestes, mais qu’il ferait rechercher les autres, assurant une prime à ceux qui les lui signaleraient :

« Inquiret etiinn diligenter et inqurri faciet de inveniendis

luirreticis, credentihus, fautorihus et receptatoritms eorumdem » ; et pour cette recherche ou inquisition, il s’engageait à agir selon les règlements que ferait ultérieurement le cardinal légat, secundiim ordinationem quant super hoc fiiciel dominas tegatus, et à condamnerquiconqueauraitété déclaré hérétique

« per episcopum vei alium qui potesintem hnbeat », 

c’est-à-dire par la juridiction ordinaire de l’évêque et de ses délégués ou la juridiction extraordinaire du légat et de ses représentants. En un mot, Raymond VII ouvrait ses états aux inquisitions épiscopale et légatine, faisait serment de les seconder de toute manière, et en réservait l’organisation au cardinal Romain de Saint-Ange (Mansi, Concilia, XXIII, p. 163).

Cette réglementation de l’Inquisition, que prévoyait le traité de Paris, fut promulguée, en novembre 122g, par le cardinal légat, aueoncile de Toulouse. A cette assemblée prirent part Raymond VII et un grand nombre de seigneurs du Midi, le sénéchal royal de Carcassonne, deux consuls de Toulouse, les archevêques de Narbonne, de Bordeaux et d’Auch et beaucoup d’évêques et de prélats. On y décida une inquisition générale des hérétiques ; les archevêques et évéques devraient la faire faire, dans toutes les paroisses de leurs diocèses tant rurales qu’urbaines, par un prêtre ou deux ou trois laïques ou plus encore ; s’il le fallait, on devrait fouiller tontes les maisons, même les caves, domns singuliis et rameras suhterraiieas et toutes les cachettes possibles, scu quæcumque alia lalihula, et remettre aux Ordinaires, aux seigneurs et à leurs baillis les hérétiques, Parfaits ou Croyants, leurs adhérents et leurs hôtes, pour être immédiatement punis ; les abbés devaient faire les mêmes recherches dans les terres exemples de leurs monastères. Quant aux seigneurs, ils devaient battre les campagnes, les bois, les repaires souterrains. Le seigneur qui sciemment donnait asile

à des hérétiques devait être dépouillé de ses biens et remis au jugement de son suzerain, amittat in perpetuum terram et corpus suum sit in manu domini ad fuciendum inde quod dehebit. Le bailli négligent dans l’inquisition devait être révoqué et déclaré inhabile à jamais exercer les mêmes fonctions ; toute maison dans laquelle un hérétique aurait été trouve serait détruite. Enfin, l’inquisition devait être faite même par des juridictions étrangères, i’a quod hailivus régis in terra comitis Tolosuni et atiorum hoc facere possit et comes Tolosanus et alii in terra régis. Le règlement stipulait ensuite comment il fallait traiter les hérétiques qui se convertissaient de leur plein gré, ceux qui se convertissaient par crainte ou pour toute autre cause, enfin les malades suspects d’hérésie. Il déclarait incapables d’exercer des fonctions publiques les hérétiques, les Crojants et les suspects ; et étaient déclarés suspects non seulement ceux qui avaient pactisé avec les Cathares, mais encore ceux qui ne se confessaient ou ne communiaient pas au moins trois fois l’an, à Noél, à Pâques et à la Pentecôte (Mansi, XXIII, pp. igi-198). L’article 8 avait soin de stipuler que nul ne pouvait être condamné par le pouvoir civil comme hérétique avant d’avoir été déclaré tel par l’évêque ou un autre juge ecclésiastique qualifié, « ne innocentes pro iiorentilnis puniantur aut quibusiihet per aliqunrum catumniam hæretica prafitas impingatur ».

Cet acte, conséquence directe du traité de Meaux-Paris, établissait l’Inquisition dans tout le raidi de la France. A vrai dire, il ne présentait aucune disposition nouvelle et ses articles n’étaient que la répétition, plus précise peut-être, de décisions antérieures prises par les conciles et par les papes. Il n’organisait pas une inquisition perpétuelle, il se contentait d’en ordonner une, dans tout le Midi, au lendemain de la paix qui avait mis les hérétiques à la merci de l’Eglise. Il n’investissait pas de cette redoutable fonction des juges spécialement créés pour l’exercer ; il la confiait aux Ordinaires ou aux légats, eoniine l’avaient fait les règlements antérieurs. On ne peut donc pas dire, comme l’ont fait certains, que l’Inquisition a été créée au concile de Toulouse par le cardinal Romain. Elle était antérieure d’un demisiècle, si on entend par ce mot la recherche et la répression de l’hérésie par les soins des évéques, des légats et du pouvoir civil ; elle fut postérieure, si on ne donne ce nom d’inquisition qu’aux tribunaux de plus en plus fixes qui s’établirent, au cours du xiii’siècle, sous l’action prépondérante, mais non exclusive, des ordres mendiants.

Les règlements du cardinal de Saint-Ange furent confirmés et complétés, dans les années qui suivirent leur promulgation. Comme il s’y était engagé à l’avance, Raymond VII les accepta et leur donna force de loi dans ses terres, par un acte daté du 18 février 1232 (Mansi, Concilia. XXIII, pp. 265-268) qui, le plus souvent, répète mot à mot le règlement de 122g. Le pape GnicooiuK IX approuva sans réserve les actes du cardinal de Saint-Ange ; le 13 janvier i : z31, il félicita le comte de Toulouse du zèle avec lequel il les faisait observer (.rvBAY, liegistres de Grégoire J.Y, n" 17 19). Sa décision la plus importante fut celle par laquelle, le 20 avril I233, il donna commission au prieur pro incial des Dominicains de Provence (Provence-Languedoc ) de désigner des religieux qui feraient dans tout le midi de la France une prædicntio generalis contre l’hérésie. Cette bulle ne donnait pas aux Frères Prêcheurs le monopole de l’Imiuisition dans le Midi ; elle ne les chargeait pas même de collaborer à la recherche de l’hérésie, puisqu’il n’est question que de la prédication ; mais en leur confiant d’une manière plus spéciale « l’alTaire de la foi »,