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INITIATION CHRETIENNE

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vement. Mais si vous n’aiinidlez pas l’équivalence dans le ])reiuier cas, je ne puis comprendre ptnii-quoi vous l’adnulU’iezdans le second. Ou si vous aoulez : si le désir du liaptènie vaut la réalité, cl vous donne droit à la fjloire, à ce compte, le désir de la gloire vaudra pour vous autant que la fjloire même. Et que perdez-vous à manquer la ! , ’loire même, dès lors qne vous en avez le désir ? » Pour bien entendre cette argumentation, il faut avoir présente à l’esprit la disposition de certains auditeurs ([ui éprouvaient seulement des velléités de conversion et de baptême, n<j ; i ! ii désir elficace, et qu’il fallait décider à vouloir pour tout de bon. Dans un discours Contre les délais du haptéme, saint Grégoire db Nvsse fait ce récit, P. 0., XLVI, 4’- » 4 : « Lors de l’invasion des Scythes nomades qui causa tant de ravages et de morts, comme les barbares pillaient la banlieue de Comane, un jeune homme noble nommé Arcliias, angoissé par son propre malheur et ceux de sa patrie, sortit de la ville et s’en fut aux avant-postes pour se rendre un compte exact du nombre des pillards et de leurs opérations : il toudia au milieu des ennemis et fnt percé d’un trait. Gisant et sentant l’approche de la mort, il criait de toutes ses forces, — car il n’était que catéchumène — « Monts et forêts, baptisez-moi ;

« arbres, rochers, sources, donnez-moi la grâce I » 

Parmi ces cris lamentables, il expira. La nouvelle de son trépas causa dans la ville plus de douleur que la guerre même. « 

Cette page éloquente montre que l’évêque de Nysse était fort éloigné de penser, comme Tertullien, qu’on ne risque rien à dilTérer le baptême, et pressait les catéchumènes de le recevoir ; mais il serait excessif d’en conclure qu’il niait l’efficacité du baptême de désir.

11 était réservé aux Pères latins, surtout à saint Ambuoise et à saint Augustin, de dégager les virtualités latentes de la doctrine et de l’amener à une pleine clarté. A la mort de Valentinien 11 (né enZ-j, lils de Valentinien I", héritier de l’empire à l’âge de quatre ans, conjointement avec son frère aîné Gratien, puis seul, après la mort violente de ce dernier, assassiné lui-même en Sya), l’émotion de saint Ambroise se traduisit par un discours semblable à un long sanglot ; révéque montre dans les vertus du prince catéchumène et dans son désir du baptême, le gag- de sa justitication devant Uieu, De obilii Valenliniaiii, u-uii, P. /-., XVI, iS ; ^ B-1375 A.

Je TOUS entends déploi-er qu’il n’ait jjaa reçu le sacrement du biiptéme. Mais, dites-moi, qu’y a-t-il en notre pouvoir, sinon la volonté, sinon la demande.’Or il avait dès longtemps formé le désir d’être initié avant de venir en Italie ; il m’avait exprimé la volonté d’être incessamment baptisé par moi ; c’était même la principale cause pour laquelle il me manda pris de lui. Et il n’aurait pas la grâce qu’il a désirée ? qu’il a demandée ? Non, comme il l’a demandée, il la possède. Ne connaissez-vous pas cette parole ; « Le juste vint-il à être surpris par la moi-t, son Ame sera dans le repos, n

Accopdez-donc, Père saint, à votre serviteur, le don que Moïse vit en esprit et qu’il reçut ; que David connut par révélation et mérita. Accordez, dis-je, à votre serviteur Valentinien le don qu’il a souhaité ; le don qu il a demandé, dans la plénitude de sa force et de sa santé. Quand même la maladie l’eut contraint de différer, il ne serait pas tout à fait indigne de votre miséricorde ; ayant été prévenu par le temps, non frustré par sa volonté. Accordez donc à votre serviteur le don de la grâce qu’il n’a jamais refusée, lui qui, avant le jour de sa mort, refusa les privilèges des temples pai’ens, malgré la requête pressante d’hommes qu il pouvait hésiter à blesser. Les Gentils étaient là en foule, le Sénat à ses pieds : il n’a pas craint de déplaire aux hommes, pour plaire à vous seul, dans le Christ. Il eut votre Esprit : comment n’aurait-il pas reçu votre grâce.’Mais la céléhrution solennelle des mystères lui a manfjué ? . ce compte, les martyrs non plus ne seraient pas couronnés, s’ils n’étaient que catéchumènes : car la couronne suppose l’initiation chrétienne. Mais ces martvrs furent purifiés dans leur sang, lui fut purifié par ses l)ieux désirs.

La doctrine de saint Augustin est conforme à celle de saint Ambroise ; notamment De bapt. c. Donatistiis, IV, XXI, 28 ; XXII, 29, /-’. /., XLIII, 172-17’ !  ; s’appuyant sur l’exemple du bon larron, il ose alHi mer : non tanlum passionem pio Cliristi nomine id qtwd ex haptismo deerat posse siippJere, sed eliarn /idem conversionemque cordis, si forte ad celebrunduni niysteriiini boptisnti in angiisliis temporum succiirri non potest. Il faut se souvenir de ces paroles pour lonipcrer ce que présenteraient en apparence (l’inexorable d’autres paroles du même docteur, telles que. In loan., 7>. XIII, 7, P. /,., XXXV, 14gG : Qnantitmc unique cutechumenus pro/icint, adhuc sarcinani iniquitatis suite portât.

La doctrine des Pères latins après saint Augustin et celle des scolastiques procédant surtout de saint Ambroise et de saint Augustin, nous ne nous attarderons pas à recueillir de nouveaux témoignages sur le baptême de désir. Voir notamment saint Bernard, Ep. ad Ilugonem Viclorinuni, lxxvii, 8, P. /.., CLXXXII, io36 ; Hugues de Saint- Victor, De Sacramentis cltristianæ fidei, 1. II, p. vi, c. 7, P. /.., CLXXXVI, 453 BC ; Roland, Sentenliae, éd., Gietl, p. 209, 310 ; saint Thomas, p. III, q. 68, a. 2.

La doctrine du ba|>téme de désir a été consacrée par plusieurs décisions du magistère ecclésiastique.

Décrétale d’iNNOcisNT III : cas d’un Juif qui, en danger de mort, avait cru pouvoir se baptiser lui-même. Le pape répond qu’un tel baptême est nul et doit être réitéré. D’ailleurs le catéchumène, s’il était mort, eût été sauvé proptersacramenti /idem, etsi non propter /idei sacramentum. L. III, Decr., tit. XLii, c. 4-Décrétale d’iNNocKNT III : cas d’un prêtre dont le baptême avait été, après sa mort, reconnu invalide. Le pape répond qu’on ne doit pas avoir d’inquiétude pour le salut de son âme. L. III, Decr., tit. xLiii, c. 2. Concile de Trente, sess. vi, cap. 4. De iinti/icatione, Denz.. 796 (678), sur le passage à l’état de grâce : quæ quidem trunslatio post Erangeliuni pioniiilgatuni sine lavocro regeneratitmis aut eius voto /ieri non potest, sicut scriptum est, lo., iii, 5. — Cf. sess. VII, can. 4> De sacramentis, Denz., 847 (729) ; sess. XIV, cap. 4. l>e contritione (et attritione).

Propositions de Baius, condamnées par saint Pik V, r’oct. 1667 : 31 (Denz., io31 ij) : Caritas perfecta el sincera, quæ est de corde puro et conscientia bona et fide non /icta (I Tim., i, 5), tant in cutechumenis quant in pænitentibus potest esse sine rentissione peccatorum.

33. (Denz., io33 [913|) : Catechtimenus iuste, recle et sancte vivit el mandata Dei obsertat ac legem implet per caritafein, ante obtentam remissionem peccatorum, quæ in baptismi lavocro demum percipilur.

En finissant, nous indiquerons très brièvement la dilTérence qui paraît exister, quant à l’efficacité, entre le baptême de sang et le baptême de désir.

A comparer ces deux suppléances de notre baptême d’eau, il paraît incontestable que, selon la pensée des Pères, la première l’emporte sur la seconde, non seulement par la gloire inhérente à une confession sanglante, mais aussi par une vertu qui lui est propre, en vue de la rémission des péchés.

D’où vient au baptême de sang cette vertu singulière, qui en a fait comme le succédané — le principal succédané — du baptême d’eau ? Les textes scripturaires que nous avons cités plus haut insistent