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INITIATION CHRETIENNE

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passage au montanisme, et tout le cliangement survenu dans son esprit, pour lui faire méconnaître sur ce point le dogme de la communion des saints. Encore ne cessa-t-il pas d’appeler le martyre : aliud baptisma (De piidicitia, xxii).

Dès lors, l’idée d’une vertu rémissive de tous les péchés, inhérente à l’acte du martyre, se traduisait même dans la législation de l’Kglise. Les Canons d’IJippulyle, rédigés sans doute à une époque postérieure, mais rellétant des institutions très primitives, en font foi. Le i oi"^ affirme le droit du catéchumène martyr à reposer avec les autres martyrs. Catec/iiimenus qui captiis et ad martyriiim perdiictiis necatusque est prius quant haptismuni reciperet, cum ceteris inartyrihus sepeliatur est enini haptizatus propiio sanguine.

OniGiiNK enfant avait animé au martyre son père Léonide, durant la persécution de Seplinie Sévère ; vieillard, il devait livrer ses membres aux bourreaux durant la persécution deDèce. Nous avons de lui une Exhortation au martyre, écrite pour affermir le courage de son ami Ambroise et du prêtre Protoctètos, durant la persécution de Maximin. Sa grande âme repousse toute compromission avec l’idolâtrie ; pour en détourner ses amis, il ne voit rien de mieux à leur représenter que l’cniinente vertvi du martyre (Ad niartyrium exiwrtatio. passini. notamment xxx ; xxxix). Considérant que la mort endurée pour le Christ coupe court à toutes les occasions de péché, il va jusqu’à dire (In ludic.. Hum., viii, 2, /’. 6’., XII, 980) que, si le baptême d’eau elTace les péchés passés, le baplèuu’de sang supprime même les péchés à venir.

Saint Cyprikn, mis en demeure de s’expliquer sur le cas des catéchumènes martjrisés avant le baptême, répond que leur salut ne saurait être mis en doute, et donne même à ce baptême de sang le nom de sacrement. Ep. Lxxni, 22, Ad luhaianum. éd. Hartel, p. 7gî, 16-796, 3 : Quidam, quasi evacuare possint liumnna argumentittione prædicationis eyangelicae veritatem. catecuminos nobis opponunt, si quis, antequam in Ecclesia haptizetur, in confessione nominis adprehensus fuerit et occisus, an spem salutis et præmium confexsionis amitlat, eo quod ex aqiia prius non sit reniitus. Sciant igilur eiusmodi liomines suffragatores et fautores hæreticorum catecuminos illos primo intégrant fdem et licclesiæ veritatem tenere et ad debellandum diabolum de divinis castris cum ptena et siucera Dei Patris et Christi et Spiritus sanvti cognitione procedere, deinde nec privari baptismi sacrameiito, utpote qui baptizentur gloriosissimo et maximo sanguinis baplismo. de quo et Dominas dicebat habere se aliud baptisma baptizari. .. Dans le même temps, un adversaire de saint Cyprien sur la question baptismale, l’auteur anonyme du traité De rebaptismate. reconnaissait (c. ii, XIV, XV, xviii) un seul baptême chrétien sous trois formes : le baptême d’eau, le baptême de sang et le baptême de l’Esprit. N’ul ne doit, par sa propre autorité, s’exempter du baptême d’eau ; mais, de fait, tous les trois baptêmes peuvent également donner le Saint-Esprit. Le même auteur voit tine figure du baptême d’eau et du baptême de sang dans les deux flots qui jaillirent du côté ouvert de Jésus. Il voit la distinction des trois formes de baptême insinuée par le verset de saint Jean (I lo, v, 8) sur les trois témoins terrestres : l’Esprit, l’Eau et le Sang. — Donc les deux écoles alors si profondément divisées sur la question duBAi’TiiMF dbs iii’ : ri’ : tiqi"es (voir ce mot) demeuraient unies sur la réalité du baptême de sang.

ous avons atteint le milieu du 111° siècle : désormais les témoignages abondent tellement qu’il devient superflu de les recueillir. L’eflicacité du

baptême de sang est un lieu commun des catéchèses baptismales au iv’siècle. Citons saint Cyrille de Jkblsale.m, Catech. iii, lo, P. G., XXXIII, 440 BC ; XIII, 21, ib. 800 A ; saint GuiiGoinE de Nazianze, Or. xxxix, 17, In sancta lumina, P. G., XXXVI, 353 G-350A ; saint Jean Chhysostome, In S. Lucianum martyrem Homil., 2, /’. G., L, , "122 ; /n Maccabæos Honni., II, 2, P. G., L, 626 ; les Constitutions apostoliques, V, VI, 8, éd. Fuiik, p. 249. Saint Augustin aflirme expressément le privilège du baptême de sang. De civitate Dei, XIU, vii, P. /,., XLI, 381 ; il ne veut lias qu’on fasse au martyr l’injure de prier pour lui, Sermo CLix, 1, P. 1… XXXVIIl’, 868. Il éclaire la doctrine en spécifiant que ce qui fait le martyr, ce n’est pas la grandeur des tourments, mais la sainteté de la cause pour laquelle il meurt : Martyres non facii poena, sed causa. Voir Enarratio in Ps. xxxiv, serin. 11, 13, /’. /.., XXXVI, 340 ; Ep., II, cviii, 5, il, , P. /.., XXXIII, 413.

2) Raptème de désir. — Le baptême de désir peut se définir : un acte de charité parfaite, renfermant le vœu, au moins implicite, du baptême chrétien. Sous une forme aussi précise, la notion du ba]ilème de désir a|)partient à un stade assez avancé de la théologie. N’ayant ici en vue que les origines, nous nous contenterons de montrer : i" comment le germe d’une telle doctrine est contenu dans l’Ecriture ; 2" comment elle se dégage peu à peu à l’épotpie patrlstique.

I" Pour se convaincre que la doctrine du lia]itênie de désir est en germe dans l’Ecriture, il ne faut que considérer les textes suivants :

Prov., VIII, 17 : « Ceux qui m’aiment, je les aime, n

— Le., X, 26-28 : « Un docteur de la Loi interrogea Jésus : Maître, que dois-je faire pour posséder l’héritage de la vie éternelle ? Jésus lui répondit : Qu’est-ce qui est écrit dans la Loi ? Qu’y lisez-vous ? Cet homme répondit : Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, de toute votre àrae, de toutes vos forces et de tout votre esprit, et votre prochain comme vous-même. Jésus lui dit : Bien répondu. Faites cela et vous vivrez. » — lo., xiv, 21-23 : « Celui qui a mes commandements et les garde, voilà celui qui m’aime. Celui qui m’aime sera aimé de mon Père, cl je l’aimerai et me manifesterai à lui… Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui et ferons en lui notre demeure. » — I fo., IV, 7 : (I L’amour vient de Dieu ; quiconque aime, est enfant de Dieu et connaît Dieu. »

De ces textes, il ressortévidemmenl que, si la grâce divine illumine une âme. la touche et l’attire au service de Dieu, si cette âme se livre tout entière à l’attrait de la grâce et tend vers Dieu de toutes ses forces, l’amitié divine est fondée ; le règne de la charité existe dans l’âme ; la société de grâce entre Dieu etriiommeest réalisée, avantmême tpie le ritebaptismal y mette le sceau. Ce rite n’en demeure pas moins obligatoire, et l’âme déchoirait de l’amitié divine qui. par sa faute, se détournerait de raccomplissement de ce rite exigé par Dieu. Mais, en fait, l’état de grâce aura prévenu le sacrement, tout comme il le prévint dans le cas du centurion Corneille et des siens, remplis du Saint-Espritavant l’heure où Pierre leur lit conférer le baptême d’eau. C’est là réellement un baptême de l’Esprit, selon l’expression employée plusieurs fois dans l’Ecriture,.1//., iii, 11 ;.Me, i, 8 ; /.c, iii, 16 ; /o., i, 33 ; Act.^ i, 5 ; xi, 16. Il n’est pas, dans l’ordre du salut, de plus diligent ouTier que l’amour.

2* Partant de cette donnée, les Pères devaient amener à maturité la doctrine d’une justification extrasacramentelle. Ils comprirent que la seule privation du rite baptismal ne pouvait être, pour l’àræ éclairée