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INITIATION CHRETIENNE

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l’une étant la préparation tlu cœur, l’autre étant la coUution (lu Jon divin. La i)énilenc-e opère la conversion intérieure, sans laquelle il n’y a pas, pour les advlte^^i tic justilication ; le baptême y niel le sceau. Toute riiistoire primitive de l’évangélisation montre l’application de celle loi.

Act.j II, 37-41. — Trois mille hommes, coiïvcrtia par la première prédication de S. Pierre, reçoivent le haptèrae.

Ad., viii, 12-16. — Les Samaritains, convertis par la prédicatiou de Philippe, sont baptisés au nom du Seigneur Jésus.

.Ic^, VIII, 32-38. — L’eunuque de la reine d’Ethiopie, converti sur le chemin par Philippe, reçoit le baptême.

Act., IX, 10-18. — Saul, converti sur le chemin, est baptisé îi Camus.

Acl^ X, 44-48 ; xi, 16. — Corneille et les siens, déjà remplis du Saint-Esprit, sont baptisés par l’ordre de S. Pierre.

A<-t., XVI, 12-15. — Lydie, marchande de pour[)re, ayant entendu la prédication de Paul à Phiiippes, se fuit baptiser avec les siens.

Act., xviii, 24-xix, 5. — A Ephèse, ceux qui n’avaient l’eçu f|ue le baptême de Jean, pleinement instruits par Paul, sont baptisés au nom du Seigneur Jésus.

Act, XXII. —. Jérusalem, Paul raconte sa conversion, scellée par le baptême.

Rom., VI, 1 sqq. — Les fidèles doivent se considérer comme morts par le baptême et ensevelis avec le Christ, pour ressusciter avec lui à une vie nouvelle.

1 Cor.^ I, 11-17. — La plus parfaite harmonie doit régner entre les fidèles, tous baptisés au nom du même Christ.

I Cor., XII, 13. — Tous ont été baptisés en un même corp « , abreuvés d’un même Esprit.

Gal., III, 27. — Tous ont revêtu le Christ.

Eph, , IV, 5. — Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême.

I Pet., III, 21 sqq. — Le baptisé a engagé sa conscience à Dieu : il marche désormais dans la foi de la résurrection.

Convertir d’aliord, et puis baptiser, telle était l’économie de la prédication apostolique, tel était le préce [)te du Seigneur. Vouloir rendre compte, en dehors de l’tiypotlicse d’un précepte du Seigneur, de cette tacli(iæ constante des Apôtres, dès le début de leur |)rédication, c’est supposer un effet sans cause ; c’est déserter l’explication naturelle des faits pour se lancer dans les constructions arbitraires.

On a pourtant essayé de telles constructions, et Ion a prétendu tout rattacher à l’initiative personnelle des.pùtres. Pour rendre cette explication plausible, on a invoqué divers précédents ; les ablutions juives, depuis celles prescrites dans la loi de Moïse jusqu’au baptême des prosélytes ; enfin et surtout le baptême de Jean. Mais on se convaincra de l’échec de pareilles explications, si l’on considère la différence que les écrits du Nouveau Testament mettent entre les ablutions juives, ou même le baptême de Jean, et le baptême de Jésus.

Les ablutions rituelles de la loi mosaïque conféraient aux enfants d’Israël une pureté légale, extérieure, en vue de certains actes de la vie Juive ; elles ne conféraient pas ce renouveau intérieur de la grâce qui rend agréable à Dieu. Le déclin de l’esprit religieu. v en Israël avait peu à peu réduit, pour un grand nombre, le culte à ces observances de surface, et l’on sait que le Seigneur ne ménage pas sur ce point les . Pharisiens ÇVl., xxiii, 25) : « Malheur à vous. Scribes et Pharisiens hypocrites, parce que vous i)uriCez le dehors du calice et du plat, mais au dedans vous êtes pleins de rapine et de désordre. » Ces leçons n’étaient pas pour inspirer aux disciples un bien grand respect d’observances désormais caduques, et pour leur suggérer l’idée de lier à une ablution semblable l’ipuvre de pureté morale dont ils devenaient les hérauts et les ministres.

De fait, les premiers Pères ne nous montrent pas.

tant s’en faut, l’Eglise occupée de copier la Synagogue. Comme échantillon de l’esprit régnant parmi les fidèles, nous citerons un de ces textes vénérables rendus de nos jours à la lumière par les tables d’Egypte : fragment d’évangile apocryphe ou homélie primitive, ce texte, que de bons juges rapportent au 111= siècle de notre ère, fut édité en 1907 au tome V des papyrus d’Oxyrrynclios, n. 480 :

« … Ayant pris avec lui ses disciples, Jésus les introduisit

dans le litxu des purifications, et se promenait dans le temple. Survint un pharisien, prince des prêtres, nommé Lévi, qui les aborda et dit au Sauveur : Qui t’a permis de fouler le sol du lieu des purifications et de voir ces objets sacrés, sans avoir pris un bain et sans que les disciples se soient lavé les pieds ? Souillé, tu as foulé le sol de ce temple, qui est un lieu pur, qu’il n’est pas permis de fouler sans avoir pris un bain et changé de éléments ; tu as osé voir ces objets saciés. Le Seigneur, s’arrèlant soudain avec ses disciples, répondit à cet homme : Et toi qui es ici dans le temple, tu es pur ? Le pharisien répondit : Je suis pur, car je me suis baigné dans la piscine de David ; je suis descendu par l’un des escaliers et suis remonté par l’autre ; j’ai revêtu des vêlements blancs et purs ; « près quoi je suis venu et j’ai regardé ces objets sacrés. Le Sauveur lui répondit ; Malheur à vous, aveugles qui ne voyez pas ! Tu t’es lavé dans ces eaux qui s’épanchent, où les chiens et les pourceaux se vautrent nuit et jour ; après l’être lavé, lu as frotté ta peau comme les prostituées et les joueuses de flûtes qui se parfument d’huile, se frottent et s’embellissent pour flatter la passion des hommes ; cependant intérieurement elles sont pleines de scorpions et de toute B(trte de malice. Pour moi et mes disciples, à qui tu reproches de ne s’être pas baignés, nous nous sommes baignés dans l’eau vive… »

On reconnaît immédiatement l’accent d’une morale plus profonde que celle du pharisa’isme. Ce texte, sûrement très ancien, nous représente sous une forme saisissante l’antithèse de l’idéal chrétien et de l’idéal juif ; il donne clairement à entendre ce que le Maître avait inculqué souvent et ce qui se reflète dans l’enseignement des disciples. Des hommes pénétrés d’un tel esprit n’auraient pas songé d’eux-mêmes et si vile à faire d’un bain rituel le signe officiel et nécessaire d’adhésion à la doctrine de Jésus. En regard des documents chrétiens primitifs, on peut consulter, non seulement les anciers rabbins, mais la Jettislt Encyclopedia, publiée de nos jours à New-York ; on y lira, à l’article Ablutions, t. I, p. 6g B, que l’ablution fait partie d’un système de purifications usité de tout temps et en tout pays en vue de la sainteté et de la communion avec Dieu ; et l’on verra que cela doit s’entendre avant tout au sens corporel : purification des souillures anciennes et préparation aux rites principaux de la religion. Après vingt siècles, le concept est resté le même. Voir encore ibid., t. IV, art. L nclean, Uncleanness.

quant au baptême des prosélytes, si tant est qu’il fut dès lors en usage, ce qu’il est assurément plus facile de croire que de démontrer, on peut affirmer qu’il ne tenait pas une bien grande place dans les préoccupations communes ni dans la pratique de la religion populaire, au temps de Notre-Seigneur. Ce bain rituel, qu’Israël exigea au moins quelquefois des prosélytes venant à lui de la gentililé, n’est pas mentionné dans l’Ancien Testament ; il ne l’est pas davantage dans le Nouveau. Il n’a pas laissé de trace chez les écrivains juifs du i"^ siècle, tels que Philon et JosÈPHE, ni chez les premiers écrivains chrétiens les mieux instruits des choses juives, tels que le Psbudo-Barnabé et saint Justin. Il faut descendre assez bas dans la littérature de notre ère pour le trouver mentionné incidemment. Un vers des Oracles sibyllins IV, 164) paraît le viser :