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INEKRANCE BIBLIQUE

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que l’Ecclésiastique, XLvi, 23, en écrivant du prophète Samuel : et exaltavil locf m sitam de terra in prophetia (allusion à la scène d’Endor, 1 Heg., xxviii, 16), a pu ^’exprimer de la sorte d’après l’opinion que Saûl et les personnes présentes se faisaient de l’évocation de l’ombre du prophète.

On peut reconnaître tout cela sans accorder pour autant qu’au sentiment de S. Jérôme Yopiniun est la loi souveraine de l’histoire. Dans tous les cas envisagés par le saintDocteur.ce qui relève de l’opinion, ce n’est pas le fait lui-même, mais sa nature intiuie, sa cause, son explication, (jiie l’on ait appelé Hananias prophète, qu’Hcrode ait manifesté de la tristesse, que les contemporains de Jcsirs-Christ l’aient cru et dit lils de Joseph, que Saiil ait pensé entendre la voix de Samuel : tels sont les faits attestés par le récit de l’Ecriture, et qui certes n’y sont pas donnés comme reposant sur de simples on-dit. Mais s’il s’ajfit de savoir dans quelle mesure ces manières de parler et de juifer reposaient sur une interprétation exacte des faits, l’hagiographe se tient alors à l’opinion courante. Par ce coté, certains événements se rapprochent des phénomènes de la nature. Encore est-il que dans deux des cas énumérés ci dessus (les seuls incontestables), l’hagiographe donne nettement à entendre que l’opinion populaire n’était pas conforme à la réalité des choses. Tout au plus, pourrait-on dire que certains documents historiques, les généalogies par exemple, ne sont pas d’ordinaire susceptibles d’une vérité plus grande que celle qu’ils ont in e.ristimiilione Imminam. Une généalogie atteste que, si les choses se sont passées normalement, X a engendré Y. Si les documents généalogiques qui figurent dans la Bible peuvent prétendre à plus d’exactituile, ce n’est pas au nom des exigences de l’histoire.

c) L’encyclique ProvidentissimusDbus. — La théorie du P. CoHNBLY se trouve assez bien résumée dans rencycli<|ue, Dknz.’", igig, où il est dit : « Hæc ipsa deinde ad cognatas disciplinas, ad hifitoriani jiritesertim. juvahit Iransferri. » Gettesimple [jlirase, jetée comme en passant et à la dérobée, est chargée de conséquences, puisque les principes en question, dont il est dit o qu’on pourra lesappliqueraux sciences voisines et notamment à l’histoire », sont ceuxlà mêmes que nous venons d’exposer pour les sciences naturelles. La querelle qui s’est engagée sur le sens du document pontilical, n’est pas une pure alfaire de mots : il y a au fond de la question un problème d’intérêt général ; maison doit convenir qu’il est très complexe, encore imparfaitement élucidé. Il semble bien que la portée du passage a été exagérée en sens contraires. Au demeurant, ledissentiment ne saurait guère porter que sur les applications, puisque tout le monde convient qu’il ne s’agit pas d’apprécier le récit historiiiuc et la description des phénomènes de la nature d’après une commune mesure, mais seulement mutatis muiandis.

^"Procédés pratiques pour résoudre les difficultés d’ordre historique. — Ces procédés ne sont que des applications des principes développés dans la première partie de cet article (col. 767), et notamment de ce qui a été dit à propos de V « assertion » de l’auteur inspiré et de l’a expression » qu’il lui donne d’ai)rès les divers <i genres littéraires ».

a) C’est surtout dans les textes historiques que l’on doit commencer par se demander si l’original n’a pas été altéré. Il est certain que la transmission des textes s’est faite dans des conditions défectueuses. Tous les livres canoniques offrent dans leur teneur jtrésente des altérations. Les noms propres et les chiffres ont iiarticulièrement soulfert. U est

trop clair que Saiil ne monta pas sur le trône à l’âge d’un an et qu’il a régné plus de deux ans, en dépit de la leçon actuelle de I lieg., xiii, 1. Voir Textes DB l’Ancie.n et uu Nouveau Testa.ment. Cependant, il ne faut pas recourir à l’hypothèse d’une altération sans raison positive et uniquement i)Our sortir d’embarras ; car la solution serait, dans ce cas, pire que la dilliculté, elle ferait planer le doute sur tout le texte des Ecritures. Cf. L’autorité de la Bible en matière d’histoire dans la « Revue du clergé français ii, I déc. 1902, p. 26-27.

h) Avant de prétendre et surtout d’accorder qu’il y a incompatibilité entre les données d’un auteur profane et celles de la Bible, on s’assurera du sens exact et de la portée des deux textes affrontés. La précipitation a été cause qu’on a soulevé beaucoup de dillicultés sans fondement solide dans les textes eux-mêmes. L’Exode xv, nj, ne nous oblige pas d’admettre que le Pharaon oppresseur a été personnellement enseveli dans les eaux de la mer Rouge (voir Egypte, col. 1310). L’auteur dusecond livre des MacchabéeSj VIII, 16, ne se prononce pas sur l’exactitude de tout ce que iyidas a^ait entendu dire des Romains, en particulier u qu’ils obéissaient tous à un magistrat uni(pie, sans rivalitésni intrigues ». On devrait avoir sans cesse devant les yeux la règle d’or de S. Augustin, reproduite dans l’encyclique l’rovid, JJeus : « Ne aliquid temere et incognitum pro cognito asserant… Nihil temere esse affirinandum, sed caute oninia modesteque tractanda. » Dans le cas d’une contradiction irréductible, le croyant prendra le parti de la Bible ; à moins qu’il ne préfère attendre de l’avenir la solution de la dilliculté. L’histoire des découTcrtes modernes nous apprend que des objections réputées insolubles il y a cent ans, et hautement invoquées contre l’autorité du texte sacré, ont fini par tourner à sa justification. Demain, peut-être, quelque document nouveau permettra d’accorder l’auteur des Actes, V, 36-87 et l’historien Josèphe sur la question des soulèvements provoqués par Theudas et Judas le Galiléen. Mais, mettons les choses au pire en supposant que les deux récits sont réellement incompatibles, pourquoi l’autorité de Josèphe l’emporterait-elle sur l’autorité de S. Luc ? Voir Cbitiqub biulujob, col. 81 3.

c) U arrive fréquemment que deux récifs sont contradictoires seulement en apparence. C’est qu’en dépit des circonstances semblables qu’ils présentent, en grand nombre peut-être, ils n’ont i)as un même objet. La plupart des apologistes pensent que S. Jean, 11, 15, raconte un fait dilTérent de celui qui se litdans les évangiles synoptiques ; J.-C. aurait chassé les vendeurs du temple deux fois ou même davantage. On n’a pas prouvé ((u’ils aient tort.

d) Il peut se faire que deux récits se complètent. Dans ce cas, les circonstances différent mais ne divergent pas. C’est de la sorte que S. Matthieu et S. Luc ont i)u raconter l’enfance de N.-S. sans se rencontrer sur beaucoup de points. Leurs différences s’expliquent par les conditions diverses dans lesquelles se sont formées les traditions dont ils dépendent. D’autres fois, les diversités de deux récils résultent de procédés rédactionnels, et c’est par voie d’équivalence qu’on les ramènera à l’unité. De ce que dans S. Matthieu, xxvi, 8, tous les disciples indignés dcmandeniutquid perdilio liæc ? aorii ({ie dans S. Jean, XII, 4-5, la plainte est formulée par l’Iscariote seul, il ne s’ensuit pas que les textes aient trait à deux événements distincts.

e) Un même fait peut prendre des aspects assez différents selon qu’il est raconté en prose ou dinnté poétiquement. Il suffit, pour s’en convaincre, de comparer le récit des livres historiques avec certains