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INDULGENCES

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ŒB, art. Indulgenzen, dans Realencykl. f. protest. TheuL, IX, p. 85-86). Des documents conciliaires eux-mêmes constatent qu’on appelle de ce nom une certaine catégorie d’inJulyences : « (jitæ diciintiir de poena et ciilpa » (Conc. Const., xliii, i^, Mansi, XX Vil, Il 84), et le besoin même qu’éprouvent les théologiens, les canonistes, les prédicateurs, les commissaires d’indulgences, d’en expliquer et d’en rectifier le sens est une preuve de son emploi fréquent.

Quel sens donc lui donnait-on ?

B) Le sens de la formule. — A vouloir répondre d’un seul mol, on pourrait dire qu’elle sert à désigner l’indulgence plénière du jubilé et de la croisade. Telle fut du moins sa signification primitive. Parce que les croisés obtiennent d’être absous d’abord, et par tout confesseur de leur choix, de tous leurs péchés, même des réservés au pape, et que rémission ou indulgence leur est faite en outre de toutes les peines temporelles dues aux péchés pardonnes, l’habitude se prend, pour abréger, de grouper sous un même vocable ces deux faveurs d’ordre si difl’ércnt ; mais tandis que les prédicateurs les attribuent, il’un trait, à la participation à la croisade, les fidèles, eux, détournant les mots de leur signification logique, appliquent à la seule rémission de la peine l’appellation d’indulgence de la coulpe et de la peine {ita N. Paulus dans son art. : Die Anfiinge des sogenannten Ablasses von Schuld und Strafe, dans Zeitschr. f. hath. Theol., XXXVlCigis), p. 67-96). Et c’est ainsi que cette expression, devenue sjnonyme d’indulgence plénière, se trouva, quand le jubilé fut institué (1300), excellemment propre à le designer.

La transposition d’ailleurs se fil d’elle-même. D’une part, et conformément au langage traditionnel de l’Eglise, le mot péché s’applique à la peine qui en est la suite, non moins qu’à la coulpe qui le constitue, et c’est pourquoi « remissio peccati » peut se dire indifféremment ou simultanément de la rémission de l’une et de l’autre (Beringer-Mazover. up. cit., p. 12-13) ; dès le début, les bulles d’indulgence l’entendent ainsi : la remise de la peine n’est indiquée que par l’adjonction au mot a remissio » des mots ^i plena, plenior, plenissima » (t’. gr. Bonifacb VIII, dans sa bulle d’indiction du premier jubilé : Exlraw Comm., , g, 1). Nicolas Wkigel, au xV siècle, notait très exactement contre Jean IIus la ressemblance et la différence de ces expressions : a Errât, quod non ponit differentiam inler absolutionem ah omnibus peccatis ri inler plenarn vel plenariam remissionem. Qaia ad solam contricionem et confessionem actii vel voto susreptam liabeturremissio omnium peccaloriim, nuantumcumque grai’ia fuerunt, sed non semper ad hoc hahetur plena etiani remissio peccatorum. Quia hoc etiam inctudit remissionem pêne pro peccato débite » (N. Paulus, Zeilsckr. f. kath. Theol., XXIII

(’899), p. 749’noie’)

D’autre part, la croisade et le jubilé sont encore à cette époque les deux grandes, les deux seules occasions qui existent de gagner une indulgence plénière. De l’une à l’autre, la similitude est réelle et voulue : la réserve des péchés en particulier y est également suspendue ou mitigée ; dans les deux cas, toute facilité est accordée pour se procurer l’absolution de la cou// ; 9, qui permettra d’obtenir la rémission totale de la peine. II n’est donc pas étrange que celle-ci soit caractérisée d’un mol qui rappelle la faveur préliminaire qui l’accompagne : /’/ « (/ « /^ence delà coulpe et de ta peine est l’indulgence totale ou plénière qui s’oblienl en même temps que se peut obtenir plus facilement la rémission de la faute proprement dite, c’est-à-dire à l’occasion de la croisade ou du jubilé.

Ainsi la trouve-t-on communément définie par les canonistes du xiv* et du xv" siècle : « Ista est illa plenissima peccatorum remissio que concediturcruce signatis pro subsidio ultramariiio…, que datur etiam in anno centenario » (Jean Andréa, cité par Paulvs dans Zeitschr. f. kath. Theol., XXV (1901), p. 3^2). a Ista plena remissio peccatorum, dit Jean d’Anagni (j- ili’j’j) en parlant de la rémission totale du jubilé, i’ulgariter dicitur a culpw et a pena » (ibid.).

Indulgence plénière et indulgence de la coulpe et de la peine sont donc deux expressions primitivement synonymes ( « Ubi fit plenissima remissio omnium peccatorum, intelligitur facta a poena et a culpa ;.., et si, quando conceditur plenissima remissio, adjicitur n a poena et a culpa », videtur adjecla in superabundanlem caulelam ». Jean u’I.mola (-J- 1436), cité par Briegeh, art. cité, p. 86, 1. 8-10). Mais leur synonymie disparut à mesure que se répandit l’usage des indulgences plénières distinctes de celle de la croisade et du jubilé. La seconde seule conserva sa signification historique. Elle continua à designer l’indulgence plénière dont la concession s’accompagnait de la faculté de se choisir un confesseur à son gré pour l’absolution préliminaire de la faute : ce qui était le cas, non plus seulement au moment de la croisade ou aux époques du jubilé, mais aussi toutes les fois que les papes ou les conciles jugeaient à propos d’accorder la même faveur. Pour permellre aux fidèles de gagner plus facilement l’indulgence proposée, on accorde à des confesseurs spéciaux ou l’on étend à un plus grand nombre de confesseurs ordinaires le pouvoir d’absoudre des cas réservés. El c’est pour ce motif que l’indulgence accordée dans ces conditions continue à porter le nom d’indulgence de la coulpe et de la peine.

Une particularité d’ailleurs contribue à justifier et à propager celle appellation. Pour la comprendre, il importe de distinguer les deux manières dont peut s’accorder une indulgence. L’une ne comporte pas d’intermédiaire entre le pape et le concessionnaire : celui-ci « gagne » l’indulgence de lui-même, par cela seul qu’il remplit en temps voulu les conditions requises. C’est la manière la i)lus commune, au moins de nos jours. L’autre exige, en plus de l’accomplisserænl des œuvres prescriles, qu’un prêtre intervienne pour « api)liquer >i l’indulgence : c’est ainsi par exemi)le qu’aujourd’hui encore les membres du tiers ordre de saint François se font « appli(]uer » par leur confesseur, après l’absolution sacramentelle, l’indulgence qui leur est accordée à certains jours de fêle ; ainsi encore que les prêtres en ayant le pouvoir appliquent une indulgence plénière aux malades en danger de mort. Dans les deux cas, l’application sefait par une formule d’absolution.

Or, telle était aussi primitivement la manière dont se gagnait l’indulgence du jubilé : l’application en était faite par le confesseur qui donnait l’absolution. La formule usitée alors réunissait, tout en les distinguant, les deux rémissions : « Auciontate apostulica mihi in hac parie concessa te ab cmnihus i-kccatis TUis, ore confessis et corde contritis, … ahsoltimus et l’i.iiNABiAM TuouuM PECCATORUM remissiouem i/idulgemus » (cité par Buiegbr, art. cité, p. 89), « AhsnWo te ab omni sententiu excommunicationis etc. ; et absolvo le ab o.mnibus bt quibuscumc^uk pbccatis, culpis et negtigenciis mortalibus et venialibus, de quibus corde contrilus es et ore confessas et de quibus confilcreris, si Ubi ad memoriam fenircnl, et

REJIITTO O.MNEJI l’ENAM l’RO EIS nUIUTAM AO II.LAM n.K NARIAM HEMissioNEM libi impercior quam Ecclesia concedere sillet omnibus liomam lempore jiibilei tel crucesignalis ad recuperacionem terre snncle lempore passagii generalis euntibus » (cité par N. Paulus.