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INDULGENCES

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installé dans la chose puMi(|UP et agissant comme un dissolvant sur les niivurs aussi bien que sur les institutions. C’est i)ourlanl là ce qu’on appelle le progrès, et il est (lillicile d’en signaler une autre manifestation qui ait des racines aussi profondes ni qui porte aussi complètement la marque de l’individualisme.

La société familiale n’est pas moins menacée de dissolution que la société religieuse par l’individualisme. La première emprise s’exerce contre l’indissolubilité du mariage : le pauvre individu, voué à vivre dans les cliaines ou, s’il les secoue, dans l’iso-Icuient, trouva une littérature complaisante à l’excès jusqu’au jour où elle eut dicté la loi et y eut fait inscrire la légitimité du divorce, en attendant l’union libre.

La coutume successorale, qui devait protéger la pérennilé de la famille, commença à subir les atteintes de l’individualisme par le partage forcé dans un esprit égalitaire. Celui-ci, imposant tout d’abord sa loi entre frères, tend à se généraliser par mille formes de conGscation partielle exercée sur la fortune acquise, telle que l’exagération des droits de mutation, les impôts somptuaires ou progressifs, tout en un mot ce qui tend à faire disparaître les patrimoines.

La diuiinution du nombre des mariages et surtout de celui des enfants est également l’œuvre de l’individualisme, qui fuit les charges delà fauiille comme aillant d’entraves au libre développement de l’individu. Sans doute la stérilité n’accompagne pas toujours ni partout l’individualisme, mais elle le fait le plus sotivent.

Eutin le féminisme est une autre de ses manifestations. Qu’on en suive les adeptes aussi bien que les tlu-oriciens, leur langage emprunte tous ses raisonnements à l’individualisme, et porte tous ses effets contre la famille. C’est une doctrine absurde, délétère, impie, et dont on ne peut méconnaître la source, tant elle en découle facilement. Elle n’a heureusement pas encore gagné les masses.

On n’en saurait dire autant dans le domaine de la société civile, si l’on comprend souscette désignation l’ensemble des rapports sociaux gouvernés par les codificationsiégales. L’individualisme } apparaît uniquement, et ne perd pas son droit même dans les associations, car elles ne se forment qu’en vue de l’intérêt individuel de leurs membres et ne sont pas d’un esprit différent. C’est le règne du chacun pour soi dans tous les domaines de l’activité humaine.

Pour ne prendre de ceux-ci que les plus constants, les rapports entre les délenteurs du capital et les masses prolétarisées ne sont pas l’effet d’un consentement, d’une entente mutuelle, mais uniquement de ^ la force qui oscille entre les uns et les autres, chacun s’exerçant à la conquérir pour peser sur l’autre. Dans la plupart des professions, les syndicats ne sont pas autre chose que des organisations de combat.

Les marchés commerciaux suivent la même loi, la loi du plus fort : la notion du juste prix n’existe plus, et celle de la loyauté commerciale est fort ébranlée, parce que l’individualisme ne met jamais en présence que des individus i|ui ont un égal droit à la vie et sont censésètre dans une égale conditionquant aux moyens de se la procurer. Enlin le crédit ne se prête pas à qui olfre le plus de garanties, mais se vend ou se loue par des procédés usuraire*, dont la miiltitude pàtit au profil d’un petit nombre, « qui impose ainsi un joug presque servile à l’infinie multitude des prolétaires » (Lettre encyclique de S. S. Léon XIII xiir la condition des ouvriers).

On qualifie communément cet étal de choses de retour vers la barbarie ; mais c’est plutôt vers la

société esclavagiste, vers le paganisme et vers les terribles revanches de la plèbe qne prépare aujourd’iiui le socialisme, cette expression la plus complète de l’individualisme. Dansée rêve monstrueux, il n’y a plus ni classes ni corps, ni autels ni foyers ; l’individu seul, atome amorphe, eu présence et en dépendance de l’Etat.

L’Etat est en effet la seule société politique qui réponde à la charte de l’individualisme, telle qu’elle apparut dans la Déclaration des droits de l’homme de 1^89 et dans les applications ultérieures de ses principes. Partout où l’on s’en réclame comme d’un nouvel Evangile — celui de la Démocratie — il ne saurait subsister de corps perpétuels dont l’existence constituerait un privilège. Avec les autonomies locales, les corporations professionnelles ont disparu, et leur place dans l’organisation sociale n’est pas encore tenue par les syndicats.

L’Etat, dans la conception individualiste, incarne seul d’une manière complète la souveraineté de l’individu. Le suffrage universel est à sa base, soit sous la forme élective, pour la constitution d’une soidisant représentation des partis, soit sous sa forme plébiscitaire. Dans un cas comme dans l’autre, il n’en peut sortir que la domination d’un parti. Le référendum, que l’on invoque contre la prépotence de l’un d’eux, est une autre création de l’individualisme, qui ne donne pas plus de garanties sociales.

Tant que la famille ne sera plus considérée en tant ((u’unité sociale coniine l’unité politiqvie, et la corporation comme l’unité représentative desdroits et des intérêts publics, le césarisme. exercé par un ou par plusieurs individus, demeurera l’expression la plus adéquate de l’individualisme.

Quant à l’accord entre cette constitution du Pouvoir civil et celle de l’Eglise, il est essentiellement précaire, parce qu’il y a trop d’écart de jn-incipe entre ces deux constitutions : l’une prenant l’individu pour origine du pouvoir qui s’exerce sur lui, l’autre le tenant simplement pour objet de sa sollicitude. Là où il veut cire maître, il n’est qu’esclave, et là où l’Eglise veut régner sur les âmes, il faut d’abord qu’elle soit affranchie, et non au pouvoir de l’esclave.

Marquis dk L..-Tour-i>l-Pix La Cuarcb.


INDULGENCES. — I. J a doctrine catholique. — 11. Justification de la doctrine : A) Fondements dogmatiques ; B) Développement. — III. Ahus et réforme : 1" Indulgence a culpa et a poena : a* Vente des indulgences, — IV. Conclusion : utilité des indulgences.

I. La doctrine catholique

1° Définition. — On appelle « indulgence », dans la doctrine catholique, la rémission extrasacramentelle faite par l’Eglise de la peine temporelle due aux péchés déjà pardonnes. Ce n’est donc pas la rémission du péché : la faute ou coulpe qui le constitue et la peine éternelle qui en est la conséquence doivent, au contraire, avoir été préalablement remises pour que l’indulgence puisse obtenir son effet. Seule la peine temporelle en est l’objet. Encore l’indulgence n’est-elle pas, tant s’en faut, le seul moyen d’en obtenir la rémission : le sacrement de pénitence d’abord la procure, soit directement par l’absolution, soit indirectement par la contrition et la satisfaction — pénitence — qui en sont des éléments indispensables. Toutes les œuvres satisfactoires en outre, qu’accomplit le chrétien en état de grâce, obtiennent le même effet, en sorte que les indulgences ne sont