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INDE (RELIGIONS DE L’)

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n. 1, et Deutsche LUI. Zeit., 1906, 15 iléc.) sont, ce me semble, plus formels encore. — (M. Garbe admet l’emprunt pour les Apocryphes, pour le symbole du Poisson, pour le chapelet, etc.)

M. C. Clemex (voir col. 691, n. 2), dans un méritoire travail sur les relations du christianisme avec les rclig-ions elles philosophies de rantiquité, rencontre presque toutes les assertions des partisans de l’emprunt et il en montre rirrémcdiable faiblesse. Je lui reprocherai de regarder certaines sources bouddliiques comme postérieures au christianisme, sur la foi de M. Hopkins ; mais ceci ne clianjrc rien à l’affaire.

M. Ed. Lkhman>', professeur d’histoire des relifîions à Berlin, a eu un mot bien dur et bien lé^’cr sur les travaux de M. A. Lang. « L’inattendue théorie de Lan^ (sur le monothéisme des sauvages) a été accueillie avee la méliance qu’elle méritait. » (Orieiitalische lieligiouen, Teubner, igoC, p. aG.) Mais dans l’excellent n Bouddhisme » (fiiidJIiisiniis, 191 1, p. 78-98) qu’il vient de publier, il ne dissimule pas son incrédulité au sujet de l’emprunt Pour un seul parallèle «. il montre quelque condescendance : n Si on veut voir ici un emprunt, la conclusion ne serait peut-être pas fausse ; le christianisme ne serait pas plus pauvre si cette histoire lui manquait, f Comme il s’agit lie Pierre marchant sur les eaux, je ne suis pas disposé à être de cet avis. (Voir col. 698, n. 2.)

4. Plusieurs savants, très sceptiques sur le bouddhisme des liTes canoniques, croient à l’influence bouddhique dans les.-Vpocryphes. (L’édition la plus commode est celle de Ch. Michel, dans la collection Hemmer-Lcjay. A. Picard, 1911.) On peut dire que les rapprochements établis parM. E. Ivuhx (Hiiddhistisclies in den apocnphen Siangelien dans Gitriipiijùhaumudi, 1896, p. 1 16-119 ; ^oir aussi Congrès de Genève, II, p. gi (Etangile de yicodèmc) : L’eau dans laquelle est lavé Krishna guérit les malades : comparer Evangile arabe, 1 7] entre le Lalitavistara d’une part, le Pseudo-Matthieu et le Pseudo-Thomas de l’autre, ont été presque unanimement considérés comme décisifs. M. Garbe est très catégorique : « Pour moi, la plus forte preuve que l’influence bouddhique s’est exercée sur le christianisme pour la première fois dans les Apocryphes, c’est la différence fondamentale <pii existe entre les parallèles qu’on y relève et ceux que présentent les Canoniques. » (Deutsche Bundschau, 191 1, et Monist, 191 1, p. 627. — Je crois que le seul Douscbiitz, Theol. Lit. Zeil., 1896, p 44^1 a protesté contre la thèse de M. E. Kuhn. Mais on voit que MM. Kennedy et Ch. Michel ne la tiennent pas pour prouvée.)

Le surnaturel des Canoniques diffère essentiellement de celui des Apocrjphes : ici le merveilleux et parfois l’absurde ; là, le miracle et, dans l’ordre même du miracle, quelque chose de hautement édifiant et raisonnable. Les Apocryphes sont donc, plus ou moins, du type du Lalita ; les coïncidences seront, par conséquent, plus frappantes. Mais je ne vois pas qu’elles constituent des « suites » assez caractérisées pour rendre l’explication par emprunt, ou nécessaire, ou particulièrement plausible. (A mon avis, la question est trop claire en ce qui concerne les Synoptiques pour qu’il soit utile d’énumérer tous les parallèles ; je serai moins incomplet, sans être complet, pour les Apocryphes.)

Le Pseudo-Matthieu (xin, 2-3), nous dit-on, raconte que l’enfant, avant de naître, répandait une lumière merveilleuse et qu’à la naissance nulla poUutio sanguinis facta est in nascente, nutius dohir in paituriente. Je me refuse à croire que l’origine bouddhique de ces passages soit « parfaitement évidente ». La ressemblance des légendes de nativité du Bouddha et

de Krishna aurait pu avertir M. V.x drn Berg que, au mieux, r.pocryi)lie ninis présenterait une troisième version du thème de la vie utérine et de la naissance d’un enfant divin.

Cependant, dans le Pseudo-Matthieu, les miracles de la vie utérine du Bouddha, lumière, etc., n’ont pas laissé de trace. On n’y voit pas, en effet, que la lumière qui illumine la grotte dès que Marie y fut entrée, provienne de l’enfant : la lumière persiste jusqu’au troisième jour (xiii, 2 et xiv), auquel jour .Marie sortit de la grotte et entra dans une étable’. Quant à la phrase qu’on prétend qui dépend du Majjliinia, nulla pollulio…, elle est mise dans la bouche de la sage-femme qui constate la virginité : virgo concepil, firgo pepi’ril, i’irgo pennansit.EUe n’est pas empruntée à l’Enfance bouddhique ; elle relève d’une préoccupation dogmatique radicalement étrangère au bouddhisme. On sait que Màj-à avait eu commerce avec Çuddhodana, et qu’elle enfanta par le côté.

Que le miracle du palmier tendant ses fruits à Marie sur l’ordre de Jésus (Pseudo-Matthieu, xx, 2) soit n génuinement indien », parce que Mâyà mit au monde Bouddha debout et en s’accrochant aux branches d’un arbre complaisant, j’hésite à le croire ! Bien plutôt l’accouchement de Maya est une réplique de celui de Latone : « … elle se sentit près d’accoucher ; elle jeta ses deux bras autour d’un palmier ; elle appuya ses genoux sur le tendre gazon et la terre au-dessous d’elle sourit et l’enfant bondit à la lumière » (LIrmne à Apollon Délien, v. 1 16-1 19-)

D’après le Pseudo-Jacques (vi, i) « lorsque Marie eut six mois, sa mère la mit à terre, pour voir si elle tiendrait debout. Elle fît sept pas et s’en vint dans le giron de sa mère… >-. Ceci serait une adaptation des sept pas du Bouddha nouveau-né vers les quatre points cardinaux. M. Garbe remarque, avec raison, que les sept pas sont un rite ancien du mariage védique. Mais je tiens qu’un folkloriste pourrait citer de nombreuses applications occidentales du nombre sacré sept. (Dans le Pseudo-Matthieu, xiir, 3, Joseph et Marie subissent l’ordalie de la boisson du Seigneur : Marie fait sept fois le tour de l’autel. Cesepties aussi vient de la saptapadi ?)

Quand on conduisit le jeune Bouddha au temple, les statues des dieux se précipitèrent à ses pieds (Lalita, chap. viii, p. 120). Lorsqu’il se rendit à l’école, le maître, « incapable de supporter sa gloire et son éclat, fut étendu sur le sol, tombant la face en avant » ; l’enfant connaissait 64 écritures pour la plupart inconnues, même de nom, à son maître ; et à mesure que ses condisciples récitaient l’alphabet sous sa direction, on entendit résonner des mots ou

1. Contrairement à ce que dit M. Von den Berg, p. 75 [Wàhrend nach dent Proiet’ang-cUum Jacobi, ersi nach Jfsu Geburt ein herrtiches Licht erglanzl,..), c’est bien dans Jacques, xix, 2, qu’on peut trouver un parallèle à la radlance utérine du Bouddha : … Htrjr, jifl ; ixt/y. h tw ffTTx/.c.iw… xv.i TToôi ôy.iycv T5 i&j ; EX£tvo uTlsTTiyj.tTC iui ou iz’V.Yfi TÔ ^pi^Zi xat rjBt kvà i’fv.^z /jikt^cv… Dans IWpocryphe, lu lumière a pour but d’éclairer la grotte ; le Lalita iiKsii^te sur les caractères merveilleux du Bouddha depuis la conception.

2. Une autre histoire d’arbre, citée pur M. Van den Berg, est plus intéressante : les arbres mettent leurs fruits à la portée des enfants de Vessantara [Cariyapitnlta, , 9) Il y a peut-être, dans PseuHo-Matthieu, xx, 2, un trait de folk-lore. comme le pense M. J. Kennedy J R.4 S. 1ÎI07, p. 986) : « There are certains bits of folklore wbîch [Ihe Lalita] lias in common witb the Apocryphol Gospels, e. g. the sil tree which bends down to Àlâyâdevi, the images fatlîng down in the présence of the infant, the mysteries ofthe alphabet, and the tree whicl » ntTords the méditative Buddha a shade despile the révolutions of the Sun. »