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FOI, FlUEISME

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lance garantie à l’Eglise infaillible ; oublié aussi que chacun des lidèles reçoit des grâces de lumière et d’intelligence, qui, sans être des révélations proiirenient dites, nous éclairent cependant et rendent facile et familière aux plus humbles une certaine connaissance des vérités les plus hautes.

Bibliographie. — Des controverses entre Protestants dits orthodoxes et Protestante libéraux sur la nature de la foi, par exemple, entre M. Doumiîrguk et M. Ménkgoz, nous n’avons rien à dire ici. Sur la plupart des points qui nous intéressent ici, et qui n’ont guère pu être que signalés en passant, on trouvera explications et renseignements bibliographiques soit dans ce Dictionnaire, aux articles déjà cités, notamment aux articles Dogmk, Expi’ ; -BiKNCK RKLioiursK, soil dans le Dictionnaire de Théologie catholique, mêmes articles, et, en plus, à l’article Croyance. Nous avons déjà signalé la brochure de AI. I.ebreton sur L’encyclique et la théologie moderniste. Voir aussi son article sur La connaissance de foi. Etudes. 20 déc. 1908, t. CXVII, p. 781. On peut encore indiquer plusieurs articles de lui dans la /fer » e/^r « //</Ht’(/ay ; o/o^é</<iiHe, notamment : La foi et la théologie, d’après M. Tyrrell, t. CXIII, i’-"’^ février 1907, t. Ill, p. 5^2 ; Catholicisme, liéponse à M. Tyrrell, 15 juillet 1907, t. IV, p. 025 ; Art foi, ses motifs et sa nature, d après les Apologistes du II’siècle. Déjà signalé, le livre de M. Snell, Essai sur ta foi. Ajoutons : A. Gari>eil, Le donné réfélé et la théologie, Paris, 1909 ; J. V. Bainvel, Le dernier livre de George Tyrrell, dan’i Etudes, 20Juin 1910, t. CXXIII, p. 737, analyse critique de Christianity at the cross-roads, livre qui est comme le testament doctrinal du modernisme expirant.

V. La controverse fidéiste. — Le lidéisme, dont il faut maintenant dire un mot, soit pour le distinguer nettement de la doctrine catholique, avec laquelle on le confond quelquefois, soit pour répondre à queUpics dillicultés qu’il soulève contre cette doctrine, n’a rien à faire, ou presque rien, avec le symbololidéisine, dont nous venons de parler.

C’est, d’une façon générale, une tendance à donner trop peu à la raison, trop à la foi ou à la croyance. On peut l’appeler le lidéisme catholique, non en ce sens qu’il représente la pure doctrine catholique, mais parce qu’il a eu pour principaux tenants des catholiques, soumis à l’autorité de l’Eglise, et qui croyaient, en le soutenant, soutenir la véritable doctrine de l’Eglise. Il se présente lui-même sous deux fiu’iues distinctes, l’une sans rapport avec la pensée kantiste ou positiviste, l’autre sous l’intluence de cette pensée.

A. Fidéisme non kantien. — iCrposé historique.

On donne le imm de lidéisme à une philosophie qui cherche la source de nos connaissances, même naturelles, dans la foi plus que dans la raison. Si cette foi est regardée comme foi humaine, recevant, sur la seule autorité des parents et des générations passées, la vérité religieuse et morale, — on ne s’occupe ici i)ue de celle-là — on l’appelle plutôt traditionalisme. Si cette foi est regardée comme foi divine, faisant reposer toute certitude religieuse et morale sur l’autorité d’une révélation divine, on lui donne de préférence le nom de lidéisme. Ainsi dit-on que Lamen.nais et BoNALD sont traditionalistes, tandis que Pascal et Baitain sont plutôt lidéistes. En fait, les traditionalistes en arrivent à chercher dans une révélation divine, la révélation primitive, la source unique et nécessaire de toute vérité religieuse et morale, et s’ils font du sens commun le critérium de la vérité, c’est que Dieu a mis cette vérité par révélation, comme

un trésor précieux, au berceau de l’humanité. Nous pouvons donc ici les confondre avec les lidéistes.

Un coup d’œil, même rapide et superliciel, nous montre que la tradition patrislique, soit grecque, soit latine, fait très grande la part de la foi ou de la croyance — je prends pour le moment ces mots comme synonymes — dans l’acquisition et la transmission de la vérité. Sans distinguer exi)licitement, ou sans insister sur la distinction entre vérités naturelles et vérités surnaturelles (en tant du moins qu’ils n’ont en vue que l’acquisition de la vérité), ils ne tarissent pas sur les bienfaits de la foi, ils la montrent, de hi façon la plus ingénieuse, partout nécessaire dans la vie humaine. Il y a dans le De utilitate credendi de saint Augustin des pages devenues classiques et qu’on cite partout. Mais ce que dit saint Augustin se retrouve chez TnÉopuiLE u’Antioche, chez Origène, chez Euséue, chez ïiiéouoret, chez bien d’autres encore,

La scolastique est regardée généralement comme une réaction en faveur de la raison, jusqu’au moment où ScoT, où les No.minalistes surtout, refusèrent à la raison, pour la remettre dans le domaine de la foi, la connaissance certaine de presque toutes les vérités métaphysiques d’ordre religieux et nujral : inliniléde Dieu, immortalité de rànie, etc. J’ai déjà dit les excès de Luther et de CALvi.và cet égard. Avec leurs idées sur la déchéance foncièrede l’homme, que pouvaient-ils laisser à la raison ? En théorie, ils lui refusaient toute lumière, quitte à ne se fier en i)ratique, qu’à leurslumières. Les Jansénistes, avec leurs idées pessimistes sm’l’étatprésent de l’humanité, ne pouvaient qu’insister sur la faiblesse de la raison sans la foi et sur l’impuissance de la nature déchue à trouver la vérité, comme ils insistaient sur 1 iiiqjuissance de la volonté sans la grâce et sur sa dépravation morale. BossuET et Pascal, les prédicateurs et les écrivains ascétiques, allaient dans le même sens, sans aller si loin ; et il est facile de relever, non seulement dans Pascal, mais dans Bossuet, mainte formule qui sent le lidéisme — c’est là notamment qu’est le point faible de la célèbre argumentation de Bossuet contre le ministre Claude, quand, pour pousser celui-ci dans ses derniers retranchements, son adversaire envient à refuser toute certitude au témoignage purement humain. C’est à IIuet, évé<|uc d’-vranihes, que l’on attribue la paternité du lidéisme, pour l’avoir réduit en système : il lui donna ses formules et ses procédés d’investigation. On comprend que, au sortir de la révolution, Joseph de Maistre et Bonald aient réagi contre l’individualisme révolutionnaire, en faisant de la vérité un bien social et traditionnel ; que Lamennais, pour humilier la raison indiv iduelle, dont le dix-huitième siècle avait fait une idole, ait été amené à l’abaisser devant la foi elle sens commun. Lamennais, Bautain, Gerbet, Bonnettv, les traditionalistes de Louvain, excédèrent, et l’Eglise, dans l’intérêt même de la foi, dut intervenir en faveur de la raison. Nous savons déjà sa pensée à cet égard. Il nous reste ici à résoudre rapidement les principales objections du fidéisme. La chose pourrait paraître superflue et la controverse surannée. Il n’en est rien ; car il y a, chez nombre de catholiques en vue, une défiance de la raison et un réveil des tendances lidéistes. Il serait long d’en chercher les causes. Mais le fait est visible. Il faut donc répondre aux objections principales.

2. Les objections du fidéisme. Première objection.

— Les saints Pères, dit-on. n’attribuent-ils pas à la fui (-iiri ;) les premières notions rudimentaires de Dieu, cette première connaissance naturelle ou innée dont ils nous parlent scjuvent’.' Telle est notamment la doctrine de Clément i/’4lexandrie. — Réponse. Les