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INDE (RELIGIONS DE L’)

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Nirvana, ce qui lui épargnerait les fatigues et les déceptions de la vie qu’il se proposait de mener désormais. Le Bouddha refusa, alléguant qu’il se devait au salut de ses frères et à la propagation de la vérité. Cette voie du salut qui venait de lui être révélée, il voulait l’apprendre aux autres.

Cette histoire de la tentation au désert, qui se retrouve dans les Evangiles, on a prétendu que le Cliristianisme l’avait enii)runtée au Bouddhisme qui lui est antérieur de cin(j siècles. La réponse est facile. Outre que deux traditions peuvent être semblables, sans être la reproduction l’une de l’autre, mais par suite d un emprunt commun, ou par pure coïncidence, l’antériorité estici en faveur duCliristianisme, puisque les traditions bouddhiques, telles qu’elles nous sont parvenues, sont bien postérieures aux Evangiles, et que les monuments, inscriptions ou images, qui pourraient remonter au delà de notre ère, ne font aucune mention de cet épisode.

Ce qu’il y a de plus probable, c’est que le Bouddhisme primitif ignorait celui-ci et qu’il l’a em])runté au Christianisme, en l’adaptant à sa façon. Ce ne serait pas le seul emprunt que cette religion ferait à la nôtre. J’ai connu à Paris, il j’aune vingtaine d’années, un prêtre bouddhiste, Uyauon Fujishima, que le Mikado envoyait étudier l’organisatien extérieure <le la religion catholique, afin d’en faire liénéficier l’Eglisejaponaise. Ce qu’il fait aujourd’hui, le Bouddhisme a pu le faire autrefois. Il semble avéré que l’apùtre saint Thomas a porté l’Evangile au delà de l’Indus, sur les bords du Gange, et qu’une colonie nestorienne s’est établie de très bonne heure dans l’Inde. De plus, je le répète, nos Evangiles sont datés approximativement, les écrits bouddhicpies, souvent remaniés, sont, dans l’état où ils nous sont arrivés, de date beaucoup plus récente.

Il existe un second récit de la Tentation. Le Bouddha, a près son illumination, passe trois semaines dans le voisinage du Pippala. Au bout de la première, un Brahmane lui pose une question insidieuse qu’il résout. Surgit un cyclone ; le roi des serpents, Mucalimhi, le protège en s’enroulanl autour de lui ; jinis, la tempête passée, il adore le Snhlime.

A la fin de la troisième semaine, deux marchands, qui se trouvaient à passer par là. viennent sur l’avis d’une déesse, leur parente, lui apporter à manger. Les dieux, de leur côté, lui font cadeau d’une écuelle à aumônes, meuble indispensable à tout moine mendiant.

D’après cette même tradition, le Bouddha se demande s’ilest illuminé pour lui seul, ou s’il l’est aussi pour les autres ; s’ile ! , i Pnthi’l.iihiuldlui ou Samraisamhnddha, comme on dira plus tard. Brahmà le lliLe sur ce point en lui révélant sa vocation véritable : il doit être, il est le flambeau du monde.

Nous voyons ensuite le Bouddha en proie à une pensée de découragement. Il se dit que, pour prix de fatigues de tout genre, il ne rencontrera probablement qu’indifTérenee, ingratitude et mépris. Le même dieu le réconforte. Tout d’abord, le Bouddha refuse de se rendre aux désirs de Brahmà, qui est obligé d’insister par trois fois auprès de lui. Cette légende est la contre-partie de celle de la triple tentation par Màra.

.A. la troisième supplique de Brahmà, le Bouddha, qui a en ce moment la claire vision de l’avenir, se décide à prêcher la nonne Lui, et s’écrie : « Qu’elle soit ouverte à tous, la porte du salut ! que celui qui a des oreilles entende la parole et croie. »

La vue d’un étang de lotus, dont lesplantesétaient, les unes au-dessus, les autres au-dessous, les troisièmes enlin au niveau de 1 eau, symbole des âmes sauvées d’avance, d’avance perdues, ou indécises

entre leur salut et leur damnation, lui fait comprendre que son enseignement pourra profiter à un tiers au moinsdugenre humain. Désormais rien ne l’arrête plus ; il va commencer sa vie d’apôtre.

Sa première prédication eut lieu à Bénarès, demeurée la ville sainte par excellence de l’Inde. A certains moines qui lui demandaient comment il avait pu atteindre la vérité en menant une vie commode et facile, puisqu’il ne l’avait point rencontrée dans la voie pénitente et mortifiée où il s’étaitengagé précédemment, le Bouddha répondit que la vérité est précisément dans le chemin qui passe à égale distance des macérations et des voluptés. C’est le chemin sacré, à huit branches qui s’appellent/biy ; (/re, volonté pure, langage pur, action pure, moyens d’existence purs, aspirations pures, mémoire pure, méditation pure.

Naissance, vieillesse, maladie, mort, union avec ce que l’on n’aime pas, séparation de ce que l’on aime, privation deeeque l’ondésire ; tout cela est douleur. En résumé, la douleur est le quintuple attachement. Il s’agit de l’attachement aux cinq éléments qui constituent l’être physique et moral de l’homme : le corps, les sensations, les représentations, les formations ou tendances, et la connaissance.

Ce qui produit la renaissance c’est la soif de vivre ; éteignons cette soif et nous ne revivrons plus.

La connaissance de la quadruple vérité, c’est-à dire de la douleur, de son origine, de son abolition, des moyens de l’abolir : voilà ce qui constitue essentiellement l’Illumination, le Bouddhisme, par conséquent.

Tel est le résumé du fameux discours de Bénarès. Le Bouddha, suivant l’expression consacrée, venait de faire tourner la roue de la Loi dans le but d’arrêter celle du Samsara.

Les cinq moines devant qui le Bouddha prêcha ainsi se convertirent à cette doctrine et furent ses premiers disciples. Bientôt les néophytes furent au nombre de soixante. Le Parfait les envoya isolément prêcher la vérité sainte. Il leur dit : « O disciples, marchez pour le salut de beaucoup, pour le bonheur de beaucoup, par compassion pour le monde, pour le bien, pour le salut, pour le bonheur des dieux et des hommes. N’allez pas deux par le même

chemin Il y a des êtres que n’aveugle pas la

poussière de la terre ; mais, s’ils n’entendent pas prêcher la doctrine, ils ne pourront arriver au salut. Ceux-là embrasseront la doctrine. »

Ce que poursuit le Bouddhisme, mais par une autre voie, c’est, connue le Brahmanisme, la destruction de la personnalité ; pour le Brahmanisme, cette destruction consiste dans l’absorption de l’àme individuelle, du Jifiitman, par le Paramàtinan ou l’Ame suprême, tandis que le Bouddhisme semble ignorer l’Ame suprême, ou du moins il ne s’en occupe pas ; il place le salut dans le Ntrvùna, dont nous verrons plus tard la nature.

J’abrège le plus possible cette biographie du Bouddha, où d’ailleurs la vérité a une part si réduite, ce qui en diminue considéraldenient l’intérêt. La légende, comme une herbe folle, a envahi tout le chan>p de l’histoire.

A côté du sermon de Bénarès prend place, comme importance dans les traditions du Bouddhisme primitif, le célèbre dialogue connu sous le nom de Questions d’l’patissa, du nom de l’un des interlocuteurs ; l’autre était le Bhikshu Assaji. Upatissa ouvrit les yeux à la vérité bouddhique et s’attacha aux pas ilu Maître, qui voyait le nombre de ses disciplesaugnienter chaquejouraU|)oint queles familles s’en alarmèrent, comme elles devaient le faire, seize siècles plus tard, en présence des con<]Ucles faites