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INDE (RELIGIONS DE L’)

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par excellence ; mais sa bonté ne l’einpècUe pas d’être, un justicier redoutable, car, identifié au soleil, il est i le témoin universel, celui qui dénonce les délits et confond les criminels, lorsqu’il leur arrive de taire ou de nier leurs méfaits, en présence de leur juge souverain, que ce soit Varuna ou Yama ; mais ce rôle de témoin, de dénonciateur, il l’exercera surtout dans le Mazdéisme, sous le nom asiatique de Milhra, en attendant d’occuper le rang suprême dans la religion issue du Mazdéisme et appelée de son nom Mitliriacisme.

Siiija, dans l’origine, fut distinct de Mitra qui ne tarda pas à l’absorber.

Vishnii, plus tard devenu si grand, n’est guère célèbre dans les Vedas que par ses trois enjambées qui coûtèrent au démon Bali l’empire des trois mondes. Nous le retrouverons plus tard. Je mentionne, pour mémoire seulement, car leur connaissance approfondie ne nous importe pas ici, Rudra et les Maruts, Savilar, Pusliau, Uslias, l’Aurore, tantôt la mère des deux Açvins et d’autres fois confondue avec eux dans le même mythe ; ïvashtri, l’Ouvrier, celui qui fabriqua la foudre d’Indra, façonna la coupe où les dieux boivent le soma, construisit la charpente du sacrifice, etc. Signalons encore a passage ce Yama, le dieu des Morts, cité plus haut, les Pitris, ou Mânes, les Ancêtres, dont le culte constitue presque exclusivement le confucianisme, considéré au point de vue religieux, et le Shintoïsme, la religion oiricicllcdu Japon.

L’ordre hiérarchique n’est pas très rigoureux parmi les divinités védiques. Chacun des grands dieux devient à son tour le plus grand, ou mieux devient tous les autres à la fois. Un passage du Rig-Veda déclare même formellement que « parmi les dieux, il n’y a réellement ni petits, ni grands, ni vieux, ni jeunes, mais que tous sont grands et tous immortels ». Un procédé commode, pour éviter la compétition parmi eux ou leurs adorateurs, c’est de les identifier les uns aux autres, en affirmant, comme je le disais tout à rheire, que chacun est tous les autres. On retrouvera ce procédé jusque dans les Purànas, de date relativement moderne, par exemple dans le Bhâgavala où l’auteur, après avoir célébré la puissance d’un dieu quelconque, a soin d’ajouter qu’il n’est qu’une forme de Bhagavat. Il semble que l’esprit hindou cède ici au besoin de remonter à un principe unique, auteur de tout ce qui existe. C’est sans doute le même instinct d’unification qui lui fait donner le tout premier rang, tantôt à tel dieu, tantôt à tel autre. Mais au fond de ce monothéisme apparent, se trouve le panthéisme, comme l’a fort bien remarqué M. B.^^RTU, que je prends pour guide dans cette étude. Un dieu n’est le plus grand de tous les dieux ou n’est tous les dieux qu’à la condition d’être tout. Dans ce dernier cas, d’un principe ou germe unique, désigné plus tard sous le nom de Tad, Cela, est sorti par voie d’émanation successive l’univers avec toutes ses parties. L’Aljsolu existait de toute éternité lorsqu’il éprouva le désir, kâmn, d’émettre les êtres. Le premier terme de cette évidulion, ce fut un cire d’une nature indéterminée, énigmatique, désigné par le pronom interrogatif : Qui ? >ffl.’Celle doctrine panthéistique se résumera plus lard dans la fameuse parole Tvam asi tad : « Tu es Cela. » Tu, c’est Dieu, et Celct, chaque chose en particulier, tout en général.

Si r.bsoln est le [loinl de départ du Relatif, de riionime en ])arlicnlicr, on pourrait en inférer qu’il en est aussi le dernier terme et que l’honime doit retourner à Dieu d’où il est sorli. Les Vedas sont généralement muets sur ce point, qui sera traité si amplement dans les Religions subséquentes.

La Prière et le Sacrifice. — Les Vedas sont particulièrement discrets sur l’origine de l’homme et ses Uns dernières, celles-ci surtout ; en revanche ils traitent amplement de ses devoirs envers la divinité, ou mieux du plus important de ces devoirs, de celui qui les résume tous, la Prière, car le sacrifice n’est qu’une des formes de la prière, la plus parfaite, il est vrai.

Bien qu’il soit souvent question de droiture, de bonté, de foi, l’idée de sacrifice, de culte domine toutes les autres. Le péché, c’est avant tout la faute liturgique, supposé même qu’il y en ait d’autres. Un sacrifice défectueux attire la colère du dieu à qui on l’ortre, s’agit-il d’un vice de forme involontaire, et comme les rites sont compliqués, il est important de bien choisir les ministres du sacrifice qui se répartissent en quatre catégories, comprises sous le nom générique de Uitvijs ; il en est question ci-après.

J’ai dit que le culte, c’est-à-dire la prière et l’oblation, résume les devoirs de l’homme envers la divinité. L’ascétisme, la vie monacale, érémitique, si prisée plus lard de la piété hindoue, paraît avoir été ignorée du Védisme primitif, qui de plus est très sobre de détails en cequiconcernele sacrifice lui-même. Ofi’randes ou victimes étaient consumées par le feu qui les portait au ciel ; c’est ce qui valut à Agni d’être lintermédiaire obligé, le médiateur nécessaire entre la terre et le ciel. Le rôle de médiateur sera aussi celui du Mitlira inazdéen.en souvenir, peut-être, durôle que joue ici Agni, si vite identifié à Mitra. C’est à l’aide des « mâchoires ardentes d’Agni » que les autres dieux se repaîtront des offrandes, qu’il s’agisse de lait sur, de beurre, de gâteaux ou de soma. Toutefois ce dernier liquide, ils viendront souvent le boire directement dans la cuve du sacrifice, Indra surtout. On olfrait aussi la chair des animaux. Le sacrifice du cheval, l’Açiamedlia était déjà ou du moins devint, dans la suite, le plus important, mais il n’y avait guère que les princes à pouvoir en faire les frais. Je note en passant que le sacrifice public fut généralement ignoré de l’Inde, de même que la prière publique. Chacun prie ou sacrifie individuellement, avec celle différence que, si on peut prier personnellement sans le secours du prêtre, il n’en est pas de même du sacrifice. Un prêtre même ne peut sacrifier pour lui. Quand on offre un sacrifice, il faut toujours recourir au niinislèi’C d’aulrui.

Entre Dieu el l’homme, c’est un marché : donnant, donnant. Sans sacrifice, point de pluie, point d’herbe I)ar consé(iuent ; sans herbe jjoinl de soma, point de besliaux, point de lait ni de beurre, c’est-à-dire point de sacrifice. Or le sacrifice est l’aliment des dieux, cl si les dieux ne donnaient rien à l’homme qui cesserait de leur sacrifier, ce serait non seulement parce ipi’ils ne le voudraient plus, mais aussi pai-ce qu’ils ne le pourraient plus. Au demeurant, le sacrifice est couime le pivot du monde védique. Tout repose sur lui.

II. Brahmanisme. — Celle religion, que l’on peut a|)pcler la religion des hymnes, tout en demeurant foncièrement la mèuie aux âges subséquents, ne fut cependant pas sans se modifier par voie de suppression ou d’accroissement. C’est surtout alors que le sacrifice qui devait continuer jusqu’au bout d’être le point central, >in centre d’où tout part et où tout aboutit, se compliqua singulièrement el devint une œure. Karman, une opération tellement savante qu’elle exigea une science consomuu’e cl fort étendue dans son genre.

Le Rig-Veda connaissait déjà les sept classes de prêtres de la liturgie postérieure, et désignes sous