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INDE (RELIGIONS DE L’)

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INDE (RELIGIONS DE L’). — Cet article renferme deux études distinctes :

Ie partie : Exposé historique.

IIe partie : Problèmes apologétiques.

Ire partie : exposé historique

I. Védisme. — II. Brahmanisme. — III. Bouddhisme : 1° te Bouddha ; a" le Dharma ou la).ni : 3° le Sa/igha ou la Communauté. — IV. Hindouisme. — V. Bibliographie.

L’Inde est l’un des pays les plus religieux du monde, mais s’il adora toujours la divinité, il est loin de l’avoir adorée de la même façon et d’avoir eu d’elle la même idée. Je vais examiner brièvement les cultes principaux qui s’y sont succédé.

I. Védisme. — I.e premier dont nous ayons des documents est le ]’édisme. Ces documents forment quatre collections nommées le i ? ; ^- l’erfa, ou recueil d’hymnes, le i’ajur- Veda, sorle de formulaire, le Sàma-Veda ou recueil de cbants liturgiques dont le texte est emprunté auRig, enfin l’^ivarca-IVrfa, collection d’hymnes qui passe pour être plus récente et, par suite, pour avoir été ajoutée après coup aux autres.

A chaque collection védique se rattache un ou plusieurs Bràhmanas, ou commentaires, qui, sous prétexte d’expliquer le texte, sous couleur d’exégèse, renferment des spéculations philosophiques agrémentées de légendes nombreuses, le plus souvent puériles, mais parfois aussi dignes d’attention. Le tout réuni forme la Çruti, l’Audition, c’est-à-dire la Révélation, par opposition à la Tradition ou Smriti.

Il est impossible de déterminer même approximativement la date de ces documents. Si les plus récents ne paraissent pas remonter au delà du V siècle avant notre ère, les autres sont beaucoup plus anciens et s’échelonnent vraisemblablement le long d’une période de siècles assez étendue. Comme toutes les autres collections védiques s’appuient sur le Rig-Veda, ce recueil serait le plus ancien, mais les hymnes qui le composent ne sont sans doute pas de même date ; ils durent être ajoutés les uns aux autres progressivement, jusqu’à ce que la série en fût close, pour ainsi dire. C’est un peu, d’après certains exégètes, ce qui a eu lieu pour notre Psautier. Tel qu’il nous est parvenu, le Rig-Veda remonterait pour le moins, croit-on, au xi’siècle avant Jésus-Christ.

Bien que le panthéisme paraisse être le fond de ce que l’on est convenu d’appeler la Religion védique, et que, pour reprendre, mais en le modifiant, le mot de Bossuet : tout y soit Dieu, sans excepter Dieu même, il est certaines divinités qui se détachent nettement sur ce fond panthéistique pour former des personnalités distinctes.

Le culte des astres semble avoir été le jiremier de ces cultes idolâtriquesqui ne sont autres que la divinisation des phénomènes et des forces de la nature, et, parmi ces astres, le soleil et la lune, qui attirent tout spécialement l’attention des hommes, durent recevoir leurs premiers et plus constants hommages, le soleil surtout, qui rentre dans le culte général dvi feu, sous le nom d’Agni. Lorsque plus tard la spéculation brahmanique s’occupa de cet astre, elle le rattacha à toute une série de conceptions cosmiques dont il ne fut plus qu’un élément d’une importance plus ou moins considérable. On le considéra comme un feu sacré, allumé chaque matin par des divinités secondaires, les Açyins, en l’honneur des dieux ou

du Dieu suprême. Le feu du sacrifice, allumé par les prêtres sur la terre, n’en fut alors que l’image et la reproduction.

Agni est multiple dans ses manifestations. Il paraît au ciel, non seulement sous la forme solaire ou stellaire, mais l’éclair qui sillonne la nue orageuse, c’est lui. Il est dans le bois et la pierre, d’où on le fait jaillir par friction ou choc. Il est dans les eaux dont on le dira parfois le fils, il est dans le corps de l’homme ; c’est lui qui développe l’embryon dans le sein de sa mère. Pour le même motif, il habite aussi le corps des animaux. Nous verrons plus bas le rôle important joué par Agni dans le sacrifice, mais avant de parler du culte védique, je dois esquisser à grands traits la physionomie des principales divinités.

Le dieu.S’orna, identifié de bonne heure au dieu Lunus, quand on le considère dans sa nature matérielle et physique, est une liqueur, un jus extrait d’une plante que l’on croit appartenir à la famille des asclépiades. Lui aussi joue dans le sacrifice un rùle prépondérant, et c’est pour cela qu’ici je le signale immédiatement après Agni. On obtient ce liquide en broyant la plante, en a pressurant, suivant l’expression consacrée. C’est le breuvage saint p.or excellence ; il fut celui des dieux avant d’être celui des hommes. Primitivement, il n’existait même qu’au ciel. Mais Agni, empruntant la forme d’un aigle, trompa la surveillance du Gandharva préposé h sa garde, et l’apporta sur la terre. Depuis lors, il reste, pour ainsi dire, l’associé d’Agni : l’idée de l’un appelle le plus souvent celle de l’autre : ce sont les deux agents principaux du sacrifice, ce point central du Védisme, sinon même celui de toutes les religions de l’Inde.

Je ne ferai guère que mentionner les autres grandes divinités.

Indra se présente tout d’abord, avec son attitude martiale et ses belliqueux exploits, parmi lesquels le meurtre du serpent Vritra est le plus célèbre. C’est un peu l’Hercule de l’Inde, avec ses allures quelque peu brutales, ses accès de colère, ses violences, et son fond de bonté native qui en fait avant tout le protecteur du faible et du juste. Indra sera le roi des Trente, chiffre que l’on assignera parfois aux dieux principaux. Il fait littéralement la pluie et le beau temps, la pluie surtout, et sous ce dernier rapport il absorbera même, au point de la faire disparaître, la personnalité de Parjanya, le dieu officiel des averses védiques.

A côté d’Agni et surtout d’Indra, bien que de nature en apparence tout opposée, se trouve Brihasputi ou Brahmanaspati, le dieu de la Prière. Toute formule sacrée est une puissance : la puissance de Brihaspati. C’est par la prière que les dieux eux-mêmes sont ce qu’ils sont cl font ce qu’ils font. Delà cette importance attribuée par le Védisme à la prière sous toutes ses formes, dont la principale, celle autour de laquelle se groupent toutes les autres, est le sacrifice. Le sacrifice, la prière : voilà deux conceptions intimement liées l’une à l’autre et au-dessus desquelles plane, si je puis ainsi parler, l’image de Brihaspati, la Prière di^ inisée.

Varuna, nom dont on rapproche souvent l’Où/save’? des Grecs, symbolise la force morale, de même qu’Indra représente la vigueur physique. C’est le défenseur né du Bita, de l’ordre (ritus), au ciel et sur la terre. Rien n’échappe à sa vigilance. Ses messagers sont chargés de faire comparaître devant son tribunal les délinquants qu’il châtie sévèrement, lorsqu’ils ne parviennent pas à désarmer son courroux par le repentir. Varuna est le fils aîné à’.lditi, la mère des Adityas, et il a pour puîné Mitra qui est l’objet d’un bon nombre d’hymnes. Mitra estl’^mj