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HYSTERIE

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QUKRisoNS (v. ce mot) niiraonlevises, et même les rksuRHECTioNS (v. cc mot) (les morts, qu’on interprétait les unes par des suggestions, les autres par des conjurations de léthargies. En outre, l’hypnotisme procurait aux malades de Gharcot des crises terribles, où l’on voyait alors une contrefaçon des extases, des possessions démoniaques, etc., suivant la forme ou la période de la crise que l’on considérait. Et tout le surnaturel divin ou le préternaturel diabolique étaient ainsi ramenés aux proportions d’un accident morbide et expérimental comme les phénomènes de la nature.

m. Conception de Charcot : rôle de l’hypnotisme dans l’hystérie. — Mais l’hypnotisme complique l’hystérie et la dénature. Et l’on considère aujourd’hui comme artificiel (hystérie de culture) le tableau de la crise dont Charcot faisait une manifestation habituelle de l’hystérie ; on a découvert la part prépondérante qu’il fallait y attribuer à la suggestion : en d’autres termes, les malades ne passaient par les quatre phases classiques (de la « grande crise)’d’hystérie) que parce qu’elles se les suggéraient ou qu’on les leur suggérait consciemment, ou implicitement (en leur suggérant la crise, dont on croyait que ces quatre phases font partie). Ces quatre phases étaient, dans l’esprit de Charcot : la phase épileptoïde, identique à l’aura du haut-mal suivie d’un raccourci de l’attaque d’épilepsie ; la phase de clownisme, caractérisée par de grands mouvements désordonnés ; la phase des attiludes passionnelles (frayeur, volupté, jalousie, etc.) ; la phase hallucinatoire. Ces quatre phases constituaient par leur ensemble l’attaque d’hystérie dite convulsive, toujours issue d’une suggestion, toujours reproduite d’après un modèle rencontré ou imaginé, presque toujours provoquée par l’hypnotisme au début, ullcrieurement spontanée et plus ou moins fréquente chez les sujets les plus influencés ou les plus aptes. A côté de cette grande attaque convulsive ou grande hjslérie, existaient des formes frustes, larvées, réduites, spontanées dès le début, auxquelles on donnait le nom de manifestations de petite hystérie. La petite hystérie était caractérisée par des douleurs dans les régions ovariennes, etc. (zones hyslérogèncs), des sensations de strangulation (boule hystérique), de spasme, etc., tous phénomènes que Gharcot et ses élèves conjuraient par le simple attouchement des zones hjslérogènes. Enfin, dans l’intervalle des « attaques », les sujets hystériques ressentaient divers malaises ou troubles extrêmement variés (tremblements, paralysies, contractures, troubles vaso-moteurs, etc.) auxquels on donnait le nom de stigmates. Le tout était favorisé par l’hypnotisme, c’est-à-dire par un sommeil artificiel, fatigant, donc pathologique, provoqué par la fixation des yeux de l’hypnotiseur ou d’un objet brillant, et qui revêtait, suivant Charcot, tantôt la forme léthargique (attitude d’un profond sommeil avec contracture généralisée, liyperexcitabililé musculaire), tantôt la forme cataleptique (sommeil sans contracture, pendant lequel le sujet gardait indifféremment, passivement, toutes les positions qu’on lui infligeait), tantôt enfin la forme somnambulique (sommeil avec les apparences de la lucidité, pendant lequel le patient était éminemment docile à tous les ordres verbaux). Quelle que fut la forme de l’hypnotisme, on réveillait le sujet en lui soufflant vigoureusement sur les yeux.

Un lien de solidarité manifeste rattache l’hypnotisme à l’hystérie telle que la concevait Charcot, en ce sens que, d’une part, les sujets nerveux, spontanément enclins aux petits phénomènes de l’hystérie, sont plus facilement hypnotisables, et que, d’autre

part, les sujets fréquemment hypnotisés sont plus gravement hystériques, présentent les accidents les pUis importants et les plus incurables. Assurément, ne fussent-ils jamais hypnotisés, les hystériques présentent spontanément les accidents, les crises, elles stigmates : mais on admet alors qu’ils s’hypnotisent d’eux-mêmes, qu’ils reproduisent d’après un modèle ou d’après une description les prétendus stigmates et accidents : si bien que tous ces troubles, et les crises elles-mêmes, n’ont rien que de contingent, rien dont on puisse faire le fond de l’hystérie. En outre, quand les sujets sont hypnotisés, ces mêmes accidents sont plus réguliers, plus dramatiques, et se produisent d’autant mieux que l’hypnoliseurles prévoit. Charcot n’a donc pas inventé la grande hystérie, et il garde, lui et ses élèves (Gii.le de l. Toirkttb, etc.), le mérite d’en avoir découvert des aspects spontanés, mais avec la lourde responsabilité d’en avoir étendu les limites et condjiné les formes élémentaires par la « culture » insolite qu’il en fit dans tel et tel cas concret. Si donc on peut discuter sur les rapports essentiels, sur l’identité fondamentale de l’hystérie et de l’hypnose (comme M. Déjerine nous en fournit un illustre exemple en niant la parenté de ces deux états), on ne saurait refuser d’admettre que l’expérience montre un certain parallélisme entre les diverses formes d’hystérie (grande et petite) et les diverses formes d’hypnotisme (grand et petit), comme d’autre part l’histoire révèle un certain parallélisme entre le progrès de ces deux notions (nous avons développé ce point dans notre thèse, fl’ailleurs épuisée, Faculté (le médecine de Paris, n° 266 de l’année 1907-1908. Première partie). Et ce qu’enfin l’on ne saurait nier, c’est ([ue la suggeslibilité pathologiffue, c’est-à-dire ce qui nous intéresse ici, trouve dans l’hystérie spontanée sa matière, son milieu de prédilection, et dans l’hypnose sa forme, son coefficient, son véhicule de clioix. L’iiystérie apparaît donc comme l’état pathologique où la suggeslibilité est le plus redoutable, et l’hypnose comme le sommeil pathologique qui en aggrave les effets. La plupart des psj’chiatres donneraient leur adhésion à la première partie de cette conclusion ; la seconde trouve un argument puissant dans la régression de la grande hystérie depuis qu’on n’hypnotise plus.

On comprend maintenant que Charcot et son école aient accrédité l’opinion que les extases, les visions des saints, les possessions démoniaques, les résurrections des morts même, sont des phénomènes illusoires morbides, nullement surnaturels ; dans un ensemble aussi vaste, aussi varié, aussi cultivé enfin que l’hystérie des hypnotisés, il y avait toujours un « accident », ou une phase de la crise, ou un stigmate, ou une forme de l’hypnotisme qui permettait à des adversaires acharnés du surnaturel de se contenter complaisamment d’une analogie, en apparence suffisante, pour expliquer des faits supposés introuvables et par conséquent toujours prétendus faux ou défigurés, d’ailleurs volontairement inobservés. Charcot refusa obstinément de voir Bernadette (D’Boissarie, Lourdes de 1858 ô nos jours) ; il est probable (c’est l’opinion d’un exorciste ) qu’il n’a jamais vu de possédé vrai ; il assimilait lui-même les pseudo-miracles opérés sur le tombeau du diacre Paris à ceux qui furent opérés sur le tombeau de roi saint Louis (f.a Foi gui guérit). On 1 imileencore en cela (D’Grillièrk, Revue, i" septembre 191 1). Nous avons préféré discuter séparément ces confusions hâtives et grossières, aux mots qui désignent les objets respectivement assimilés à une forme d’hystérie (voir Guéuison miraculeuse. Possessions démoniaques. Résurrection, Stigmatisation, Visions, et l’article Extase dû au