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GUÉRISOA’S MIRACULEUSES

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notions indiscutables : tels renkystement, la formation d’un cal, la pliagocytose, le cloisonnement des foyers morbides, etc., qui ont jiour but d’isoler les éléments de dissension pour les éliminer et qui témoignent de la solidarité delà monarchie organique. Mais peu importent les exemples : a priori, la guérison est et sera toujours la tendance de la nature à réparer l’unité trahie et l’on en trouvera toujours des exemples plus ou moins connus, plus ou moins précis, plus ou moins éloquents suivant les phases de la science.

Or qu’est-ce à dire ? Si l’organisme tend naturellement à réparer ses lésions ou ses fonctions, à restaurer son unité désagrégée, il s’ensuit que sa guérison lui coûtera toujours une certaine énergie et par conséquent d’abord un certain temps. En outre, comme toute énergie organique n’est que la traduction en un langage spécial, sous la forme propre aux èlres vivants, des forces empruntées au monde physico-chimique, il s’ensuit encore que la guérison doit emprunter naturellement quelque secours au dehors et constituer par suite une élaboration ; plus la maladie sera avancée, plus l’unité sera compromise et plus cette élaboration sera dillicile et douloureuse ; naturellement aussi, elle sera d’autant plus fatigante, toutes choses égales d’ailleurs, qu’elle sera plus brève ; naturellement entin, l’unité restaurée n’cfTacera pas toute trace du multiple, l’organisme réparé gardera quelque souvenir, quelque empreinte du mal antérieur, et la tendance à la récidive ou tout au moins à la rechute sera la règle générale, dont l’exception (l’immunité acquise) ne s’obtient qu’au prix évident et d’ailleurs constaté de certains reliquats pathologiques (prédisposition à l’égard d’autres maladies, cicatrices vicieuses, menaces d’accidents secondaires ou tertiaires, etc.).

Sans être prophète, on peut donc prédire que toute guérison naturelle donnera lieu aux constatations suivantes : restauration lente, laborieuse, éprouvante, avec tendance à la récidive. On comprend donc qu’il y aura toujours non seulement présomption mais certitude que la guérison n’est pas naturelle quand on la verra survenir soudainement, sans épreuve, sans reliquat, sans récidive, à la suite d’une maladie pratiquement constituée jiar la désagrégation de l’unité organique. Ce sont en elfet les principaux signes que Benoit XIV a exigés pour la constatation d’une guérison miraculeuse ; ilya joint d’autres signes qui conlirmeiit les premiers, tels que l’échec des procédés connus de guérison naturelle, la preuve de leur ineflicacité.les témoignages alarmants de la marche de la maladie, tous signes qui rendent d’autant plus diflicile la guérison naturelle et d’autant plus frappante une guérison subite. C’est ainsi que théoriquement la philosophie n’est pas inutile à la délimitation de la nature, nonobstant l’imprécision ou l’indifférence de la méthode et de la langue scientifiques. Les limites delanalureétantdoncflxées, la présomption de guérison miraculeuse s’installe ; elle fait place à une évidence quand le renversement des lois naturelles coïncide a ec l’invocation des saints, la conversion des pécheurs et la paix des âmes : car « on reconnaît l’arbre à ses fruits u.

Mais on le reconnaît aussi à ses racines. Et c’est sous la réalité des faits qu’il faut chercher, dans la profondeur des causes, de quoi identifier le miracle. Cela est encore j)hilosophique : mais si l’homme, médecin ou non, refuse en ces matières de méditer sur les causes, il faut<|u’il renonce à discuter surles limites de la nature et de la surnature. Car il n’est pasensonpouvoird’cn faire uncnotiond’observation. Ni la surprise que lui procurent les fait s, ni l’importance qu’ils revêtent ne peut suffire àposer le miracle. Avant

qu’il n’ait lieu, celui-ci présente des caractères qui permettent de l’identifier et qui résultent de l’analyse même de son concept. Pour qu’une guérison soit miraculeuse, il faudra et il suffira qu’elle procède d’une intervention directe de Dieu, d’une irruption transcendante de la Cause première dans le jeu des elfets : et cette intervention invisible se reconnaît à la suppression visible des causes secondes. Non seulement les moyens adaptés à la fin surnaturelle, les moyens apparents du moins, sont dérisoires (ainsi l’eau des piscines de Lourdes n’a aucune vertu tkérapeutique ; on peut lui comparer celle de la piscine de Bethsaïda, Jean, v, 2, le poisson du vieux Tobie, Tob., VI, 4 ; la salive, Marc, vii, 28 ; le bord de la robe du Christ, /. « c, VIII, 44, etc.), mais les reliquats naturels de la guérison font quelquefois défaut : tout récemment en 190^, àproposd’unemaladeguérieàLourdesen 189a (Mme Authier, née Marie Lemarchand, défigurée avant sa guérison par un ulcère, après sa guérison par le récit fantastique d’Emile Zola), le D’Tenxkson, médecin de l’hôpital Saint-Louis, pou ail affirmer, par la simple observation de la cicatrice, que la guérison n’avait pas été naturelle. Ladescriptionphilosoi)hique et médicale d’une guérison naturelle permet d’établir, par opposition, les signes d’une guérison qui n’est pas naturelle. A cescaractères négatifs correspondent et s’ajustent les traits positifs qui constituent, pour ainsi parler, la phjsionomie du miracle : d’une part suppression du délai naturel, de l’épreuve naturelle, des moyens naturels, des traces naturelles ; d’autre part, aveu d’une cause transcendante arraché à l’âme par l’admiration des yeux, par le prix du spectacle, par la fécondité des effets, par telles garanties célestes (cf. Behtrin, Lourdes, Apparitions et Miracles, 35" éd., Gabalda, et J. B. Estrade, Les apparitions de Lourdes).

III Délimitation des ressources naturelles de la médecine. — Mais les exigences de certains rationalistes qui, [lour admettre une cause transcendante, veulent avoir épuisé, envers et contre tout, l’arsenal des arguments fournis par l’expérience, et, d’autre ])art (il faut le dire aussi), la haine des hommes pour la vérité » (Bossuet) qui, même alors, refuse encore de s’incliner devant l’intervention du divin dans la science, voilà des sentiments qui entretiennent quelques objections auxquelles la philosophie n’est I)as seule à repondre. Force nous est d’en extraire le contenu et de l’éprouver à la pure clarté de l’expérience médicale. Nous laissons de côté l’obstination quand même, qui ne relève que de la prière, non de la dialectique.

En somme, les objections des sceptiques se ramènent à deux types. Premier type : vous ne nous présentez jias les cas qui nous convaincraient ; — second type : les casque vous nous présentez ne nous convainquent pas, car ils sont analogues à des guérisons naturelles dont le type est fort connu des psychiatres. Cette dernière analogie revêt elle-même deux formes suivant le genre d’érudition du sceptiipie : tantôt il cherche ses exemples à la Salpê-Irière, ou chez Dubois de Berne, ou chez les Nancéiens : c’est l’analogie clinique ; tantôt il cherche ses modèles dans l’histoire ou l’ethnographie, chez les eonvulsionnaires de Saint-Médard, à l’Asclépiéion d’.Vlhènes ou d’Epidaure, aux i>èlerinagcs des schismatiques ou des musulmans : c’est l’analogie historique.

§ i. Premier type d’objections (Vous ne nous présentez pas les cas qui nous convaincraient, il nous faut la résurrection d’un mort, etc.).

Nous l’avons dit tout à l’heure : ces incrédules qui