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GRECQUE (EGLISE)

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elle est encore et avant tout une œuvre de Laine et de mauvaise foi. L’injure basse, la calomnie perfide, le travestissement des faits et des doctrines, voilà ce qu’on rencontre trop souvent, aussi liicn dans les documents olliciels que dans les écrits des particuliers. Dans l’encyclique patriarcale de 18l58 citée ci-dessus, les catholiques sont désignes par le terme de w.-n’ijKt. (= cent loups ; il y a aussi le substantif rM- : ’jjjr.- : u.iÇ) ; le pape est appelé Trarna ; (^ grand-père ^ radoteur) ; des missionnaires catholiques de Syrie il est dit : « Us cherchent à vous entraîner dans leur hérésie insensée et satanique ; pour cela tout moyen leur est bon : la dispense déraisonnable des jeûnes, la licence elfrénée des passions et des plaisirs charnels, l’absolution illégale et impie des péchés passés et futurs (allusion aux indulgences) et autres choses semblables que l’homme charnel désire avidement et accueille avec empressement », Petit-Mansi, Collecl. Concil., t. XL, col. 275. Entre ces libelles et les appels à l’union que nos papes adressent de temps en temps aux Orientaux, quelle dilTérence !

Il existe en pays grec un recueil presque oITiciel d’insanités contre les catholiques. C’est le Pédalion {-rfiàj ivj ^^ gouvernail), qui est comme le Corpus jur /s des Grecs. Le texte des canons approuvés par le concile in Triillo y est accompagné de longues notes, dans lesquelles deux moines athonites, Ac.apios et NicoDÈME, ont déversé toute leur bile latinoi)hobe. Cet ouvrage parut à Leipzig, en 1800, avec l’approbation du patriarche œcuménique et de son synode. Il a eu plusieurs rééditions depuis.Cellequi a été publiée à Athènes, en 1886, est précédée d’une lettre élogieuse du saint-synode hellène. L’espace nous manque pour faire des citations. Une seule suflira à édilier le lecteur sur le ton de la polémique des bons moines. Ceux-ci, pour justifier la rebaptisation ordonnée par le patriarche Cyrille V, cherchent à montrer que les Latins sont des hérétiques et ils en apportent cette preuve admirable : « Pour établir que les Latins sont des hérétiques, point n’est besoin d’une longue démonstration. Le fait même que nous éprouvons pour eux, depuis tantde siècles, une haine si forte et une si grande aversion, prouve d’une manièreéclatante que nous les détestons comme hérétiques, au même titre que les Ariens, les Sal>elliens et les Pneumatomaques ». Ur, ûy.)i’yj, édit. d’Athènes, 1886, p. 56. Ce sont les notes du Pédalion qui ont fait dire à un écrivain orthodoxe, leRusse A. P. Lebedev, « que la haine des Grecs contre les Latins est cette haine insensée que les barbares nourrissent à 1 égard des hommes civilisés. La méthode polémique des auteurs du Pédalioti est telle, ajoute-t-il, qu’ellenous fait rougir des Grecs et que nous les plaignons du fond du cœur ». Histoire de t’J.’^lise gréco-orientale sons la domination turque, du xx" au xix’siècle (en russe), S. Pétersbourg, 190^, p. 067, 668.

Plût au ciel que tous les Russes parlassent comme Lebedev ! Il s’en faut malheureusement qu’il en soit ainsi. Ils n’ont été dans le passé et ils ne restent encore aujourd’hui, sauf exception, que les trop lidèles disciples des Grecs. Le libelle dillamatoire contre le catholicisme, assaisonné des plus grossières injures, n’est pas chose inconnue chez eux. On l’a bien vu en ces dernières années, quand il s’est agi d’enrayer le mouvement de retour vers Rome des anciens Uniates. laissés libres pour un instant de suivre la voix de leur conscience. Toute In Russie occidentale a été inondée de tracts calomnieux, infâmes, partis de Minsk, de Kamenetz-Podolsk, de Vilna et de la Inure de Potehïaev. On lisait dans ces libelles que le concile du Vatican avait défini Vimpercaliilile du Pape, que toute l’histoire de la papauté était une série d’infamies et d’assassinats, que les confessionnaux des

églises catholiques étaient des mauvais lieux, que les |irêtres catholiques ne se distinguaient pas des Mormons, que l’Eglise romaine avait substitué le concubinage au mariage légitime ; on y affirmait que la fable de la papesse Jeanne était une pure vérité, que les indulgences jjour pardonner les péchés sont accessibles seulement aux riches, parce que le Pape les vend à très haut prix, etc., etc. La note comique n’était I)as absente : « Les prêtres catholiques se rasent la barbe, se l’ont la tonsure et portent des habits étriqués, disait un tract de la laure de Potehïaev. Au contraire, Jésus, les saints Apôtres et saint Nicolas portaient la barbe ; leurs cheveux étaient longs, et amples leurs vêtements. Les évoques et les prêtresorthodoxes ont conservé sur ce point la tradition du Seigneur ». Voir les détails dans le Bessarione, série III, t. V (1908), p. 151-175. Et dire que, si certains organes indépendants se sont honorés en flétrissant cette littérature, le Saint-Synode l’a recommandée et qu’elle a défrayé les semaines religieuses de certains diocèses !

Les Russes ne sont pas seulement tributaires des Grecs dans leur polémique anlicatholique. Ils empruntent aussi beaucoup aux auteurs protestants. C’est auprès de ces derniers qii’ils vont chercher souvent leur connaissance du catholicisme et des armes pour le combattre. Nos doctrines leur arrivent ainsi déformées, et il y a jjarfois plus d’ignorance que de mauvaise foi dans certaines de leurs allirmations. L’influence protestante se trahit en particulier dans maints articles de rjF/icrc/o^eVic théologique ortliodojce, en voie de publication. Le tome IX de cette encyclopédie, paru en 1908, contient un article sur l’Eglise catholique, émaillé d’erreurs grossières et d’accusations injustifiées. On y lit entre autres choses la phrase suivante : « L’Eglise catholique idolâtre l’humanité en la personne de la Mère de Dieu, de certains saints et particulièrement en la personne de l’évêque de Rome » (col. 234).

Un autre caractère de la polémique sehismatique est l’illogisme et l’incohérence. Il semble qu’avant d’attaquer la doctrine catholique, les théologiens I>liotiens devraient d’abord s’entendre entre eux sur les questions qui moti ent leurs griefs. Or il n’en est rien. Les brèves indications données plus haut à propos des divergences le prouvent suflisamment. Il n’est pas de point controversé entre eux cl nous sur lequel ils n’aient varié, et de nos jours encore il est difficile de trouver une question sur laquelle ils soient tous complètement d’accord. La primauté de saint Pierre et dupapenefait pas exception. Au xiv’siècle, un archevêque de Thessalonique, Nil Cabasilas, reconnaissait que l’évêque de Rome était le successeur de saint Pierre, mais il niait sa primauté de droit divin et son infaillibilité, Ti uh rccà t ; 0 ILtcs-j iyit jyZw ri EÔyi IWv ;  ; è-i(7xoro4. De primulu papae, P. G., t. CXLIX, col. 70 iD. Au début du XV’siècle, un autre archevêque de Thessalonique, Siméon. se contentait de nier l’infaillibilité du pape. Il écrivait : « Que les Latins nous montrent que l’évêque de Rome est fidèle à la foi de Pierre et des successeurs de Pierre, et nous ne lui contesterons pas les privilèges de Pierre ; il sera le premier, le chef et la tête de tous et le Pontife suprême. Car ces titres ont été reconnus aux patriarclies de Rome à travers les siècles ; ce siège est apostolique, le pontife qui l’occupe, s’il est orthodoxe, est dit successeur de Pierre ; aucun de reur qui pensent et parlent selon la vérité ne me contredira sur ce point… Que l’évêque de Rome soit seulement le successeur de l’orthodoxie de Sylvestre et d’.gatlion, de Léon et de Libère, de Martinet de Grégoire, et nous le proclamerons apostolique et primat des autres Pontifes, et nous nous soumettrons à lui, non seulement comme à