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GRECQUE (ÉGLISE)

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Le patriarche d’Alexandrie voit, augmenter tous les jours par l’imniiijration grecque le nombre des siens, qui ne dépasse pas actuellement 80.000.

Quant à l’archevêché du Sinaï, c’est l’autoccphalie la plus minuscule : tout son troupeau se compose d’une cinquantaine de bédouins. Reconnue en ib-^b par Constantinople, son indépendance a étéplusieurs (ois contestée par le patriarche de Jérusalem.

III. Groipe slavr. — A la tête de ce groupe, il faut placer l’Eglise russe, qui avec ses ^5. 000. 000 de fidèles l’emporte à elle seule de beaucoup sur toutes les autres aulocéphalies réunies. Autonome depuis 1089, elle fut d’aliord gouvernée par un patriarche résidant à Moscou. En i^ai, Pierre le Grand lui substitua un synode. On parle denos joursderétablirlepatriarcat. Cette église est étudiée plus loin en détail. Voir KussE (Eglise).

L’exarchat bulgare actuel date de 1870. Il étend sa juridiction sur 4.000.000 de fidèles environ, habitant non seulement la Bulgarie proprement dite, mais encore la Turquie d’Europe. L’exarque siège à Constantinople, et gouverne les fi<léles du royaume bulgare par l’intermédiaire du synode de Sophia. Les titres de l’Eglise bulgare à l’autonomie ne datent pas d’hier. Aux x’et xi’siècles, elle eut un patriarche à Okhrida, puis à Tirnovo, de 1204 à iSgS.

L’Eglise serbe, elle aussi, a un passé d’indépendance. En 1346, Uouchan établit le patriarcat de Petch ou Ipek, qui ne fut reconnu par Constantinople qu’en iâ-5. Supprimé en i^og, il fut restauré en 1557 pour de nouveau disparaître en 1767. Denos jours, on compte, la Bosnie-Herzégovine mise à part, quatre aulocéphalies serbes : l’Eglise serbe de Serbie, l’Eglise du Monténégro, le patriarcat de Ivarlovitz, en Hongrie, la métropolie serbo-roumaine de Tchernovitz, en Autriche.

L’Eglise serbe de Serbie est reconnue comme autoccphale depuis 1879. Elle a à sa tête un synode d’évêques présidé par l’archevêque de Belgrade, métropolitain de Serbie. Sa population était, en iC|03, de 2.450.000 âmes.

Le métro[)olitc de Cettinic gouverne avec l’évêque de Zakhoumsko-Ilasky les 260.000 orthodoxes du Monténégro. Il relève, pour l’ordination et le chrême, du synode de Saint-Pétersbourg.

En 1691, le patriarche d’Ipek, Arsène III, redoutant la vengeance des Turcs, passa en Hongrie avec 36.000 familles serbes et fixa son siège à Karlovitz. Ses successeurs n’eurent d’abord que le litre d’archevêques. Ils s’intitulent patriarches, depuis 1848, et commandent aux 1. 100.000 Serbes orthodoxes de Hongrie, avec le concours d’un synode et d’une assemblée iialionale de 76 membres, dont les deux tiers sont laïques.

Le diocèse slavo-roumain de Bukovine, les deux diocèses serbes de Dalmatie, la comnmnauté grécoserbe de Trieste et la colonie grecque de Vienne, c’est-à-dire tous les orthodoxes de l’Autriche proprement dite, constitiient, depuis 1873, une autocéphalie distincte dirigée parle mélropolitedc Tchernovitz et les deux évêques de Zara et de Gattaro, qui se réunissent en synode à Vienne, tous les ans. La population totale est d’environ 6ao.ooo ànies.

IV. Giiori’E ROUMAIN. — L’Eglise du royaume de Roumanie a été déclarée autocéphale par le Plianar. en 1885. Celte reconnaissance oMicielle n’a fait ([ue sanctionner un état de choses qui duraitdepuis1864. Le synode, qui gouverne les 4.800.000 orthodoxes roumains, est composé des huit évêquesdu royaume dont deux, celui de Bucarest et celui de lassi, jiortent le titre de métropolites.

Les Roumains de Transylvanie, au nombre de 1.700.000, forment, depuis 1864. une Eglise indépendante sous la juridiction du métropolitain de Sibiu ou IIermannstadt, qui est assistéd’une assemblée nationale de 90 membres, dont 30 ecclésiastiques et 60 laïques.

Cela fait donc en tout quinze églises autocéphales, et même seize, si l’on compte la Bosnie-Herzégovine. Le nombre total des lidèles est d’environ cent millions. S’il fallait s’en rapporter k certaines statistiques, il y aurait dans le monde entier 110 millions et plus d’orthodoxes ; mais c’est sans doute en oubliant qu’il existe en Russie plus de 20 millions de raskolniks séparés de l’Eglise ollicielle, ou en grossissant démesurément telle autocéphalie située dans l’empire turc, qu’on obtient un pareil résultat.

Pour quelles raisons et par quelles étapes successives l’ancienne Eglise byzantine, d’où sont sorties les aulocéphalies actuelles, est-elle arrivée à se séparer du centre de la catholicité ? Quelles sont les divergences dogmatiques ou réputées telles, qui ont servi de base au schisme au cours des siècles et par lesquelles il prétend se justifier encore ? Quelle conduite s’impose à l’apologiste catholique en présence de ces divergences et comment peut-il montrer que l’Eglise grecque ne porte pas les marques de la véritable Eglise ? Telles sont les questions auxquelles nous allons essayer de répondre dans la mesure que comportent les bornes étroites d’un article.

II. La préparation du schisme. — Les grands bouleversements religieux, comme les révolutions politiqueset sociales, ne se produisent point subitement, à la façon des tremblements de terre. La comparaison qui leur convient est celle du germe qui va se développant lentement sous l’influence favorable ou ennemie du milieu et des circonstances, jusqu’au moment où il peut enfin éclore et se produire au grand jour. Les germes des événements, ce sont les idées, et rien de plus vrai que cette sentence plus souvent répétée que comprise : a ce sont les idées qui mènent le monde ». Le schisme déplorable qui, par les intrigues de deux patriarches ambitieux, Photius et MiciiEi. Chrulaihe, a divisé l’Orient et l’Occident, a eu son idée directrice. Elle a commencé à se manifester dès le iv siècle, aussitôt après la conversion de Constantin, et, trouvant un milieu favorable, a marché rapidement vers la réalisation complète. Cette idée n’est autre que l’idée païenne de la confusion du pouvoir civil et du pouvoir spirituel avec subordination pleine et entière de celui-ci à celui-là, idée s’opposant directement au principe chrétien qui a libéré les consciences du joug du dieu-Etat et que le divinFondateur duchristianisme proclama par ces mots : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. » (Malth.. xxii, 21.) Ace point de vue, le schisme n’est qu’un épisode de cette grande lutte qui se poursuit à travers les siècles entre César et Jésus-Christ, entre l’i-nipire et II- sacerdoce, entre l’Eglise, royaume de Dieu, et l’Etat, royaume de la terre, entre l’idée catholique et l’idée particulariste et nationale.

L’histoire de l’Eglise orientale depuis Constantin jusqu’à Michel III l’h rogne, depuis Eusèbe de Nicomédie jusqu’à Photius, n’est guère que le récit d’une suite ininterrompue de confiits et de trêves entre l’idée catholique, représentée par l’évêque de Rome, successeur de saint Pierre, et l’idée païenne, incarnée dans deux personnages qui marchent presque toujours la main dans la main : l’empereur d’Orient et l’évêque de sa capitale, le maitre et le valet, le César-pape et l’antipape. C’est la période de préparation du schisme. Du côté de l’empereur.