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GRACE

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appellera de préférence les eliréliens, enfanls de Dieu (non i)as uisi, luaiszuyx 0£’-û). Mais il ne s’aj^it iei ((ue d’une différence de point de vue ; essenliellenient, les deux doctrines sont équivalentes. S. Jean est loin d’if ; norer la rémission des péchés (yort ; i., iii, 14-21)et S. Paul connaît noire naissance de Uieu (Tit., iii, 5). Si le concept même de justilicalion n’inclut pas nécessairement l’oelroi d’une vie nouvelle, en réalité pourtant la jnstilicatioii ne se l’ait que moyennant la coniiiiunication de l’Esprit de ie qui nous rend fils de Dieu, libres de tout esclavage et héritiers du ciel. Celle conception de la vie, qui apparaît fréquemment dans répître aux Romains, se fait jour surtout dans tes lettres de la captivité avec lesquelles les écrits johanniques offrent des atlinités reniarqualdes.

Après avoir caractérisé de la sorte, dans ses jurandes lignes, la position de S. Jean, esquissons brièvement sa conception du salut chrétien. La grande grâce de Dieu consiste dans le don au monde de son Fils unique, alin qu’en lui, nous ayons la vie (/., iii, 15-16 ; 1./., I, a ; iii, 14 ; i^’, y ; *, ’.’^<’)- Pour nous donner la vie, le Verbe a du d’abord ellacer nos péchés (>/., I. 29 ; VIII, 31-471’' "’^’^)- ^ "^^^ effet, il est mort pour nous, victime propitiatoire pour nos péchés (I J., I. 7 ;  : i, 2 ; iv, 10). La foi est un don de Dieu (./., VI, 65). Sans la foi au Christ, on reste sous le coup de la colère divine ; parla foi au Christ souffrant et exalté, on se sauve, on passe de la mort à la vie, on obtient la vie éternelle (./., I, 12, 23 ; iii, 15, 36 ; V, 24 ; n. 20). La vie éternelle consiste à contempler Dieu tel qu’il est (I J., iii, 2, 3). Pour avoir part au royaume de Dieu, il faut joindre à la foi la naissance de Dieu, il faut devenir enfant de Dieu, il faul naitie d’en haut, c’est-à-dire, de l’eau et de l’Espril, il faut en un mot recevoir le baptême de l’Espri (-Saint (./., i, 12, 13, 2(j ; iii, 3, 5, 6).

L’activité de Dieu dans le baptême est appeléeune génération ; le principe de vie surnaturelle déposé dans la nature, est un germe de Dieu ( : -€f.uy. 0£^û), <’est pour celji que les chrétiens sont enfants de D ! eu, engei.drés de Dieu ou de l’Esprit (J., iii, 3-8 ;

VIII, 47 ; 1 J-, 11, 29 ; ’"'O ; ’^' T’^’ ^’'^i J’ï’' 1 1 s.). Cette naissance surnaturelle est une renaissance (./., iii, 3-17), non pas sans doute simplement dans le sens d’une naissance nouvelle venant ^.’ajouter à une naissance naturelle conii>lète, mais aussi dans le sens d’une délivrance d’un état antérieur de mort et d’une résurrection à la vie surnaturelle. Par cette naissance, nous sommes déjà, et nous serons surtout plus tard, semblables à Dieu (( /., III, 2) ; nous participons à la luiture divine (I y., III, 9) ; nous sommes en communion intime avec le Christ (./., xv, 6, 7) et avec l’Esprit (I J., 11, 20, 27). Cette coiniiiiinion reçoit son couronnement dans la vision béatilique (l /., iii, 2 ; Apoc, iii, 12 ; , xiv, ), mais elle est déjà très réelle ici-bas. car le IChrist et par lui la Trinité entière habitent dans ll’àine du juste (7., xiv, 23). Jésus est non seulement lia vérité montrant aux hommes le chemin du ciel, il lest aussi la source de vie : c’est lui qui communique tl’eau vive et le pain de vie, c’est-à-dire la grâce qui subsiste en la vie éternelle (J., iv, 10, 14 ; vi, 27). jCe pain céleste qui donne la vie au monde, c’est Id’abord la personne de Jésus, source de grâce par la [foi et le baptême (J., vi, 33, 35) ; c’est aussi, d’une ifaçon plus précise, la chair et le sang du Christ, Isource de grâce dans l’Eucharistie (./., vi, 51-58). Le Ibaptème et l’Eucharistie sont les rites sacramentels iprincipaux par le moyen desquels se propage le rèf gne intérieur et mystique que le Christ est venu fonder sur la terre. L’agent divin de la propagation de ce règne, l’intermédiaire obligé par lequel le Christ entre en communion avec ses lidèles, c’est l’Esprit Sainl, que Jésus glorifié enverra (J., vii, 37-38 ; xiv, 15-ig, 25-20 ; xv, 26 ; xvi, 7-15).

Toutes les notions développées jusqu’ici sont étroitement connexes : naissance surnaturelle, liliation divine, participation de la nature divine, union intime avec Dieu, ne sont à les bien considérer que des aspects multiples d’une même réalité. S. Paul rattache d’ordinaire la liliation adoptive à la mission de l’Esprit, S. Jean à la naissance de Dieu ; mais pour S. Jean aussi, la présence du Christ en nous nous est cerliliée ]iar le témoignage de l’Esprit (I /., III, 24 ; IV, 13). Etant données la complexité cl la richesse du concept d’Esprit chez S. Paul, on ne pourrait pas, semble-t-il, s’appuyer sur cette légère dilférence d’avec S. Jean, j]our assigner comme fondement à l’adoiition liliale, l’inhabitation de l’Esprit-Saint, de préférence à la grâce sanctifiante. C’est <e qu’ontfait cependant les Pères grecs et à leur suite cjuelques théologiens (Lbssus, Petau, Tho.massin, Schei : ben). Les Pères latins, S. Thomas et le concile de Trente s’en tiennent à la lettre de S. Jean.

La naissance divine, par le principe vital nouveau qu’elle nous communique, inaugure en nous la vie nouvelle. Cette vie nouvelle sanctilîe l’être et exclut le péché (I y., 111, 6, 9, 10 ; V. iG-18). Elle élève les I)uissances de l’âme et surnaturalise les actes. Elle devient une source de lumière et de connaissance surnaturelle (./.. VI, 4"’-46 ; xiv, 17, 26 ; 1 J., 11, 27). L’opération de l’Esprit-Saint dans les disciples aura pour princii)al effet une illumination intérieure grâce à laquelle la vérité révélée se manifestera tous les jours davantage à l’esprit des chrétiens (7., xvi, 13). La vie nouvelle déposée en nous par la génération divine est aussi un foyer intense d’amour surnaturel pour Dieu et les enfants de Dieu. La charité est inséparable de la grâce, elle est un fruit de l’Esprit, le moyen de le conserver, la source de toutes les vertus et un gage de salut. Comme l’amour peut se perdre, il fait l’olijet d’un commandement tout spécial (l J., iii, 4)’L’amour de Dieu pour nous et notre amour pour Dieu constituent le commerce de l’amitié (J., XV, 12 ss.).

Divinisée dans son être et ses facultés, l’âme chrétienne se sanctiliera progressivement et s’approchera de l’image de Dieu. La grâce s’épanouira en une magnilique floraison d’oeuvres méritoires. Mais aussi bien, cette grâce est nécessaire, sans elle, pas d’activité salutaire et fructueuse (./., v-iii, 47 ; xv, 1-7 ; I y., II, 29 ; iii, 6. g ; v, 18). L’actuation de la grâce en bonnes œuvres exige la libre coopération de rhommc. Pour demeurer en Jésus, il faut garder sa parole, observer ses commandements, conformer notre volonté à la sienne (J., vui, 51 ; xiv, 21 ; I J.). S’il arrive au chrétien de pécher, il pourra retrouver la vie par la médiation de Jésus-Christ (L/., 11, 1). I Car le chrétien justilié peut pécher (I Joaii., 11, i ; V, 16-17) ^* l’assertion catégorique de la première éjiitre de Jean (m, 9 ; v, 18) ne vise pas à nier cette possibilité. Oinnis, qui natus est ex Deo, peccalian non facit. quoniam semen ipsiiis in eo manet. et non potest peccare, quoniam er fJeo nains est. Etant donné le but de l’épilre, qui est d’éloigner les chrétiens du péché en leur inculquant la véritable doctrine ehristologique, ce texte ne peut signifier l’inamissibilité de la justice, mais seulement son inconipossibililé avec le péché. La justice et le péché ne peuvent [)as plus cohabiter que Dieu et le diable, car la justice est tille de Dieu et le péché est l’œuvre du diable. L’aflirmation de S. Jean revient donc à ceci : le juste né de Dieu, aussi longtemps qu’il se comporte en lils de Dieu et garde le semen divin déposé en lui par la régénération baptismale (Joan., iii, i ss.), ne pèche pas et ne peut pas pécher. Il cesserait