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FOI, FIDÉISME

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autres en faussant sur toute la lig : ne la doctrine catholique de la foi ; attaque rationaliste, enfin, au nom de la raison et de la science, où aboutissent comme naturellement les controverses particulières et qui prétend établir sur les ruines de la foi la raison seule et la science. De là les six articles de cette étude, où nous ferons suivre immédiatement la doctrine catholique de la foi par l’anlilliése moderniste.

I. Lia doctrine catholique de la foi. — La doctrine catholique de la foi a été exposée oflîciellement par le Concile du Vatican. La première des deux constitutions que le Concile a promulguées, la Constitution Dei Filius, est intitulée Constltiitio dogmatica de fide cniliolica. Elle traite ex professa de la foi et de la doctrine catholique sur ce sujet. Elle fait la théorie de la foi enface des erreurs et des objections contemporaines. LeConcilen’a pas tout dit, comme on ferait dans un traité de théologie ; mais il a dit le principal, et il nous donne de la question une vue d’ensemble, claire et compréhensive. On ne saurait mieux faire, semble-t-il, que de demander à cet exposé otiiciel la pensée authentique de l’Eglise. C’est donc l’Eglise elle-même qui va nous exposer, dans un document infaillible, sa doctrine sur la foi. Nous pouvons nous contenter d’analyser la Constitution et de traduire les textes, quitte à les expliquer çà et là ou à les compléter, quand besoin sera.

Après un premier chapitre sur Dieu, sur la création, sur la Providence, la Constitution s’occupe de la Révélation, auchapitre II. Celle-ci n’est pas lacondition de toute connaissance de Dieu ; car c"est la pensée de l’Eglise et son enseignement que « Dieu, principeet lin de toutes choses, peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison au moyen des choses créées… Mais il a plu à Dieu, dans sa sagesse et sa bonté, de se révéler au genre humain par une autre voie, la voie surnaturelle, lui et les décrets éternels de sa volonté. » La révélation est donc présentée comme une œuvre de sagesse et de bonté, plactiisse ejtis sapienliæ et bonitati.

Cette révélation a un double objet : tout d’abord, les mystères divins ; mais aussi certaines vérités d’ordre naturel, pour les mettre plus sûrement à la portée de tous : « C’est seulement grâce à cette révélation divine que certaines vérités sur Dieu, non d’ailleurs inaccessibles à la raison humaine, peuvent, dans l’état présent de l’humanité, être connues de tous, facilement, d’une ferme certitude, et sans mélange d’erreur : Iluic divinæ refelationi trilniendiim ejuidem est ut ea qiiæ in rehus divinis humanæ rationi per se impenia non sitni, in præsenti quoque generis humani condilione. ah omnibus expedite.firma certitudine et nullo admixio errore cognosci possint. » S’ensuil-il que cette révélation soit absolument nécessaire ? Non pas, répond le Concile. j n liac ta men de causa retelatio absoJute necessaria dicenda est, laissant d ailleurs aux théologiens le soin de résoudre l’apparente contradiction. Elilsla résolvent, en effet, par une explication subtile, mais solide et lumineuse. Si Dieu avait laissé l’homme dans l’état dénature, sans l’élever à l’ordre surnaturel, il aurait eu pour lui un ordre de Providence en rapport avec cet état, et qui l’eût mis à même de se sullire pour mener la vie religieuse et morale proportionnée à sa nature. Mais il l’a élevé à l’état surnaturel ; la Providence qui le gouverne est d’ordre sui’naturci, et cette Providence supplée du coup par la révélation et la grâce à une Providence naturelle qui, dans l’hypothèse actuelle, n’a plus des lors sa raison d’être. Conclusion : Moralement nécessaire dans l’ordre actuel, à défaut d’autre moyen providentiel, même pour

l’acqpiisition des vérités naturelles indispensables à une vie vraiment humaine (entendez cette acquisition dans les conditions requises pour le gros du genre humain, ato » ! nii » 5, c’est-à-dire facile, certaine, sans mélange d’erreur), la révélation n’est de nécessité absolue que dans l’hypothèse d’une élévation à un ordre supérieur, celle que Dieu a réalisée en destinant l’homme, par un elTet de son infinie bonté, à une lin surnaturelle, pourqu’il eùtparlàdes biens d’ordre divin, qui dépassent absolument la portée de l’esprit humain : J’on hac tanien de causa reveiatio absotute necessaria dicenda est, sed quia Deus ex infinita bonitate sua ordina’it hominein ad finem supernaturalem, ad participanda scilicet bona diiina, quæhumanae mentis lutelligentiam umnino superant. Cette révélation nous donne l’objet de notre foi. Le Concile rappelle que l’Ecriture et la Tradition en sont le dépôt, et il arrive à parler ex professa de la foi elle-même. C’est le sujet du chapitre m.

Contre les prétentions à l’autonomie, à l’indépendance absolue de la raison et de la volonté, il établit l’obligation de croire quand Dieu parle, et il l’établit sur la dépendance même de l’être créé à l’égard du Créateur : « Etant donné que l’homme dépend tout entier de Dieu comme de son créateur et de son maître, et que la raison créée est toute subordonnée à la Vérité incréée, nous sommes tenus de rendre à Dieu par la foi le plein hommage de notre intelligence et de notre volonté : Cuin liomo a Deatanquam Creatore et Domino suo totus dependeat et ratio creata increatae Veritati penitus subjecta sit, plénum reelanti Ileo intellectus et voluntatis obseqnium fide præstare tenemur. » Le Concile, on le voit, nous présente la foi comme un hommage de soumission totale à Dieu, soumission égale de l’intelligence et de la volonté ; il fonde le devoir de cette soumission sur notre nature même d’être créé : nous pourrons réclamer la pleine autonomie de notre raison et de notre volonté quand nous pourrons réclamer la pleine indépendance de notre être à l’égard de Dieu. La foi nous est donc montrée ici avant tout comme une obligation, comme un devoir. Elle est autre chose encore : un bienfait incomparable, un secours nécessaire pour réaliser notre destinée (cela ressort clairement de la façon dont nous sont présentées, au chapitre précédent, notre élévation à l’état surnaturel et la révélation, qui s’y rattache logiquement, puisque l’homme doit tendre à sa lin en être raisonnable et libre, qui sait où il va et qui veut ce qu’il fait) ; mais elle est aussi cela, et l’on peut dire que, en ce qui nous regarde, elle est cela avant tout, puisque rien ne nous est si intime et si essentiel que notre être même tout dépendant de Dieu, et donc que notre dépendance de fond dans notre activité proprement personnelle, l’activité intellectuelle et morale. Aussi bien était-ce cette obligation de la foi que niait le rationalisme, celui de Kant comme celui de Cousin ; c’est elle qu’il fallait surtout atlirmer. Le Concile l’affirme, et il dit anathème à qui soutiendrait que « la raison humaine est tellement indépendante que Dieu ne peut lui commander la foi ». Canon i, du chapitre m.

Mais qu’est-ce donc, au juste, que cette foi, à laquelle nous sommes ainsi tenus, et tenus sous peine de damnation ? La notion de la foi n’avait pas été moins défigurée que celle de sa nécessité. Le Concile va la définir.

« Cette foi, qui est le commencement du salut, 

l’Eglise catholique professe que c’est une vertu surnaturelle, par laquelle, sous l’inspiration et avec l’aide de la grâce divine (Dei adspiraiite et adjuvante graiia), nous tenons pour vrai ce que Dieu a révélé (ab eo revelata vera esse credimus). non pour en avoir perçu par la lumière naturelle de la raison la vérité intrinsèque (non propter intrinsecam rerum