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GNOSE

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moyennant la pratique de la vertu, à une assez confortable fclicilc. Le Diniiurt ; c lui-iuônic, l’auteur responsable de la création, tant critiquiedans les autres sectes, se voit ménager une destinée fort honorable. La gnose valenlinienne est, d’un boula l’autre, une gnose nuptiale. Depuis les plus abstraites origines des êtres jusqu’à leurs lins (lernières, ce ne sont que syzygies, mariagesetgénérations. En ceci, coinmeen ses conséquencesmorales, elle rappelle plutôt le système simonlen que celui de Saturnil.

Basii-ide, au contraire, se rapiiroclie de Saturnil en ce qu’il symbolise autrement que par des rapports de sexe la longue évolution de l’aljstrait au concret. Ses éons, comme les anges de Saturnil, sont célibataires. Mais la complication n’est pas moins grande que chez Valentin. (Dans cette description du système de Basilide, je m’en rapporte à Saint-iRÉNÉK (l, a8), suivi par Saint Hippolytr dans son Syntagma (Pseudo-Tert., Epiph., Ilær. 24, Piiilasth. 32). Les Philusopluimena donnent une tout autre idée du système, mais d’après des documents dont l’origine est devenue susiiecte. Clément d’Alexandrie nous a conservé quekpies traits intéressants, mais seulement pour la partie morale.)

Du Père inengendré procède Nous, de Nous Logos, de Logos Phronesis.dePhronesis Sopliiæt Djnamis, qui produisent d’autres êtres appelés Vertus, Puissances, Anges. Ainsi se peuple le premier ciel. Il n’y a pas moins de 365 cieux ; celui que nous voyons est le dernier. Il est habité par lesanges créateurs, dont le clief est le dieu des Juifs. Celui-ci éleva la prétention d’asservir tous les peuples à la nation qu’il favorisait. De là, conflit entre lui et ses collègues. Pour rétablir la paix et délivrer l’homme de la tyrannie des démiurges, le Père suprême envoie ici-bas Nous, qui prend en Jésus une apparence d’humanité. Au moment de la Passion, le Rédempteur change de forme avec Simon le Cyrénéen, lequel est crucilié à sa place. Aussi n’y a-t-il pas lievi d’honorer lecrucitié, ni surtout de se laisser martyriser pour son nom. Le salut consiste dans la connaissance du véritable état des choses, suivant l’enseignement basilidien.

L’Ancien Testament est répudié, comme inspiré par les créateurs. La magie, qui permet de maîtriser ces êtres néfastes, était très en honneur chez les liasilidiens. Ils avaient des mots mystérieux ; le plus connu est celui d’Âhraras ou Alirasax, dont les lettres additionnées suivant leur valeur numérique (en grec) donnent le nombre 365, celui des mondes supérieurs. La morale est tout aussi déterministe que dans le sj’stème de Valentin. La foi est affaire de nature, non de volonté. Les passions ont une sorte lie substantialité. On les appelait des appendices ; ce sont des natures animales attachées à l’être raisonnable, qui se trouve ainsi pourvu d’instincts hétéroclites, ceux du loup, du singe, du lion, du bouc, et ainsi de suite. Sans être atteinte en elle-même par les fautes où l’entraînent ses passions, l’àme spirituelle en subit néanmoins les conséquences : tout |)éché doit être expié, et l’est en effet par la souffrance, en cette vie ou en une autre, car la métempsychose est admise.

Dans la pratique, il semble qu’à l’origine les Basilidiens aient accepté les règles de la morale commune. Clément d’Alexandrie (Strom., III, i et suiv.) atteste que Basilide et son fils Isidore admettaient le mariage et repoussaient l’immoralité ; mais les Basilidiens de son temps n’étaient guère fidèles, en ceci, aux préceptes du maître. A la lin du second siècle, la secte avait une réputation d’immoralité bien établie. Comme celle de Valentin, c’était surtout une école.

C’est aussi le cas de la gnose carpocratienne (InÉ NÉE, I, 25 ; les autres dérivent de lui, sauf Clément d’Alexandrie, Strom., III, 2, qui a conserve des fragments imi)ortants du Ils/si ôi-rcfciTtivj ;  ; d’Epipliane). Cahpochate était un Alexandrin, comme Valentin et Basilide. Sa femme, appelée Alexandrie, était de l’île de Céphallénie ; il eu eut un lils, Epiphane, enfant prixlige, qui mourut à dix-sept ans, auteur d’un livre « sur la Justice ». E[iiphane devint dieu à Cél )liallénie, comme Simon à Samarie. Les insulaires lui élevèrent dans la ville de Samé un temple et un musée, où l’on célébrait en son honneur des sacrifices et des fêtes littéraires.

Carpocrate était un philosophe platonicien, plus ou moins frotté de christianisme gnostique. Il admettait un dieu unique, duquel émane toute une hiérarchie d’anges. Le monde sensible est leur œuvre. Les âmes humaines ont d’abord circulé dans l’entourage du Dieu-Père ; puis, tombées dans la matière, elles doivent en être délivrées pour revenir à leur orgine. Jésus, (ils de Joseph, né dans les mêmes conditions que les autres hommes et engagé comme eux dans la métenipsychose, a pu, par réminiscence de ce qu’il avait connu dans son existence première et avec le secours d’en haut, triompher des maîtres du monde et remonter auprès du Père. Tous peuvent, comme lui, à son exemple et par les mêmes moyens, arriver à mépriser les créateurs et à leur échapper. Us peuvent y réussir aussi bien et mieux que lui. Le programme de cette libération comporte le passage en tous les états de vie et l’accomplissement de tous les actes.

S’il n’est pas rempli dans la vie présente, ce qui est le cas général, il y a lieu à des transmigrations successives jusipi’à ce que le compte y soit. Les actes, d’ailleurs, sont indifférents de leur nature ; l’opinion seule les classe en bons et en mauvais. La « justice » enseignée par Epiphane est essentiellement l’égalité dans la répartition des biens. Ceux-ci, y compris les femmes, sont à tout le monde, exactement comme la lumière du jour.

On reconnaît, à plusieurs de ces traits, l’influence de Platon. Le mythe du Phèdre est greffé sur l’Evangile.

La magie était en très grand honneur chez lesCarpocratiens. Leur culte avait des formes helléniques bien caractérisées. On a déjà vu comment ils honoraient leurs fondateurs. Ils avaient aussi des images peintes ou sculptées de Jésus-Christ, soi-disant reproduites d’un portrait exécuté par ordre de Pilate ; ils les couronnaient de fleurs, avec celles de Pythagore, Platon, Aristote et autres sages.

Saint Irénée ne veut pas croire que ces sectaires poussent leur morale à ses dernières conséquences et qu’ils aillent jusqu’à se livrer à toutes les abominations qu’elle autoriserait. Mais il constate la i)crversion de leurs mœurs et le scandale qu’elle cause. U reproche aux Carpocratiens de diffamer le christianisme, et leur demande comment ils peuvent se réclamer de Jésus, qui, dans son Evangile, enseigne une tout autre morale. Les Carpocratiens avalent réponse à cela. Ils prétendaient que Jésus avait eu des enseignements secrets, que les disciples n’avaient confiés qu’à des personnes sûres.

m. L’enseignement gnostique. — Inutile d’aller plus loin dans la description des systèmes gnostiques. On reconnaU aisément sous leur diversité quelques idées communes et fondamentales.

] I, e Dieu créateur et législateur de l’Ancien Testament n’est pas le vrai Dieu. Au-dessus de lui, à une hauteur infinie, il y a le Dieu-Père, principe suprême de tous les êtres.

2° Le Dieu de l’Ancien Testament ignore le vrai