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FIN JUSTIFIE LES MOYENS

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une brochure sous If lilrc : Der /Meck heiligt die Miltel, eine iHliiscli-hisIdrisclin C’ntersiirhting rielist einem Epilogiis gideatiis (3’édit., Berlin, lyo’, ), il prétendit fournir l : i preuve. Avec M. de Hoensl)roech, la question prenait un nouvel aspect ; il reconnaissait formellement dans la revue Deutscldand, que les citations alléguées jusque-là, spécialement celles de Busenil)auni, n’avaient aucune force probante ; que Htisembaum ne parlait nullement de moyens qui fussent en soi moralement illicites, etque, depuis Pascal jusqu’en igoS, les adversaires des Jésuites n’avaient exploité, dans ce déljat, qu’une documentation inexacte, susceptible de les fourvoyer (iinrichiig, irrefitlirend).

Mais M. de lloensbroeeli. lui, avait, dans le vaste maquis de la casuistique, exploré de tout autres fourrés, et il se llattait d’avoir fait une chasse heureuse. Il avait étudié les textes des casuistes relatifs aux deux problèmes suivants :

1° Est-il permis, en vue d’une fin qui est bonne, d’olTrir à autrui l’occasion de commettre une faute ;

2° Est-il |)ermis de conseiller à autrui une faute moindre, pour en éviter une plus grave ?

Les solutions des casuites attestaient, d’après M. de Iloensbroecb, que pour eux la fin justifie les uiojens.

Preinihe ifiiestion. F.si-il permis d’occasionner une faute ?

Laissons de côté le cas du mari qui soupçonne sa femme d’adultère, cas souvent traité par les casuistes ; prenons cet autre exemple, du père qui soupçonnerait son fils d’avoir des habitudes de vol ; peut-il à dessein laisser des clefs sur un meuble pour avancer l’heure où il pourra surprendre ce fils et lui adresser des légitimesobservationss)13ceptibles de l’amender ?

Non, répond le Jésuite Sanchez. — Oui, répondent les Jésuites Escobar, Tamburim, Casthopalao. Voici la raison que donnent ces derniers ; nous empruntons le texte de ïamburini : <i Illa clavis nblatio non est aclio ex se peccaminosa sed indifferens, nec ullii modo expressa vel tacita peccati acceptalio. » C’est parce qu’ils considèrent le moyen en lui-même comme n’étant pas peccaminosus, mais indifferens, qu’ils en admettent l’emploi en vue d’une fin qu’ils jugent bonne : leredressement du coupable. Un Jiutre Sanchbz, un Jean Sanchez, qui n’était pas Jésuite, insiste dans le même sens en disant : Aon est fornialiter cooperare peccato, sed illiid permittere (trailuisez : non ()as le permettre, mais mettre en mesure <le le commettre), nuileriam ministrando ad gracias du m nu m impcdiendum.

Seconde question. Est-il permis, pour éditera quelqu’un une faute plus considérable, de lui en conseiller une moindre ?

N’on, répondent le Jésuite IIortado et le Jésuite Sa ; par le fait même que vous conseilleriez cette autre faute, vous auriez, dans l’accomplissement d’un acte mauvais, vine part de responsabilité. Casthopalao, plus indulgent, stipule, lui, qu’on a le droit d’incliner le pécheur vers une faute moins grave pourvu que cette faute rentre vraiment dans la même catégorie que la faute plus grave qu’il projetait de conmiettre : sinon, continue-t-il, « vous êtes vraiment l’instigateur de son péché, même si vous agissez en vue d’une bonne lin i. Et d’ailleurs il ajoute : « Faire un moindre péché n’est pas pour le pécheur un moyen louable d’éviter un mal plus grave. » Au delà de Castropalao. aux antipodes de Hurlado et de Sa, voici surgir d’autres casuistes, avec des solutions plus complaisantes. Us s’appellent Sanchez. Becanus, Vasql’ez, Laymann, Tamiurim, Escobar. Supposons que Pierre veuille

enleveràPaul toute sa fortune ; Pierre péchera moins gravement si, par suite de votre conseil, il ne lui enlève que la moitié. Supposons que Pierre ait la tentation de faire commettre à une femme un adultère ; il péchera moins gravement si, cédant à vos remarques, il se retourne vers une femme qui soit du moins libre de tout lien. Supposons que Pierre veuille violer un couvent ; il péchera moins gravement si, prêtant l’oreille à vos suggestions, il s’abandonne à un accès d’ivresse, qui l’accable et le paralyse. Votre conseil, remarquent les casuistes, n’amène pas au péché ipielqu’un qui, d’ores et déjà, était décidé à pécher ; il n’induit pas au péché d’une façon absolue ; il ne vise pas précisément à provoquer une faute ; mais, vous adressant à quelqu’un qui est déterminé à faire le mal, vous avez pour but de diminuer le mal qu’il songea commettre ; etce que vous voulez expressément produire par votre conseil, ce n’est pas tant ce malum minus que la carentia majoris mali. Par surcroît, — c’est là un point sur lequel insistent Sanchez et Tamburini, — vous vous garderez bien — car alors vous deviendriez efTectivement complice — de prêter votre concours, votre collaboration, pour la réalisation dece péché moins grave qui, de par votre influence, se substitue à un péché plus grave.

Ainsi, quoi que l’on pense des divergences d’avis entre ces casuistes, ceux-là mêmes qui se montrent le plus complaisants n’admettent pas que, pour une fin légitime, on puisse employer des moyens immoraux ; car au contraire tout l’effort de leur subtile dialectique vise à soutenir que ces moyens, réputés immoraux par le jésuite Sa ou le jésuite Hurtado, sont des moyens, non point mauvais, mais simplement indilTérents. On peut chicaner ces casuistes jésuites, comme le fout, au demeurant, d’autres casuistes leurs confrères, sur la qualification qu’ils donnent à ces moyens, sur l’appréciation morale qu’ils émettent à leur sujet ; mais aucun ne se rencontrera qui, après avoir rangé un acte parmi les actes mauvais en soi. le conseille ou même le tolère en vue d’une fin louable. Les recherches de M. de Hoensbroech sur ce nouveau terrain n’ont pas été plus fructueuses que ne l’avait été dans la période antérieure, l’exploitation j)artiale de certains textes de Busembaum,

Entre lui et l’abbé Dasbach, un jury de professeurs devait décider ; mais la constitution en fut impossible. Vingt-six professeurs protestants se récusèrent ; de son côté, le comte de Hoensbroech récusa le professeur Mausbach de Miinster, et le professeur Heinbr de Fribourg en Brisgau, qu’il suspectait de « jésuitisme «.L’idée lui vint de s’adresser au tribunal de Trêves pour réclamer de M. Dasbach les 2.000 florins ; le tribunal se déclara incompétent. Mais en igo5 la cour d’appel de Cologne se déclara compétente, fit sortir de leurtondje et défiler à sa barre les vieux casuistes cités comme témoins par le comte de Hoensbroech, et conclut en le déboutant de sa demande.

Une fois de plus, l’efl^ort nouveau pour justifier l’accusation portée contre les Jésuites avait avorté, et c’était le jugement d’un tribunal d’Empire qui sanctionnait l’échec. Dans les considérants du jugement on lit : An keiner Stelle ist in den vorgelegten .lesuitenschriften bei Behandlung dieser Frage der nltgemeine (irundsatz ausgesprochen, dass jede an sich (enverfliche Handlung durcli jedi-n gulen Zneck erluuht wird. « Enaucuu passage des écrits des Jésuites allégué par Hoensbroech n’est énoncé ce principe général que toute action mauvaise en soi puisse devenir licite par le fait d’une fin quelcontiue qui soit bonne. y>(KoelnisclieV’otkszeitung, 3 avril igoô, n » 273.)

Que si d’ailleurs nous observons dans les livres