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GALLICAXIS.ME

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Pctriis » ; l’abhé Travehs, l’abbé Corgxe et d’autres dissertaient abondamment sui- le droit divin des curés et leur qualité de juy^es de la foi ; en l’jSS le parlement de Paris défendit d’appeler œcuméniques les conciles de Florence et de Lalran, qui ont osé s’écarter des thèses l)àloises ou condamner la Pragmatique ! Entre les prêtres révoltés et les parlements tyranniques. les évoques auraient pu être tentés de répudier la tradition fixée en 1682 : ils n’en firent rien ; dans leurs séminaires ce ne sont pas seulement la Théologie de Lyon, à tendance janséniste, mais encore les manuels à tendances opposées, comme la Théologie de Houeii, qui professent la doctrine de la Déclaration : jusqu’à la Révolution, l’université de Toulouse a une cliaire des « Libertés », et en 1779 les Sulpiciens sont trouvés gallicans trop tièdes pour pouvoir l’occuper.

Mais tout de même nos maximes étaient soutenues avec moins d’àpreté qu’autrefois ; au grand scandale des I^’ouvelles ecclésiastiques, nos prélats se disaient tous « évéque par l’autorité apostolique », et quand, en 1^53, les parlementaires et le cliancelier parlèrent des hommages dus au pape, l’évêque d’Amiens rectifia et dit publiquement : « Il faut, en plus, filiale et sincère obéissance. » (Cf. Sicard, L’ancien clergé de France, I, Les éi’éques ayant la Béyolution, liv. ii, ch. vil, p. 42 ?-436.) Contre la Constitution civile du clergé, aljoutissant naturel des rêveries presbytériennes des appelants aussi bien que des pratiques parlementaires, les évêques prirent l’initiative de la lutte : ils ne voulaient ni du schisme qu’acceptaient certains constituants, ni de « l’unité de foi et de communion » avec l’Eglise de Rome que prônaient Grégoire et ses amis ; ils proclamaient avec M. de Boulogne, qu’il fallait reconnaître au pape « la primauté de juridiction dans toute l’Eglise, avec l’exercice liabituel qu’elle avait en France : institution canonique des évêques et souveraine compétence en appel ». La vieille Eglise gallicane se fit chasser du pays et mourut pour avoir dél’endu les principes de sa .--ubordination à l’Eglise romaine.

g) Le gallic inisme hors de France

Cependant le gallicanisme avait essaimé à l’étranger et par l’entremise des jansénistes. Dès la première moitié du xviii’siècle, une groupe d’appelants de la Sorbonne tenta de réconcilier l’Orient russe à l’Occident dans la communion gallicane. Après une ouverture orale au tsar Pierre le Grand en visite à Paris, ils dépêchèrent en Russie, avec des pouvoirs ecclésiastiques conférés par Rarchman AVuyters (arclievèque installé à Utrecht malgré le pape et sacré par un vicaire apostolique suspens, Varlet), un ami du saint diacre Paris, l’habile et généreux curé d’Asnières, Jubé de la Cour. Sa mission échoua (cf. P. P1ERLING, La Liussie et le Saint-Siège, l. IV, Paris igo’j.p. 332 sq.) ; mais le rêve des Sorbonnistes ne s’est pas évanoui : aujourd’liui encore, les successeurs de Barcliman poui’suivent leurs négociations avec les orthodoxes.

Le succès fut plus prompt en Allemagne : Marie Thkrèsb et Joseph II ont adopté plus que les princiiies du gallicanisme polilique ; les maximes du gallicanisme ecclésiastique leur furent portées peut-être d’Utrecht, par le fameux médecin van Swieten, dont la famille était de l’entourage de Barcliman. En 17C9, le prélat i>e Stoch, grand ami dumédecin hollandais, fit un sommaire en cent articles des doctrines imposées à tous les aspirants au doctorat dans l’université de Vienne : on y trouvait, non seulement la déclaration de 1682, mais tous lesprincipes des appelants français et hollandais. Un autre ami de Barcli man, qui passa exilé à.mersfoort la fin de sa longue et laborieuse carrière, le célèbre canoniste gallican Zegerv.

EspEN(161C-1728), forma à Louvain

le fameux Fkbronius : Nicol.sdeHonïheim. Devenu évéque de Myriophite et auxiliaire de Trêves, Hontlieim publia en i ;  ; 63 sous son pseudonyme (Justin Febronius) un De statu Ecclesiæ deque légitima potestate Honiani pontijicis. qui Ut scandale. Sous prétexte de rendre plus facile laréunion des protestants, Febronius demandait qu’on ramenât l’Eglise catholique à sa prétendue constitution primitive : sorte de démocratie (quoiqu’il affirme ne pas aller jusque là et se séparerainsi de Riclier à qui il attribue l’erreur multitudiniste), où le peuple fidèle délègue aux évêques, ses commis, un pouvoir des plus étendus et à peu près indépendant du premier de tous les commis qui est le pape. Le système, bien que passablement incohérent, comme prirent plaisir à le démontrer ses adversaires, Ut fortune dans toute l’Europe. Le pape Pie VI obligea Hontheim à lui envoyer une rétractation en 38 articles, que l’évêque atténua en 1781 par un commentaire mal reçu des catholiques aussi bien que des jansénistes, et qui n’empêcha point la diffusion de ses doctrines. Elles inspirèrent la Punctatiun d’Enis : 28 articles arrêtés par les délégués des électeurs ecclésiastiques de la vallée du Rhin et de l’archevêque de Salzbourg, le 26 août i- ; 86, et signés un peu plus tard par leurs commettants. En représailles de la création àMunich d’une nonciatui-e apostolique, pourvue, comme celle de Cologne, d’une juridiction propre, les évêques allemands déclaraient abolis toutes les réserves, exemptions, dispenses, appels, facultés quinquennales qui marquaient le pouvoir supérieur du pape : le souverain pontife n’était pour leur diocèse, ils le disaient expressément, qu’un évéque étranger.

La même année 1786 (en septembre), dans les Etats du frère de Joseph II, Léopold de Toscane, l’évêque de Pistoie et Prato, Scipion Ricci, convoqua ses prêtres en synode : il proclama leur juridiction de droit divin et leur caractère déjuges de la foi. Le synode de Pistoie porta en effet un décret sur la foi, où il inséra la Déclaration de 1682. Ces prétendues décisions, qui devaient être condamnées par Pie VI en 1794, furent repoussées par les dix-sept évêques du concile plénier de Toscane. Le peuple de Pistoie et celui de Prato finirent par chasser Ricci. Le gallicanisme n’était pas fait iiour l’Italie. |Cet évêque. qui tenta d’importer le gallicanisme au delà des monts, ne se décida que très tard (en 1805, après la tourmente révolutionnaire), et très péniblement à faire la rétractation qui lui permit de mourir catholique.

h) La nouvelle Eglise de France et la fin du gallicanisme ecclésiastique

1) Le Concordat de 1801 (voir art. Concordat) a canoniquement anéanti l’ancienne Eglise gallicane ; ses sièges ont été supprimés et remplacés par des diocèses nouveaux ; les anciens titulaires, non démissionnaires, dépossédés de toute juridiction, sans procès, sans consultation des intéressés, parun actesouverain du pape. « Il me semble, dit l’un des anciens évêques, Lally-Tollendal, que si l’on me montrait le texte même d’un canon en opposition directe avec ce qu’a fait ici le S. -Siège, je répondrais : l’esprit de ce canon prescrirait d’en violer la lettre. C’est ici, bien véritablement, que la lettre tue et que l’esprit vivifie, car bien véritablement il s’agit pour l’Eglise gallicane de vivre ou de mourir. » C’est là l’écho de la foi primitive de l’Eglise de France : au-dessus de toutes les règles, le successeur de Pierre a la cura et la custodia de toutes les Eglises. Tous les collègues