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GALLICANISME

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l’aclion diiecle des papes est d’abord peu sensible. La personnalité de Ciiahlemagne domine alors l’Eglise comme l’Etal, c’est le grand électeur des évcques, et, malgré la persistance des formes et des distinctions théoriques, le législateur et lejiige.

L’épiscopat franc est dans sa main. Aussi, lorsqu’en 79^ le roi veut témoigner à H.drien n le mécontentement causé par ses avances aux Byzantins, le concile de Francfort (roi franc et évêques francs), l>ouscule sans ménagement, au sujet du culte des images, le second concile de Nicée, que l’Eglise regarde aujourd’hui comme œcuménique, qualifie de race dégénérée les Grecs qui le co.mposaien tel blâme le pape qui l’a approuvé ! Pour expliquer cette étrange attitude il faut tenir compte de la méprise sur le sens du mot grec 7t-, oî/v » ; 71 ; , traduit adorntio, qui scandalisa les Occidentaux, et de la naturelle infatualion de prélats assez inexpérimentés en théologie, flers de leur science renaissante et de la rapide hégémonie de leur race, ce sentiment se traduit naïvement dans les litres CoruUns (cf. IIei-ele, Histoire des Conciles, Irad. Leclercq, 111, 1061 sq., et la belle étude de M. F. Vernet, art. Carolins, dans Diction, de tliéol. cat. de Vacant). Trente ans après, au concile de Paris (8a5) les évcques francs accusent sans scrupules le pape Hadrien d’avoir péché par ignorance en défendant le concile de Nicée, ils font tenir à l’empereur Louis le modèle d’une lettre que le pape devrait écrire au basileus Michel. Avec une amusante inconséquence, ils y insèrent la traditionnelle allirmation de l’infaillibilité romaine : « Parles successeurs orthodoxes des SS. Apôtres, l’Eglise de Rome a toujours ramené au droit chemin ceux qui, dans loulesles parties du monde, se sont égarés de la vraie foi ! » (Bahonius, Annal., ad. ann. SaS.) Un peu plus tard, en 833, quand Lolhaire révolté contre son père fait venir en France le pape Gniir.oiRE IV, les évêques fidèles an vieil empereur profèrent à l’adresse du pontife cette menace : « Si cxconimunicataras advtniret, excommunicatus ahiret « , si contraire aux anciens canons (cum aliter se haheat antiquorum canonum auctorilas) qu’elle scandalise l’auteur de la Vila Illadoyici PU (P. /.., CIV, gôS). Les prélats le prenaient de très liatit avec leur frère de Rome et insinuaient la distinction, jadis formulécpar JusTi-NiEN et son concile d’Orient, entre la. S’crfc* et le.Sedens. Le pape réclama son titre de père et déclara sa personne inséparable de son siège (ibid., ay^-atjg). Au reste, au même moment, l’archevêque de Lyon Ago-BARi ) (dont on veut faire un gallican précoce, parce qu’il aggrave, jusqu’à l’erreur iconoclaste inclusivement, la méprise des pères de Francfort, qu’il voit des hérésies dans une antienne romaine que nous chantons encore la veille de Noël, et qu’il exalte nos anciens conciles), envoie à l’empereur les textes les plus formels des papes Pelage, Léon et Anastase, pour lui enseigner ses devoirs envers le pontife de Route. D’autre part, le groupe des |)rélats partisans de Lothaire envoyait à Grégoire IV par Wala un recueil d’autorités patrisliqucs, lui reconnaissant la plénitiule du magistère et de la juridiction (Pasguase Raiiiikrt, Vita Valae, II, 16, dans Pehtz, M. G., Scri/jtores, 11, 502). On peut voir là les premières escarmouches doctrinales entre gallicans et ullramontaius. ( ; elte esi)èce particulière de gallicanisme i)(ilitique, qui marque les débuts del’Emliire carolingien, aurait ainsi provoqué une éclosion de gallicanisme ecclésiastique. Mais la théorie est loind’èlre fermement constituée.

2) Elle s’organisa un peu plus pendant le siècle où se précipita l’elTrayante déconqiosition de l’œuvre politique et ecclésiastique de Charlcmagne.

La papauté, qui recueillit l’héritage de la pensée politiique du grand empereur à côté de ses propres traditions, pénètre alors de toutes parts la vie ecclésiastique de notre pays. « Si nous étudions en détail, dit excellemment M. Imbart de la Tour (f.es élections épiscopnles dans l’ancienne France Au ix"’au xii’siècle, Paris, 1890, p. lo), les difl’érents exemples de cette intervention (surtout sous NtcoLAS l’^r^ 868-867, et Jean VUI, 872-882)…, il est impossible d’en dégager une théorie juridique. Qnanàe ^a^te se montre dansune élection, ce n’est jamais en vertu d’un texte spécial, constitutionnel, qui lui donne dans tel ou tel cas la faculté d’intervenir. Il n’invoque jamais que les principes généraux qui ont formé le pouvoir papal ; il n’a d’autre titre que son droit à gouverner. » Il faut donc se garder d’attribuer, comme le fait M. Lot, ajirès bien d’autres (Etude sur le règne de Hugues de Capet, p. 138), les immenses progrès de l’intervention pontificale au ix’siècle, au succès des faux célèbres par lescjnels un auteur, ou l’.n groupe d’auteurs, le pseudo-lsidorus Mercator, chercha à assurer aux évêques des garanties légales contre l’arbitraire croissant des seigneurs laïcs, la faiblesse de leurs eomprovinciaux, la tyrannie de ces dignitaires jadis créés pour la réforme, mais ayant alors grand besoin d’être eux-mêmes réformés : les archevêques. Les Fausses Décrétalbs (voir ce mot), qui tendaient à ramener l’institution archiépiscopale aux anciennes limites de l’institution métropolitaine et à fortifier les juridictions d’appel (primaties et S. Siège), ont sans doute profité à l’Eglise de Rome, mais tardivement qusqu’à l’alsacien Léon IX qui acclimata an delà des monts la conviction franque sur leur authenticité, elles ne sont utilisées par les papes qu’avec une parcimonie assez défiante). Si elles ont si bien réussi en France, c’estsansdoute parce que, dans leurs textes fabriqués ou démarqués, elles traduisaient une conception de l’Eglise et de son gouvernement en harmonie avec le développement de la conception traditionnelle.

« La primauté du Siège apostolique reconnue

par Hincmar et tous ses contemporains, écrit M. E.Lesxb (/.a hiérarchie épiscopale… en Gaule et en Germanie, 7^2-882, Paris, igoS, p. 226 sq.), autorisait par son ca /a t(è ; e/Hrfé/i ; i( le travail de pénétration dans l’Eglise franque d’un Xicolas I<^’. Ce n’est pas le pseudo-Isidore qui imagina et exprima le premier l’idée que le pape possède une compétence universelle ; elle l’inspira lui-même et fit tout le succès des pièces qu’il mit sous le nom des anciens papes… [Cette croyance est] le véritable facteur des transformations qui se préparent. .. Dans l’alTairc de Rothad, l’autorité de Nicolas 1° a fait plus que l’autorité du pseudo-Calixte, car un concile franc avait <léposé Rothad l>icn qu’il in ocjuàt sans douteles/’aus « e5 Décrélales, c.c…

3) La réintégration de Rothad à Soissons et le rétablissementdes clercs ordonnés par Ebbon de Reims et déposés par son successeur Hincmar eomjitent, en effet, I)armi les coups les plus sensibles portés par Nicolas 1" à l’organisation spéciale de l’église carolingienne : les archeê(pics se défendirent, et c’est cette défense qui a valu à leur{)rotagonistc Hincmar de Reims, au-I )rès (le beaucoup d’auleurs, son renom de père du gallicanisme (cf. H. ScnnoERs, Jlinhmar c. Jleinis, Fribourg en B., 188/)). On ne trouve pourtant pas chez lui une négation nette des prérogati%cs iionlificalcs. Sa doctrine sur l’Eglise, sur son unité mysliquedans l’administration des sacrements et roirran<lc (lu sacrifice, et son unité extéricm’e assurée par la primauté de Pierre, est correcte. Il a l<)uj(Uirs professé en théorie sa soumission au pape (concile de Douzy, P. /.., CXXVI, G08). Il paraît avoir admis la supériorité du pontife siu- les conciles généraux (/>?