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FIN DU MOA^DE

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dans le monde de l’Antéchrist, ou de ses suppôts et précurseurs, révèle cette « appréciation pessimiste des événements contemporains » que le R. P. Prat signale chez les chrétiens de l’âge apostolique et dans laquelle il voit justement l’un des facteurs de leur attente de la parousie prochaine (/. « théologie de saint Paul, première partie, 1908, p. 108). De fait, si S. Jean estime prochaine la venue du Seigneur, c’est qu’il croit reconnaître en certains hérétiques de son temps et de son pajs les instruments de l’Antéchrist. Mais alors son sentiment ne représente qu’une conclusion personnelle et conjecturale, non point une certitude directe et fondée sur la révélation.

Ainsi donc, dans l’Apocalypse, la parousie et la fin du monde sont renvojées au delà du règne millénaire (règne spirituel) dans un lointain avenir. Dans le Quatrième Evangile, il n’est pas question de la proximité de la parousie. L’auteur des épîtres conjecture que l’avènement du Seigneur et la fin du monde sont proches, d’une proximité impossil)le sans doute à préciser, mais qui n’en pai’ait pas moins exclure la perspective d’une longue durée de l’œuvre terrestre du Christ. Cette diversité de vues est au premier abord déconcertante, surtout si l’on admet que ce groupe d’écrits non seulement provient d’un même milieu, mais encore est l’œuvre d’un auteur unique, ainsi que nous le faisons. Les remarques suivantes pai’aissent de nature à jeter quelque lumière sur le problème. Dans l’Apocalypse, nous retrouvons, transformée, l)ien entendu, par l’illumination prophétique dont bénéficie l’auteur et inscrite dans la perspective nouvelle ouverte par l’Evangile, quelque chose de la tradition eschatologique juive, abondante et compliquée. Le Quatrième Evangile, par contre, annonce le dessein de faire revivre la divine figure du Fils de Dieu devenu homme et de reproduire l’infinie richesse de son enseignement historique. J’oserai avancer que le contenu de cet évangile est peut-être beaucoup plus proche que certains ne le pensent de la pensée personnelle du Maître et que nous avons précisément dans le peu de place qu’y tient l’eschatologie un indice positif de cette proximité. Après avoir étudié quelques-uns des passages d’aspect eschatologique que renferme le Quatrième Evangile et constaté qu’ils ne l’étaient qu’en apparence, M. von Dobschiitz conclut : « Ceci se rapproche beaucoup de ce que nous trouvons dans l’enseignement de Jésus (tel qu’il vient de le définir) : eschatologie transmuée avec un élément additionnel d’eschatologie réelle. » Et plus loin, après avoir posé les restrictions qu’il estime nécessaires et signalé le mysticisme plus accentué de la doctrine johannique, il poursuit : « L’intériorité mystique de S. Jean est beaucoup plus proche de la vraie pensée de Jésus que cette extension et ce renforcement de ses déclarations eschatologiques que nous avons remarqués en certains passages des évangilessynoptiques, spécialementdeS. Mattliieu… » (Article cité, Exp. Times, p. ^ib s.) M. von Dol)schiitz va un peu loin et il ne iaut minimiser l’importance de l’élément eschatologique ni dans le Quatrième Evangile, ni dans l’enseignement de Jésus. Mais ses remarques demeurent intéressantes. Pour ce qui est des épîtres johanniques, elles traduisent ce que déjà nous avons quelques raisons de regarder comme l’opinion propre des premières communautés chrétiennes. Et cette diversité que présentent, en matière d’eschatologie, les écrits johanniques, pourrait être l’indice positif de l’extrême incertitude qui régnait au fond, touchant l’avenir et l’époque de la parousie, parmi les chrétiens de l’âge apostolique et parmi les apôtres eux-mêmes.

B. Epitres de S. Pierre et de S. Jacques. — La

/ » Pétri suppose que la fin du monde et la parousie, qui en est le prélude immédiat, sont proches (iv, 7). Peut-être même l’auteur espère-t-il que ses correspondants en seront témoins (i, 5 ss.). Cependant ce n’est pas clair. Le passage iv, i ;  ; , qui pourrait paraître accentuer l’imminence de la parousie, tourne à l’eschatologie transmuée, c’est-à-dire applique des notions ou termes eschatologiques à des faits de l’ordre historique ou purement spirituel et mystique. Lorsqu’au ciiapitre I, 10-12 l’auteur semble vouloir donner les sources générales de sa doctrine eschatologique, nous le voyons alléguer les prophètes d’Israël et les prédicateurs de l’EAangile instruits par l’Esprit-Saint. Aucune référence directe à l’enseignement historique de Jésus.

L’état d’esprit n’est plus tout à fait le même dans la //a Pétri. Sans doute on n’y abandonne nullement la croyance à la réalité de la parousie. On la défend même en termes énergiques contre certains sceptiques, des « moqueurs » (m, i-io), dont l’apparition annoncée serait plutôt le signe qu’elle approche. Car, et c’est un fait remarquable, l’idée même de sa proximité est maintenue et des conseils sont donnés sur la manière dont on doit l’attendre et s’y préparer (m, 12). Seulement, on nous prévient (m, 8) que cette proximité est très relative, attendu que « devant le Seigneur un jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour ». Cela rend songeur, d’autant qu’à ne considérer du moins que ces variations, il n"est pas du tout évident que la // » Pétri ne puisse être du même auteur et à peu. près de la même époque que la / » Pétri. C’est à se demander ce que pouvaient bien représenter au juste pour les premières générations chrétiennes ces annonces relatives à la parousie, annonces si catégoriques et si précises en apparence, mais que nous entrevoyons, à certains moments, si incertaines au fond et si indéterminées. Nous découvrons même qu’au sentiment de l’auteur de la //3 Pétri, la date de la parousie n’est pas arrêtée de façon absolue, inconditionnelle, dans les conseils divins. Elle paraît à tout le moins susceptible d’être avancée (m, 12). Cette manière de voir rappelle singulièrement les idées qui avaient cours parmi les Juifs contemporains sur le retard apporté à l’envoi du Messie, sxu’ses causes et ses remèdes. L’influence de la pensée juive sur l’eschatologie chrétienne se laisse entrevoir une fois de plus (cf. Prat, op. et loco supra laud.). Les autorités que l’auteur allègue en confii-mation de sa doctrine eschatologique, semblent les mêmes que dans la première lettre. Ici non plus on n’en appelle pas aux propres déclarations de Jésus sans intermédiaire.

L’cpître de S. Jacques (v, 7-9) déclare que « l’avènement du Seigneur », c’est-à-dire apparemment la parousie, est « proche w, que « le juge est à la porte ». Elle ne précise pas autrement, mais, selon l’usage, prend cette donnée comme base d’exhortations morales et d’encouragements à la patience.

C. Epitres de S. Paul. — L’eschatologie de S. Paul, sur laquelle nous sommes mieux renseignés grâce aux écrits plus étendus et plus nombreux de l’apôtre, a fait l’objet d’un grand nombre de travaux. L’un des plus récents et aussi des meilleurs est celui du professeur catholique F. Tillmann, de Bonn : Die Wiederkunft Christi nach den PauUnischen Briefen (Biblische Sludien, Bd. XIV, Heft 1-2), 1909. L’accord tend à s’établir entre catholiques sur les faits essentiels. S. Paul, et cela jusqu’à la fin de sa carrière, regarde la fin du monde comme prochaine (I Th.,

IV, 16-17 ; I ^’"’"^’"' 29"3’ ; ^’^’51 ; XVI, 22 ; II Cor.,

V, i-io ; Boni., xiii, ii-14 ; Philip., ir, 6 ; Héb., x, 87, etc. Cependant l’on pourrait être tenté de reconnaî-