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ÉVANGILES CANONIQUES

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de vinaigre, Jean, xix, 2g. L’agneau devait être mangé intact, Exod., xii, ^6 de là la mention du crurifragium épargné à Jésus et le rappel de la prophétie : M On ne lui brisera pas d’os », Jean, xix, 36. Enfin, il était prescrit de manger la pàque sur place, Exod., XII, 46 : de là cette indication, Jean, xix, 4', que Jésus fut enseveli « dans l’endroit où il avait été crucitié ». Strauss, Nouv. vie de Jésus, t. II, p. 296 sq. ; A. RiiviLLE, Jésus de Nazai-eth, t. II, p. 347-348 ; J. RÉVILLE, Le quatr, Evang., p. 290 ; Schmiedel, art. John, col. 3526-2527 ; JuELicHER, Einleit., p. 878-379 ; LoisY, /.e quatr. Evang., p. 67-69, 868 sq. ; Scott, Euurtli Gospel, p. 223-224 1 Holtzmann-B.4.uer, Evang. Joli., p. 285.

268. 3° Critique de cette hypothèse. — La discussion logique de cette hypothèse demande que les allusions au rituel de la Pàque, et l’adaptation qui concerne l’iieure de la mort, soient examinées avant la moditication censée apportée au jour. Déjà, en effet, le Christ synoptique, en instituant le mémorial de son immolation au cours du repas pascal, célébré le 14 nisan, et en mourant au jour de la solennité de la Pàque, le 15, apparaissait assez manifestement comme la Pàque nouvelle et véritable : I Cor., v, 7 ; cf. I Pier., I, 19. Si le quatrième évangéliste a voulu accentuer encore le rapport typologique, il n’a pas dû se borner à transporter la mort du 15 au 14, mais, comme on le pense en effet, il a dû la faire coïncider avec l’heure de l’immolation de l’ag-neau et orner son récit d’allusions sullisamment claires au rituel pascal.

// n’y a pas d’allusions claires au rituel pascal. — Or, tout d’abord, ces allusions claires au rituel pascal manquent véritablement. — Dans l’Exode, il est question d’un balai d’hysope, que l’on trempe dans le sang de l’agneau, pour en asperger les portes des maisons juives ; le quatrième évangéliste parle d’une tige d’hysope, à laquelle on fixe une éponge remplie de vinaigre, que l’on approche de la bouche du Sauveur. Il n’j' a pas d’analogie possible entre les deux situations. Rien n’autorise à croire à une intention symbolique. Le détail se comprend, au contraire, fort bien dans la réalité. L’iiysopede notre Evangile est représentée comme une tige desséchée et rigide : elle correspond à ce que les Synoptiques nomment

« un roseau », Marc, xv, 36 = Matth., xxvii, 48. La

croix de Jésus était peu élevée, et une tige de cette sorte pouvait aisément porter aux lèvres du Sauveur la petite éponge qui servait à fermer le goulot du vase où était la boisson vinaigrée des soldats.

A la suite du coup de lance, nous lisons, xix, 36 :

« Ces choses arrivèrent pour que fût accomplie

l’Ecritxire : On ne lui brisera pas d’os. Et une autre Eci’iture dit encore : Ils regarderont vers celui qu’ils ont percé. » Il n’est pas vraisemblable que le rappel de la première prophétie soit destiné à souligner un rapport du Christ avec l’agneau pascal : l’auteur ne l’aurait pas fait suivre d’une autre citation, prise de Zachar., xii, 10, et quin’arien à faire avec cette idée. Le coup de lance porté au côté de Jésus déjà mort ne peut d’ailleurs correspondre au coup de couteau appliqué à la gorge de l’agneau pour l’immoler. Si donc l'évangéliste entend, par son premier texte, se référer îiExod., xii, 46, il doit avoir en vue, non un rapport typologique, mais un simple rapport prophétique, comme dans le cas de sa seconde citation. Il semble d’ailleurs plus probable qu’il vise le texte du Ps. xxxiv, 21, où il est dit que les os des justes ne seront point broyés.

Enfin, il paraît évident que la mention de la proximité du sépulcre a uniquement pour but d’expliquer comment, pressé par l’imminence du sabbat, on choisit cet endroit pour y déposer le corps de Jésus, XIX, 42.

S63. L’heure de la mort du Christ ne coïncide pas avec celle de l’immolation de l’agneau. — L'évangéliste est encore moins préoccupé de faire coïncider l’heure de la mort du Christ avec celle de l’immolation de la pàque. Il n’a pas un mot pour insinuer qu’elle soit arrivée sur le tard. Quand il mentionne la démarche des Juifs pour l’enlèvement des corps, il n’indique aucunement que cette démarche ait eu lieu sitôt après le dernier soupir de Jésus et peu avant le commencement du sabbat. Au contraire, il place, entre la mort du Sauveur et l’ouverture du sabbat, un certain nombre de faits qui semblent réclamer un temps assez notaJile, xix, 38 sq. Enfin, on a de bonnes raisons de croire que l'évangéliste compte habituellement les heures à la façon romaine : 1, 89 ; IV, 6, comparé à Gen., xxiv, 1 1 ; iv, (52) ; la sixième heure, à laquelle il fait terminer le procès devant Pilate, peut donc être six heures du malin : on a ainsi un accord exact avec les Synoptiques, où le crucifiement a lieu à neuf heures, le commencement des ténèbres à midi, la mort à trois heures.

364. Le jour de la moi-t n’est pas anticipé au l’i nisan. — Dans ces conditions, il devient invraisemblable que notre auteur se soit soucié d’anticiper tendancieusement le jour de la mort. — Certains auteurs ont pensé que le quatrième évangéliste a^ait réellement fixé la mort de Jésus au 14 nisan, et qu’il faudrait ramener, d’une façon ou d’une autre, à cette date les données des Synoptiques. Maldonat, In Matth., XXVI, 2 ; dom Calmet, L’Evangile de S. Jean, 1729, p. 344 ; B. Weiss, Das Johannes-Evangelium, g^ éd., 1902, p. 379 ; F. Godet, Comment, sur l’Evang. de S. Jean, 1881, t. III, ]>. 606 sq. ; P. Schanz, Conimentar ither das Evang. des heil. Johannes, 1885, p. 544 sq. ; O. Holtzmann, Leben Jesu, 1901, p. 35, 309, 312 ; Th. Calmes, L’Evang. selon S. Jean, p. 36437a ; W. Sanday, The criticism of the fourth Gospel, 1905, p. 155 ; E. Jacquier, Hist. des livres du N. T., t. IV, igo8, p. 228. — Mais il est bien difficile de contester que la dernière Cène, chez les Synoptiques, soit le repas pascal, et il est assez arbitraire de supposer que Jésus aura célébré la Pàque avec ses disciples, un autre jour que les Juifs. Au contraire, les données du quatrième Evangile peuvent sans trop de peine cadrer avec l’indication du 15 nisan, et l’on a même des raisons positives de croire qu’en réalité elles se rapportent à cette date.

268. La mention chronologique qui introduit la dernière Cène, xiii, i : « Avant la fête de la Pàque », convient très bien au jeudi 14 nisan. L’auteur peut l’employer même à propos du repas pris sur le soir, dès lors qu’il compte les jours à la manière romaine d’Asie Mineure. Au point de vue romain, le jour de la fête est bien celui qui suivra le prochain lever du soleil, le vendredi 15. Ce qui le confirme, c’est que l'évangéliste rattache très expressément à ce dernier souper la dénonciation du traître, et par là l’identifie nettement à la dernière Cène synoptique : or celle-ci est le repas pascal du 14 nisan, et elle était connue comme telle dans la tradition primitive : I Cor., v, 7 ;

XI, 23-20.

Le jour où meurt Jésus est appelé « préparation de la Pàque », xix. 14. Mais on n’a jamais désigné ainsi chez les Juifs les préparatifs de la solennité pascale ou la veille de la Pàque ; cf. Bochart, Hierozoicon, t. I, De agno paschali, p. 667. Tout le contexte montre que l’attention de l’auteur est portée sur la circonstance de la a Préparation du sabbat » ou vendredi, appelé couramment « la Préparation » ; XIX, 31, 41-42 ; cf. Marc, s.v, ^2 ; iMatth., xxvii, 62 : Luc, xxni, 54 ; Martyrium S. Polycarpi, vii, l. II est donc simplement question de la Préparation ou du vendredi qui se trouvait dans l’octave pascale et.