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ÉVANGILES CANONIQUES

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son nom, dans le milieu même où il était si aisé de vérifier les choses, des lettres adressées à des communautés connues et à des personnes déterminées ? Est-il d’ailleurs possible de songer à une composition apocryphe pour de simples billets, si peu tendancieux, presque entièrement composés de détails personnels, très vivants ? II Jean, 12-13 ; 1Il Jean, 9-10,

I2-l4.

Les Epitres johanniques sont donc en réalité du Presbytre, témoin oculaire du Seigneur, sous le patronage duquel elles sont mises, c’est-à-dire de l’apôtre saint Jean. Tel est donc aussi le cas du quatrième Evangile, qui a le même auteur.

184- Conclusion. — Rassemblons les données acquises tant par la critique interne du livre que par la critique externe.

Le quatrième Evangile, publié en Asie Mineure à la fin du i" siècle, prétend avoir pour auteur l’apôtre .lean, censé bien connu de ses lecteurs. Toute la tradition, même la tradition asiate, du ii*’siècle, l’a tenu précisément pour l’œuvre de cet apôtre. — De fait, la façon délicate dont l’évangéliste s’identifie à saint Jean, bien difierente de la manière ordinaire des faussaires, est de nature à inspirer confiance. D’autre part, il est historiquement démontré que Jean l’apôtre résidait à Ephèse vers l’époque à laquelle remonte l’ouvrage qu’on lui attribue. Il n’est pas moins certain que le rédacteur de l’Evangile est un Juif, et ([u’il connaît intimement la Palestine ancienne où s’est passée la vie de Jésus. Enfin, notre écrit est tle la même main que les Ej^itres johanniques, et celles-ci se réclament de l’apôtre saint Jean, sans qu’on puisse faire l’hypothèse d’une fiction littéraire.

Quiconque rapprochera ces faits les uns des autres et en pèsera la signification, ne pourra moins faire, semble-t-il, que d’être convaincu de l’authenticité joliannique de notre document.

188. Opinions des critiques. — Cette authenticité a été niée d’une façon absolue par Baur, Kritische Untersuchangen ùher die kanonischen Evangelien, 18^7 ; Strauss, Das Leben Jesu fur das deiitsc /ie Volk bearbeitet, 1864 ; et à leur suite, par J. RÉviLLK, Le quatrième Evangile, son origine et sa valeur historique, 1901, 2’éd., 1902 ; P. W. Schmie-DEL, art. John, son of Zebedee, dans l’Encycl. biblica, t. II, 1901, col. 2501l-2562 ; A. Loisy, Le quatriinne E’angile, igo3. D’ajjrès ces critiques, le quatrième Evangile n’aurait aucun rapport d’origine avec l’apôtre saint Jean, qui ne serait jamais venu en Asie (n°’227, 229). — Le plus grand noinl)re des critiques libéraux reconnaissent à notre document une authenticité partielle : il contiendrait un fond traditionnel, plus ou moins considérable, remontant au fils de Zébédée. Ainsi Renax, Weizsæcker, Harnack, Moffatt, p. Gardxer, E. X. Abbott, JuELicHER, Heitmueller, ctc. (n° 230). — Quelquesuns vont jusqu’à supposer une sorte de document primitif, qui aurait été rédigé par l’apôtre, retouché ensuite et complété par un de ses disciples : Wendt, Soltau, Briggs (no 231).

Les critiques catholiques tiennent généralement pour l’authenticité proprement dite de notre Evangile. P. ScHANz, Esangeliani des heiligen Johannes, 1885 ; CoRNKLY, Ilistorica et critica Introductio in U. T. libros sacros. Lntrod. spec., t. 111, 1886 ; Knabexbauer, Comment, in Evangelium secundum loaniiem, 1897 ; L. C. FiLLioN, Evangile selon saint Jean, 1887 ; E. Maxgenot, art. Jean (Evangile de S.), dans le Dicf. de la Bible, t. III, 1908, col. 1167-1172 ; P. Batiffol, Six leçons sur les Evangiles, 1897 ; Th. Calmes, IJEvangile selon saint Jean, 190/4 ; Fouard, Saint

Jean et la fin de l’âge apostolique, 1904 ; A. Nouvelle, L’authenticité du ÎV^ Evangile et la thèse de M. Loisy, 1906 ; C. Chauvin, Les idées de M. Loisy sur le quatrième Evangile, 1906 ; M. Lepin, L origine du quatrième Evangile, 1907 ; E. Jacquier, Histoire des Livres du y. T., t. IV, 1908 ; A. Brassac, J/a « f<eZ biblique, t. III, 1910. — Cette authenticité est également admise par nombre d’auteurs protestants : F. Godet, Comment, sur l’Evangile de saint Jean, 1881, 4* éd., 1904 ; B. Weiss, Einleitung in das 2Y. T., 3’éd., 1897 ; Uas Johannes-Evangeliuni, 9’éd., 1902 ; A. Resch, jiussercanonische Paralleltexte zu den Evangelien, iv Heft : Paralleltexte zu Johannes, dans les Texte und Untersuchangen, t. X, part. 4> 1896 ; Th. Zahn, Einleitung in das X. T., 2 « éd., t. II, 1900 ; Das Evangelium des Johannes, 1908 ; Reynolds, art. John (Gospel of), dans le Bict. of the Bible, t. II, 1899 ; V. Stanton, The Gospels as historical Documents, t. 1, 1908 ; J. Drummond, An Inquiiy into the Character and Authorship of the fourth Gospel, 1908 ; W. Sanday’, The Criticism ofthe fourth Gospel, 1900.

186. A consulter. — Fouard, Nouvelle, Chauvin, Jacquier, Brassac, Lepix, op. cit. (n" 188).


II. — VALEUR HISTORIQUE DES TROIS PREMIERS EVANGILES

L’origine de nos Evangiles une fois déterminée, il devient facile d’apprécier leur valeur historique.

Nous traiterons la question, d’abord pour les trois Synoptiques, dont la condition, au point de vue documentaire, est à peu près semblable, ensuite pour le quatrième Evangile, dont la teneur est sensiblement différente.

Pour les Synoptiques mêmes, on peut étudier leur historicité : i" quant à la substance, ou à l’ensemble du contenu, telle qu’elle est admise par la généralité des critiques ; 2" quant à leurs parties spéciales, c’est-à-dire à leurs éléments surnaturels, telle qu’elle fait ijIus communément difficulté.

I. Valeur historique des Synoptiques pour l’ensemble du contenu

Lorsqu’on veut juger la valeur historique d’un ouvrage, on se pose généralement deux questions : 1° L’auteur est-il sincère, veut-il loyalement dire la vérité ? 2° Est-il exactement renseigné sur les faits qu’il rapporte ? Dans la mesure où l’on se rend compte de cette bonne foi et de cette bonne information, on j prononce que le témoignage de l’écrivain vaut en 1 histoire.

Or, quand il s’agit de nos trois pi’emiers Evangiles, on peut se convaincre : 1° que leurs auteurs sont d’une loyauté au-dessus de tout soupçon ; 2° qu’ils sont, dans l’ensemble, parfaitement informés.

I. — Nos évangélistes sont sincères

187. Preuve générale. — La sincérité de nos évangélistes ressort avec évidence de l’examen de leurs écrits. Quiconque lit les Evangiles est frappé de. la simplicité et de la naïveté du récit. On se sent en 1 présence, non de compositions artificielles, mais de I chroniques loyales, où les auteurs consignent ce qu’ils savent, ce qu’ils ont appris ou ce qu’ils ont vii, sans artifice et sans commentaire. C’est un ton de fran-i chise qui ne peut se définir, mais qui inspire tout naturellement confiance.

188. Preuves particulières. — Cette impression devient une persuasion raisonnée, si l’on porte l’examen de la sincérité des évangélistes sur plusieurs