Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/849

Cette page n’a pas encore été corrigée

1681

EVANGILES CANONIQUES

1682

l)ien plulôl à chercher parmi « les fils de Zébédée » : si le bien-aiiué, en effet, est un de ces deux frères, on s’explique sans peine que l’auteur, au lieu d’employer la formule singulière : a le- disciple que Jésus aimait et son frère Jacques », ait préféré dire simplement :

« les lils de Zébédée ».

179. 4" // n’est autre que l’apôtre Jean. — Entre Jacques et Jean le choix ne saurait être douteux. Jacques périt de bonne heure, par ordre d’Hérode Agrippa, Jet., xii, 2. Dans l’histoire des premiers jours de l’Eglise, c’est Jean qui se trouve particulièrement associé à Pierre, comme si déjà leur sort avait été étroitement uni par le Maître : Act., i, 13 ; iii, i, 3. 13 ; IV, 13, 19 ; VIII, 14 ; cf. GaL.u.^.

Ainsi l’on est conduit, d’une manière qui semble rigoureuse, à allirmer que, dans la pensée du quatrième évangéliste, le l)ien-aiiné est identique au plus jeune des lils de Zébédée, à Tapùtre saint Jean.

Cette conclusion reçoit une confirmation décisive du fait que, dans le dernier chapitre, le bien-aimé est identifié clairement au fameux Jean d’Ephèse.ce qui équivaut à son identification expresse avec l’apôtre saint Jean. RE ?fAN, Vie de Jésus, p. lxv, lxvii ; LEglise chrétienne, p. 52 ; Zes Evangiles, p. 429 ; L’Antéchrist, p. 568 ; Harnack, Chronologie, t. 1, p. 6~5 ; Abbott, art. Gospels, dans VEncycl. hihl., t. II, col. 1794.

180. 3" On ne saurait suspecter la vérité de cette identlûcation. — L’auteur du quatrième Evangile s’identifie à l’apôtre saint Jean. Peut-on voir dans cette identification l’artifice d’un faussaire ? Cela semble impossible.

Les mêmes difficultés qui s’opposent à ce que les éditeurs du livre aient fait passer indiiment l’ouvrage pour l’œuvre de Jean d’Ephèse, identifié à Jean l’apôtre (n" 146), empêchent de supposer que l’évangéliste, s’il n’était pas en réalité cet apôtre, censé bien connu de ses lecteurs asiates, ait tenté de se faire prendre pour lui, et y ait réussi si parfaitement. Il ne s’agit pas, qu’on le remarque l>ien, d’une production apocryi)he quelconque, qui aurait été j)ubliée sous le couvert d’un personnage totalement étranger à la région, dont nul en cet endroit n’aurait connu au juste l’activité littéraire. Il s’agit d’un Evangile, présenté sous le nom de l’apôtre Jean, à ces mêmes chrétiens d’Ephèse qui ont au et entendu le fils de Zéliédée, qui savent très l)ien et peuvent très facilement contrôler si, oui ou non, l’apôtre a composé et transmis cet écrit. Dans ce milieu et à cette époque, il ne semble pas qu’on puisse concevoir la tentative audacieuse qu’il faudrait supposer, et encore moins son succès.

Ce n’est pas tout. L’iiypothèse de la fiction est encore (contredite par la façon extrêmement discrète dont se présente l’identification de l’évangéliste avec l’apôtre témoin. Les auteurs des Evangiles apocryphes ont soin de mettre en évidence ia marque de l’origine qu’ils veulent attribuer à leurs écrits, et en quelque sorte la signature des apôtres sous les noms desquels ils prétendent les faire passer (cf. n° 119). Un faussaire qui aurait voulu présenter le lils de Zébédée comme auteur de l’Evangile, ne l’aurait pas fait a])paraître dans le récit d’une manière si constamuu’ut objective ; encore moins comprendrait-on de sa pjirt la façon si délicate dont les passages xix, 35 et XXI, 2/1 laissent transparaître l’attestation du discii)lo témoin.

Le témoignage du livre ne saurait donc cire suspecté. L’évangéliste est en réalité celui qu’il prétend être : le disciple aimé de Jésus, l’apôtre saint Jean.

181. CoM-iKMATiH. — Le témoignage des Epî tres johanniques. — Notre conclusion se trouve confirmée par ce que nous pouvons établir de l’origine des Epîtres johanniques.

Les Epitres johanniques sont du même auteur que le quatrième Évangile. — Les Epîtres sont sfirement de la même main que le quatrième Evangile, tant de part et d’autre les idées sont semblables, les particularités littéraires identiques : mêmes antithèses, de Dieu et du monde, du Christ et du diable, de la vérité et du mensonge, de l’amour et de la haine, de la lumière et des ténèbres, de la vie et de la mort ; mêmes associations d’idées, très spéciales (comparer I Jean, i, 6, avec Jean, iii, 21 ; I Jean, 11, l^, avec Jean, xiv, 21, 23 ; I Jean, iii, 16, avec Jean, xv, 13 ;

I Jean, v, 3, avec Jean, xiv, 15) ; même manière de déAelopper l’idée en une série de propositions courtes et incisives, en forme de parallélisme explicatif, ou plus souvent antithétique (comparer I Jean, 11, 10, aec Jean, xi, 10 ; I Jean, 11, 23, avec Jean, v, 28 ; lJean, v, 12, avec Jean, iii, 36) ; même habitude de commencer une phrase par un pronom démonstratif et de la relier à une proposition subordonnée par une conjonction (comparer I /ea « , iii, 8, 11, 16, 28, avec Jean, iii, 19, etc.) ; même façon de revenir en arrière sur les membres antérieurs d’une phrase, par une série de reprises qui en mettent en relief les divers points de vue (comparer I Jean, iii, i-io, avcc Jean, xv, 12-17). — L’unité d’auteur de ces écrits est admise des critiques libéraux les plus réputés : Renax, Vie de Jésus, p. 538 ; L’Eglise chrétienne, p. 50-51, 7g ; Harnack, Chronologie, t. I, p. 658, n. 2 ; Abbott, art. Gospels, dans VEncyl. hihl., t. II, col. 1818 ; JuKLiciiER, Einleitung, p. 194-196, 199-200.

188. Or, elles sont l’œuvre de l’apôtre saint Jean.

— L’auteur de la I" Epître se donne pour un témoin oculaire du Christ : I Jean, i, i-5 ; iv, 14. Dans les deux autres, il se nomme « le Presbytre » ou « l’Ancien » par excellence : II Jean, i ; III Jean, i. Etant donné le milieu asiatique où ces Epîtres ont été publiées, ce Presbytre ne peut être, semble-t-il, que l’illustre Ancien d’Ephèse connu sous le nom de Jean, et que nous savons identique à l’apôtre de ce nom.

183. Impossible ici encore de supposer une fiction littéraire. — La façon dont l’auteur de la 1"= Epilre se borne à rappeler, dans les premiers Aersets, sa qualité de témoin du Verbe de a ie, n’est pas d’un écriA’ain qui aurait a-ouIu se faire prendre pour Jean l’apôtre ; et comment croire que le ton si pénétrant, de tendresse paternelle et de douce autorité, qui caractérise cette Epître, soit après tout l’œuvre d’un faussaire ?

L’hypothèse est encore moins soutenable en ce qui concerne les deux petites Epîtres. — Ce sont, en effet, des lettres adressées à des destinataires précis. A supposer qu’il faille Aoir, dans la « Dame Elue », à laquelle est écrite la seconde, le qualificatif symbolique d’une chrétienté, il ne s’agit jjas d’une chrétienté purement idéale, mais d’une communauté concrète et bien déterminée, comme le montrent les détails du A-. 12, où l’auteur exprime son espoir de Aisiler bientôt en personne ceux à qui il se contente pour le moment d’écrire. Il n’est d’ailleurs aucunement établi qu’il s’agisse d’une Eglise : la mention des <i fils » de la Dame Elue et des lils de sa ( sœur »,

II Jean, i-13, semble s’opposer à une telle interprétation. Il est encore plus difficile de Aoir dans Gains, le destinataire de la troisième Epître, un jjersonnage typique ou imaginaire : au A’. 9, Gains paraît expressément distingué de l’Eglise ; au A’. 1 4, les salutations sont tout à fait personnelles. — Or, peut-on croire que des lettres ainsi conçues et ainsi adressées soient des faux littéraires ? Qui donc aurait osé usurper l’autorité du fameux Presbjtre, en publiant sous