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ÉVANGILES CANONIQUES

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Mais il ne faut pas perdre de vue qu’au préalalile’il est nécessaire d’établir aussi parfaitement que possible le texte authentique de ces écrivains, dont nous ne possédons plus que des manuscrits postérieurs. La difticulté de restitution est toute spéciale en ce qui concerne les citations bibliques : grande a été la tentation des copistes de remplacer telle ou telle citation oïiginale par un texte que consacrait un usage relativement récent. D’autre part, il faut bien dire que les Pères n’ont pas toujours voulu faire des citations littérales ; souvent ils ont cité de mémoire, par à peu près, ou bien ont fusionné plusieurs passages analogues.

38.2° Résultats. Les principales éditions critiques.

— L’établissement du plus ancien texte des Evangiles exige donc un travail extrêmement long et minutieux, exécuté avec un esprit de discernement très exercé et une sagacité consommée. Les éditions critiques, rédigées plus ou moins parfaitement d’après ces principes, sont déjà nombreuses aujourd’hui, sans qu’aucune puisse néanmoins prétendre à être définitive.

Les plus remarquables sont, chez les protestants, celles de Griesbach (1774-177^ et 1796-1806), de Lachmax.n (1842-1860), les nombreuses éditions de TiscHEXDORF (1841-1872), cellcs pIus récentes de Westcott et HoRT, 7’lie A’ew Testament in the original Greek, 1896, de de Weymouth, The résultant Greek Testament (1886 ; 3’éd., 1906), de B. Weiss, Das Neue Testament (i 894-1 900). — Parmi les meilleures éditions catholiques, on peut citer celles de ScHOLz (1830-1838), de IIeithmayr (1847-1861), de Braxdscheid (1898, 1906-1907), de Hetzenauer (1896).

— Y, &Novum Testamentum græce, publié par Nestlé, 8’éd., 1910, a été établi à l’aide des textes critiques, estimés par lui les plus parfaits, savoir : celui de Tischendorf, d’après la 3" édition mineure publiée par Oscar de Gebhardt, 1896, ceux de Westcott-Hort, de De Weymouth et de B. Weiss.

39. II. AUTIIEXTICITÉ GÉNÉRALE DU TEXTE GREC

ACTUEL. — Detoutesles recherches effectuées sur lesanciens manuscrits, les versions, les écrivains ecclésiastiques, et dont les résultats ont été consignés dans ces éditions critiques, il résulte d’abord que le texte grec du Nouveau Testament ne nous est pas parvenu sous une forme unique, invariable, qui en garantirait la fidélité intégrale et absolue. Nombreuses sont les variantes d’auteur à auteur, de manuscrit à manuscrit. Et cela se conçoit aisément. A moins d’un miracle, auquel Dieu n’était pas tenu, il était impossible que le texte passât par un si grand nombre de mains sans être altéré dans ses détails. Les copistes sont plus ou moins soigneux, plus ou moins habiles : ils omettent un mot, parfois une ligne, les changent de place, écrivent un nom pour un autre, surtout quand ils ont affaire à un texte mal écrit, ou en mauvais état ; il leur arrive même de corriger volontairement leur texte, de substituer à un passage qu’ils jugent obscur, à une expression qu’ils estiment vieillie, des termes qui leur semblent meilleurs ; ils vont jusqu’à amender le texte sous l’influence de préoccupations doctrinales ou de préjugés personnels.

Mais un fait non moins certain, c’est que les corrections tendancieuses sont rares et d’ordinaire facilement reconnaissables ; le plus grand nombre des variantes sont sans importance. La plupart affectent de menus détails, qui n’intéressent pas le sens véritable des textes. Quand elles modifient le sens, il est généralement aisé de distinguer, à la comparaison, celles qui doivent reproduire le sens normal et authentique de celles qui sont exceptionnelles et fautives. Pour se rendre compte du caractère secondaire de la plupart des variantes, il sufiit de mettre en

parallèle, d’un côté les textes critiques les plus réputés, de l’autre le texte reçu, ou notre Vulgate latine : on verra que les passages dont l’authenticité se trouve douteuse ou qui ont subi une modification de quelque importance, sont réellement rares.

A la vérité, les recherches de la critique textuelle ne peuvent aujourd’hui atteindre le texte des Evangiles tel qu’il était aux premières années de sa diffusion, mais seulement à partir du moment où il est cité, avec abondance et des garanties suffisantes d’exactitude littérale, par les écrivains ecclésiastiques, c’est-à-dire à partir de la fin du 11’siècle. Mais l’on peut être assuré que cette forme, la plus ancienne qu’ait pu rétablir la critique, correspond elle-même très étroitement au texte sorti de la plume de nos écrivains sacrés.

Ce qui donne, en effet, pleine confiance à la fidélité de cette reproduction, c’est, d’une part, le peu de temps écoulé entre l’époque de saint Irénée, de Clément d’Alexandrie, de saint Cyprien, et le moment où ont paru nos Evangiles : les transcriptions de ces écrits ont dû être relativement peu noml)reuses dans cette période primitive ; les chances d’altération par les copistes en sont diminuées d’autant. — C’est, d’autre part, le culte dont l’Eglise a de bonne heure entouré nos documents : vers 150, saint Justin déclare que déjà, dans la lecture des assemblées chrétiennes du dimanche, les Evangiles sont placés à l’égal des Prophètes (n° 9) ; dès l’an 130, sinon auparavant, l’Epitre dite de Barnabe introduit une citation du premier Evangile par la formule réservée aux textes sacrés : « L’Ecriture dit » (n° 15). Cette estime de nos écrits a sûrement contribué à en faire conserver religieusement le texte.

40. III. Principaux passages dont l’authenticité EST discutée. — Les passages un peu importants dont l’authenticité a été mise en question, à cause des variantes que présentent à leur sujet les manuscrits ou les anciens auteurs, sont d’abord trois fragments, contestés par les protestants du xvi’siècle, et que le concile de Trente paraît avoir a isés spécialement lorsqu’il a prescrit de tenir pour sacrés et canoniques tous les livres de l’Ecriture, avec toutes leurs parties : 1°) la finale de saint Marc, 2°) le passage sur la sueur de sang et l’ange de l’agonie, dans saint Luc, 3") l’épisode de la femme adultère, dans saint Jean.

Ce sontensuite d’autres fragments assez menus, tels que, en saint Matthieu, l’ordre de baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ; en saint Luc, l’attribution du Magnificat à Marie ; en saint Jean, les versets relatifs à l’ange de la piscine probatique.

41. Finale de saint Marc, XVI, 9-20. — Au point de vue de la critique externe. — La finale canonique de saint Marc manque dans un certain nombre de manuscrits grecs anciens, surtout dans K et B, du iv siècle, et dans un manuscrit de la Vulgate antérieur à saint Jérôme, le Codex bobiensis, k, du v’siècle, qui la remplace par une autre finale plus courte. Elle ne figure pas dans la version arménienne, ni dans 1.1 ersion syriaque du Sinaï. Au témoignage d’Eusèbe, Quæst. ad Mar., i, elle faisait déjà défaut dans un grand nombre de manuscrits de son temps.

— Cependant, on la trouve dans les manuscrits onciaux les plus anciens, autres que N et B. Saint Jérôme l’a conservée dans sa Vulgate. Tous les manuscrits de la Vulgate préhiéronymienne, à l’exception de k, la contiennent ; et de même les anciennes versions syriaques, Peschitto et Curetonienne. Enfin, elle était connue, au 11’siècle, de saint Irénée, Contra Hæres., III, x, 6, de Tatien, qui lui a donné place dans son Diatessaron, de saint