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EPIGRAPHIE

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nisme pénétra là où riiellénisiue avait échoué ; combien de jieuples barbares sont venus à la foi sans passer par la culture grecque ! L’iiellénisation seconda l’apostolat, mais à elle seule elle n’explique rien. Pour le détail voir Harnagk, Mission, II, p. 70-262 et un excellent opuscule de J. Rivière, La propagation du Christianisme dans les trois premiers siècles d’après les conclusions de M. Harnack, Paris, 190^. Le Blaxt (Recueil, pi. 98, cf. p. xli-xliii), a dressé pour la Gaule une carte épii^rapliique : la densité et î’àge des inscriptions rendent sensiljles, en une certaine manière, les étapes de la cliristianisation des provinces gauloises. Histoire ? non sans doute, pas plus que les arasements de murailles que la pioche du fouilleur met au jour ne sont le monument antique ; mais CCS pierres dispersées ont un sens i)Our qui sait les interroger : les unes marquent l’orientation d’une muraille, un détail révèle Tàge de lédi-Gce, un autre sa destination, un autre quelque chose de son décor. De même, les milliers d’inscriptions chrétiennes qui surgissent dans toute l’étendue de l’empire romain, de l’Espagne à l’Euxin et à la Mésopotamie, de la Bretagne et de la Germanie au limes africain et au Soudan, ne nous disent pas toute Thistoire de la diilusion de l’Eglise ; mais l’une nous révèle une date, une autre une église jusqu’ici inconnue, celle-ci un évêque, celle-là un saint, celle-ci le nom d’un fidèle, cette autre celui d’un martyr, d’autres enfin un acte de foi ou une invocation qui se répète d’un bout à l’autre du monde traA ersé par la religion nouvelle. Aussi n’y a-t-il rien de négligeable dans ce qui nous rend une connaissance plus précise ou plus détaillée de l’incomparable miracle moral qu’est la diffusion catholique de l’Eglise.

c) Unité de V Eglise (Ahercius). — En se répandant, l’Eglise ne se dispersait pas : elle assimilait les paj’s les plus divers en resserrant plus fort le lien de son unité, réalisant sans elfort le résultat devant lequel les armées et la politique avaient échoué. Ce sont les éléments du même credo qui se retrouvent dans les invocations qui se font écho dans les épigraphes, de la Syrie à la Gaule ; partout nous retrouvons même hiérarchie, même rites, mêmes croyances : « un Seigneur, une foi, un baptême », eoiume écrivait saint Paul aux Ephésiens (iv, 5), et comme le répète après lui une acclamation chi-étienne de Syrie (Prentice, AAE, 204). Mais cette unité de l’Eglise se manifeste encore d’une façon plus concrète et plus saisissante dans un des textes chrétiens les plus anciens, la fameuse inscription phrygienne d’Abercius, que de Rossi proclamait, avec un enthousiasme dont on n’est pas revenu, « la reine des inscriptions chrétiennes ». L’importance de ce texte, les polémiques passionnées qu’il a suscitées nous obligent à entrer ici dans quelque détail, mais sans la prétention ni l’espoir d’être complet. Il suffira d’avoir indiqué quelques faits principaux et renvoyé, pour la discussion des j)rol)lèmes, aux travaux spéciaux.

Les passionnaires grecs contiennent, à la date du 28 octobre, une vie d’Abercius, assez mal notée parmi les hagiographes jusqu’au jour où une découverte inattendue vint lui rendre un peu de crédit. Dans la vie, se trouvait insérée une éjiitajihe, en vers d’un mètre un peu hésitant, que l’évêque Abercius aurait dictée pour être gravée sur sa tombe. Ce petit poème avait participé à la défaveur qui pesait sur l’ensemble de la rédaction, et dom Pitra, tout en rétablissant assez heureusement le texte, n’avait pu parvenir à dissiper toutes les défiances. Mais voilà qu’en 1881 Ramsay découvrit à Kélendres, près de Synnade, en Phrygie Salutaire, une inscription funéraire, datée de l’an 300 de l’ère provinciale (216 J. -G.),

qui présentait avec le texte de l’épitaphe d’Abercius des rencontres si singulières, que le hasard ne suffisait pas à les ex|)liquer. Ramsay, Cities, p. y20-’j22 ; I)ici. d’Arch. clirél., s. v. Abercius, col. G9. Un vers en particulier dénonçait le jîlagiat, car le nom d’Alexandre, substitué à celui d’ASsptî ; , brisait la mesure et trahissait l’adaptation maladroite. L’épitaphe d’Abercius n’était donc pas simple élucubration d’hagiographe. On serait demeuré sur ce premier résultat, si le hasard n’avait fait royalement les choses. Deux ans après, repassant par Hiérapolis, M. Ramsay découvrait, encastrés dans la maçonnerie des bains, à 3 milles au sud de la ville, deux morceaux de la propre épitaphe d’Abercius (Ramsay, Cities, p.’J22--29). L’inscription suspectée était définitivement authentiquée par les précieux fragments. Restait à l’interpréter. Vu son importance, il est opportun d’en reproduire ici le texte et d’en donner la traduction. Dans la transcription courante, des capitales indicjuent les parties qui se lisent sur les fragments conservés au Vatican et reproduits plus d’une fois. Voir Nuo’. Bul. di Arch. crist., i, pi. iii-vii (à la grandeur de l’original) ; Bict. d’Arcli. chrét., s. v. Abercius (belle planche) ; Syxtus, tab, R, etc.’Ez/îzTv ;  ; 7ïo’/.£Wç é Tr5/£(Tv ; ç tîOt s~51V ; 3-a t^ôfj t’y ky’ji X’y.ifiôi jcjy. ! zri ; vjOo. dé’jiv. o’Jvou’'Aoépy.ioz iiv à (/.y-ô/jr/ ;  : 7T0t//£’vî ; âyvsO Oi ^dzy.ii Tcpo^v.zw sr/e/a ; op-71v ~ ; dtoti tî 5 à^ôy./y.’jiii ô ; ip^ît tj.zyv./.OJi TZ’Jyrr, /.y.d-jp’jivrv-i

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et 0’ouv.’Po)/j.v.c’jyj tv.’j.sio) ÔTiTSi Si^yOïv. ypj^y., y.y.i ypr17rfj ~rx.zpiOi lîpoTTo’Jii VM’-V- y.p’^^

« Citoyen d une ville distinguée, j’ai fait ce [monument

] de mon vivant, afin d’y avoir un jour une place pour mon corps. Je me nomme Abercius, je suis disciple d’un saint pasteur, qui fait paître ses troupeaux de l)rebis sur les montagnes et dans les plaines, qui a de grands yeux dont le regard atteint partout. C’est lui qui m’a enseigné les écritures sincères. C’est lui cpii m’eiivoya à Rome contempler la majesté souveraine, et voir une reine aux vêtements d’or, aux chaussures d’or. Je aIs là un peuple qui porte un sceau brillant. J’ai au aussi la plaine de Syrie et toutes les villes, Nisibe au delà de l’Eujdirate. Partout j’ai trouvé des confrères. J’avais Paul…, la foi me conduisait partout ; partout elle m’a servi en nourriture un poisson de source, très grand, très pur, péché par une vierge sainte. Elle le donnait sans cesse à manger aux amis ; elle possède un vin délicieux qu’elle donne avec le pain. J’ai fait écrire ces choses, moi, Abercius, à I’àge de soixante et douze ans. Que le confrère qui les comprend, prie pour Abercius. On ne doit pas mettre un autre tombeau au-dessus du mien, sous peine d’amende : 2.000 pièces d’or pour le fisc romain, 1.000 pour ma chère patrie Hiéropolis. »

Comme l’écrivait excellemment M. L. de Graxdmaisox :

« A qui lit sans idée préconçue cette inscription