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EPIGRAPHIE

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cette première légation peut être assez facilement localisée. La Sj rie, province consulaire, ne put être conliéeàQuirinius qu’après son consulat (12 av. J.-C) ; or, pendant les années suivantes, nous trouvons, à la tête de la province de Sjrie. d’abord M. Titius aux environs de l’an 10 ; puis C. Sentius Saturninus, de g à 6 et P. Quintilius Varus, de 6 à 4- Ce dernier était encore en charg-e lors de la mort d’Hérode (ScnuERER, I, p. 322), si bien que la première légation syrienne de Quirinius ne peut avoir commencé avant l’an 3 av. J.-C. Ainsi, en admettant que Jésus naquit au cours de la première légation de (Juirinius, nous n’arriverions qu’à diminuer l’erreur, sans la faire disparaître. Si Jésus est né alors que Quirinius était déjà en charge, Hérode était déjà mort ; si Ilcrode n’était pas encore mort, comment peut-on nous parler de (Juirinius ? Bien des tentatives ont été faites pour sortir de ce dilemme. Voir dans les commentaires conservateurs, et aussi l’analyse des solutions cqueSciiuiîRER énumère et critique, I, p. 534 et sniv. A s’en tenir aux possibilités, personne ne fera ditliculté d’admettre que les opérations du recensement se soient prolongées pendant plus d’une année, qu’elles aient au moins chevauclié sur deux années consécutives ; commencées en l’an 4 fi^’- J.-C. ou même plus tôt, elles amenèrent Joseph à Bethléem, et Jésus y naquit a^ant la mort d’Hérode ; i^oursuivies et achevées sous Quirinius, on imagine facilement qu’elles aient gardé le nom du gouverneur à qui il fut donné de clore les listes et de proclamer les résultats.

h) [.Ysanias, tétrarqiie d’Abilène. — Il est un autre synchronisme de S. Luc qui a été vivcment attaqué (Aoir bibliogr. dans Schuf.rer, I. p. ^o^ et 719. n. 44) et qui reçoit des inscriptions une conlîrmation éclatante. Pour dater la mission de Jean et le début de la vie publique de Jésus, l’évangéliste a multiplié les indications chronologiques (m, 1) : « Dans la quinzième année du règne de Tibère César, lorsque Ponce Pilate était gouvcrneur de la Judée, Hérode tétrarque de la Galilée, Philippe son frère tétrarque de l’Iturée et du territoire de la Trachonitide, Lysanias tétrarcjue de l’Abilène… » Auguste étant mort le 19 août de l’an 14, la quinzième année de Tibère correspond donc normalement à 28 29 ou 29/30 ; la procuratèle de Pilate couvre l’espace compris entre 26 et 36, de là aucune difficulté ; à l’indication relative à la tétrarchie de Philippe et à celle d’Anlipas on ne trouve rien à objecter. Quelcjnes criti(]ues ont prétendu se rattraper sur l’intervention du nom de Lysanias. « Luc fait régner, 30 ans après la naissance du Christ, un Lysanias qui avait certainement été tué 30 ans avant cette naissance : c’est une petite erreur de Go ans.)> (Stralss, Xoiivelle vie de Jésus, t ;-ad. NefTtzer et DoUfus, H, p. 20-21.) On Aerra de quel côté était l’erreur.

Caligula, en montant sur le trône (’i~). donna à son ami Agrippa I", aACC la tétrarchie de Philippe, celle de Lysanias (cf. Schuerer, p. 502 ; 7 1 --S) ; Claude (41)coniîrnia et agrandit cette dotation. Comme Josèphe ne connaît qu’un Lysanias, contemporain d’Antoine et de Cléopàtre, on en concluait que c’était de ce personnage que rvl)ilène avait reçu, puis conservé jusqu’à l’accession d’Agrippa, la dénomination de

« tétrai-chie de Lysanias w ; S. Luc mentionnant, en

29, un Lysanias, tétrarque d’Abilène, déplaçait donc de 60 ans, ou dédoul)lait le Lysanias iiistorique. Pour le malheur de cette hypothèse — fondée comme bien d’autres sur l’inerrance de Josèphe — une inscription découverte près d’Abila (CIG, 4^21 ^ Ditten-BERGER, Orientis Græci inscr. sel., 606) est Acnue attester l’existence d’un second Lysanias, qui répond exactement aux exigences du récit éAangélique. L’inscription émane d’un certain NAUiphaios, affranchi du

tétrarque Lysanias, et par sa date se place entre 14 et 2g. Nous avons donc la preuAe épigraphique de l’existence du tétrarque, contemporain de Tibère, que connaît S. Luc.

L’information fournie par ce premier document est d’ailleurs corroborée par une autre incription, découvcrte à Héliopolis de Syrie (CIG, 4523 : = Iriscript. græcæ ad res romanas pertinentes, III, io85) qui paraît appartenir à la sépulture de la famille royale d’Abilène et nous montre le retour fréquent du même nom de Lysanias dans la dynastie. Voir le mémoire de Re.nan, Mém. de l’Acad. des Inscript, et Belles-Lettres. XXVI, 2* partie.

Il n’est pas hors de propos de noter en passant que les indications de S. Luc relafives soit aux Hérode, soit aux Agrippa, pourraient être l’objet d’une étude détaillée, dans laquelle, à coté des textes historiques, les inscriptions et les monnaies auraient leur place. Les textes épigraphiques ont été réunis par Dittenberger (Orientis græci, 4’4-42g) : y ajouter l’édit d’Agrippa H trouAé à Yabroud (CLERAioxT-GAXXEAr, Bec. d’ArchéoJ. orient., VII, p. 54-76), une dédicace de Ba’albeck. CIL, III, 1438^ et l’inscription deFaqra, qui mentionne Agripiia II et Bérénice (Jahrb. d. k. d. arcliæolog. Instituts. XVII, p. 107, n. 43). On observcra en particulier que ces textes ont une utilité spéciale pour déterminer l’étendue des territoires qui furent successivcment sous la niouA-ance des deux Agrippa.

f) Divers traits relatifs au.r voyages de S. Paul. — Ces deux exemples d’ordre plutôt historique et chronologi ((ue suflisent à montrer que le texte de S. Luc n’a rien à redouter du hasard des découvertes épigraphiques, et que, l)ien au contraire, il peut en attendre d’utiles contirmations. Quelques autres détails empruntés aux Actes feront Aoir à l’éAidence combien l’éeriA’ain sacré serre de près la réalité : l’Acliaïe, Chypre, la Macédoine, l’Asie Mineure, Jérusalem nous fourniront autant de preuvcs de l’exacte information de l’auteur, autant de garanties de la haute Aaleur historique de son récit. Cf. supra, col. 268.

A Corinthe (.i’i ; 7,.’xvîii, 4), chaque sabbat, Paul discourait dans la synagogue. Il est intéressant de noter qu’on y aretrouA’é le linteau d’une synagogue, probaldement celle <n parlait l’apôtre, portant l’inscription : [r^vy.Jyo)// ; E ; c[KtOJvl, Deissmaxn, Licht, p. 8, n. 1 1 ; E. WiLiSH, Vc/ze Jahrhiicher, igo8, p. 427. Un autre détail mérite surtout d’attirer notre attention. Au cours du séjour de Paul, un rcA irement se produisit au sein de la colonie juiAC et A’oici comment S. Luc introduit ce récit : ry.//t&jyî : ôk yy6j-y.roj ivri ; Tr.i’k/y.iv.i (xviii, 12). Procousul (à^ôJTrarc :), cette désignation eût été une erreur entre 1 5 et 44 J.-C ; car, pendant ce laps de temps, l’Achaïe, d’abord déAolue au sénat, fut gouA-ernée par des légats impériaux. Mais, Claude ayant rendu la province au sénat, L. Juuius Annæus Gallio, frère de Sénèque, se trouvait précisément aA-oir rang et titre de proconsul. Comme une inscription de Delphes (Aem. Boirgvet. De rébus delphicis imperatoria aelate. igo5, p. 63-64) permet d’établir qucGallion était en charge en 52. il y a lieu de tenir compte de cette donnée pour la chronoh>gie si controvcrsée des Aoyagcs de S. Paul. Voir ci-dessus, col. 268.

Le titre à^ ccjdJTy.- : ’^^ rcAÎent deux fois encore dans les Actes : une fois, il sert à désigner les gouverneurs d’Asie (xix, 38) ; une autre fois, nous le trouvons appliqué au gouverneur de Chypre. Sergius Paulus (xiii, 7, 8, 12). Là encore une méprise était facile, et S. Luc s’en est exactement gardé ; comme l’Achaïe, Chypre eut ses Aicissitudes : d’abord ressortissant àl’administration impériale, elle passa, en 22 J.-C, au sénat, et dès lors reçut des i)ropréteurs aACC titre de