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EGLISE (CHRÉTIENTÉ PRIMITIVE)

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(Jc^, X, 44-48 ; XI, 1 5-1 7). Le baptême de Teau, célébré par le représentant de l’Eglise, au nom du Seigneur Jésus (quoi qu’il en soit de la controverse sur l’emploi de la formule trinitaire par les apôtres), est donc un rite spécifiquement chrétien.

De même, l’imposition des mains pour conférer le Saint-Esprit. Le don du Saint-Esprit pour fortitier, perfectionner, sanctifier les âmes dans l’ordre de la vie intérieure et surnaturelle, malgré tous les obstacles, était l’un des grands résultats de la victoire du Sauveur (Act., 11, 33). Des signes merveilleux accompagnaient communément, à l'âge apostolique, l’effusion de l’Esprit-Saint (Jcf., 11, 1-21, 33 ; iv, 31 ; ix, 17 ;

X, 44 ; XI, i.'i). Or cette effusion de l’Esprit-Saint était normalement procurée au moyen de l’imposition des mains ; non pas de l’imposition des mains accomplie par tout ministre de l’Evangile, mais accomplie par les seuls chefs et pasteurs principaux de la communauté chrétienne. — Le diacre Philippe baptise les Samaritains convertis, mais ne peut faire davantage ; les apôtres Pierre et Jean viennent à leur tour et, par l’imposition des mains, ils communiquent aux nouveaux chrétiens le don du Saint-Esprit (Act., viii, 14I ;). Le magicien Simon admire les signes merveilleux qui en résultent ; il constate que « par les mains des

« apôtres était conféré le Saint-Esprit » ; et, mesurant à prix d’or le don divin, il offre aux apôtres de

leur acheter ce pouvoir de conférer le Saint-Esprit par l’imposition des mains (Act., viii, 18, 19). Quelques années plus tard, on voit l’apôtre Paul, ayant Ijaptisé de nouveaux chrétiens, leur imposer ensuite les mains pour leur conférer le Saint-Esprit (Act., XIX, 6). — Un auteur ])rotestant écrivait naguère, à propos du huitième chapitre des Actes : « C’est la

« notion sacramentelle et magique qui a prédominé
« depuis dans l’Eglise catholique > ; et le même écrivain

s’empresse d’ajouter : « notion essentiellement étran « gère à l'époque primitive ». (Moxnier, Action de l’apostolat, p. 170.) Il faut donc nier l’historicité du récit pour mettre en doute la valeur de l’imposition des mains à l'âge apostolique : car le sens même des textes ne peut pas être plus formel.

Fraction du pain. Sous ce nom, les Actes paraissent désigner un rite religieux célébré entre chrétiens, d’une manière qui leur était propre (Act., 11, 42). Rapproché d’autres textes (l Cor., x, 16-21, et

XI, 23-34), ce passage des Actes prend une plus grande clarté. Il désigne, croyons-nous, la réitéralion de la dernière Cène et du grand mystère qu’y accomplit le Seigneur Jésus, pour le transmettre en mémoire de sa Passion. Toutefois, au point de vue historique, l’interprétation des Actes est ici d’une moindre certitude que pour le baptême et l’imposition des mains.

Donc l’Eglise de Jérusalem possède plusieurs rites spécifiquement chrétiens, célébrés par les chefs religieux de la communauté chrétienne, et requis normalement pour procurer la sanctification intérieure. Ce fait s’ajoute à l’existence même d’une hiérarchie visible et d’une ri’gle de foi imposée à la croyance des fidèles par l’autorité de la hiérarchie ; tous ces faits signilicatifs s’ajoutent donc les uns aux autres, pour manifester le caractère essentiellement organique de la chrétienté primitive, c’est-à-dire de l’Eglise naissante à Jérusalem.

h) Caractère autonome de cette Eglise

Bien que les premiers chrétiens aient persévéré dans l’observance du culte mosaïque, l’Eglise de Jérusalem et de Palestine se trouva, dès le premier jour, virtuellement séparée de la Synagogue juive. Sur un signe d’en-haut, la séparation devint apparente et

formelle. Toutefois cette même séparation, atténuée d’abord par quelques tempéraments charitables, n’atteignit que peu à peu son entier accomplissement.

((x) Fidélité au culte mosaïque. — Prière quotidienne des apôtres et des chrétiens dans le Temple (Act., 11, 46 ; III, I, 2, 11). Leurs assemblées au portique de Saloiuon (Act., v, 12, 13). Prédication dans le Temple (Act., V, 20, 21, 25, 42). CouA-ersion au christianisme de prêtres juifs qui semblent garder leurs fonctions au Temple (Act., vi, 7). Stupeur quand il s’agira d’admettre au baptême des hommes étrangers au judaïsme et à la circoncision (Act., x, 14, 28, 34, 35, 45 ; XI, 2, 3, 18, 22 ; XV, i).

(/3) Séparation virtuelle. — Dès les premiers jours, la communauté chrétienne se reconnaît une mission religieuse, universelle, nécessaire ; et cela indépendamment de la hiérarchie mosaïque, ou même en dépit de la hiérarchie mosaïque. Donc, dès les premiers jours, la communauté chrétienne se reconnaît indépendante de la Synagogue juive ; elle pose nettement le principe d’une rupture totale. Qu’on s’en aperçoive ou non, parmi les contemporains, c’est déjà une séparation « virtuelle ».

Les apôtres se reconnaissent une mission religieuse, pour communiquer aux hommes la vérité divine et les moyens de sanctification intérieure. Cette mission est nécessaire, car elle apporte un message indispensable au salut. Cette mission est universelle, car le message est destiné à tous les hommes et nécessaire pour tous les hommes. Cette mission, les apôtres déclarent la tenir immédiatement et exclusivement de Jésus, qui est le Christ et le Seigneur. Cette mission, ils l’exercent indépendamment de la hiérarchie mosaïque, dont ils ne sollicitent aucun mandat ni aucune autorisation. Menacés, puis châtiés par le sanhédrin, ils répondent que Jésus est la « pierre

« angulaire » ; que par lui seul les hommes peuvcnt

arriver au salut ; que poursuivre l'œuvre de Jésus est un devoir qui s’impose à leur conscience ; que mieux vaut obéir à Dieu qu’aux hommes : bref la communauté chrétienne a sa raison d'être et ses principes d’action en dehors de la Synagogue juive, elle existe et se développe en dépit même de la hiérarchie mosaïque.

Prédication de la Pentecôte (Act., 11, 38, 39). Discours après la guérison du boiteux (Act., iii, 17-26). Première comparution devant le sanhédrin (Act.. iv, 8-20). Seconde comparution devant le sanhédrin(.^c/., V, 27-33). Prédication du diacre Etienne (Act.. vi, 9-1 5). Apostolat du diacre Philippe (Ad., viii, 5-23 et 27-39). Conversion du pharisien Saul (Act., ix, 15 et 20-30).

Donc l’Eglise de Jérusalem est nettement consciente du caractère autonome de sa mission religieuse. Le principe d’une rupture totale avec le judaïsme est posé dès le premier jour. C’est bien une séparation virtuelle.

(/) Séparation formelle. — Sur un signe d’en-haut, la communauté chréliennc admet dans son sein des hommes qui étaient et qui restent parfaitement étrangers au judaïsme et à la circoncision. Dès lors la séparation entre la comnuinauté chrétienne et la Synagogue juive devient apparente et « formelle ».

Le signe d en-haut. Série des faits : Vision prophétique du centurion Corneille (Act., x. 3-6). Vision symbolique de l’apôtre Pierre : animaux purs et impurs. Ce que Dieu a purifié, ne le nomme pas impur (Act., X, 10-16). Avertissement intérieur reçu par l’apôtre Pierre, au sujet de la reqnote du centurion Corneille (Act., x, 19, 20 ; cf. 24-33). Elfusion merveilleuseduSaint-Esprit sur Corneille etsa famille, en présence de Pierre et des chrétiens d’origine juive qui l’accompagnent. Et l’apôtre Pierre reçoit alors dans