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EGLISE (DANS L’EVANGILE]

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16).Donc c’estbien au seul groiif)e des apôtres, au seul collège des Douze, que Jésus prétendait s’adresser quand il promettait, par notre texte, le pouvoir de lier et délier jiar sentence efficace.

L’Eglise gouvernera ses fidèles ; IZ" « ’//.se jugera ses fidèles. Mais la juridiction ecclésiastique ne sera pas le privilège collectif de la communauté tout entière. Le droit de gouverner, le droit de juger appartiendra exclusivement à ceux qui, dans l’Eglise chrétienne, forment Vêlement directeur : les douze apôtres. La juridiction peut, du reste, et en vertu de sa nature même, se transmettre et se déléguer. Elle appartiendra donc, dans chaque communauté de fidèles, à ceux qui, par succession ou par délégation, représenteront légitimement le collège apostolique.

v) Extension du pouvoir promis. — Ce pouvoir doit s’étendre au domaine spirituel tout entier.

Au domaine spirituel, disons-nous. Il s’agit, en effet, d’accomplir l’œuvre messianique de Jésus-Christ, de réaliser l’Evangile et de procurer ici-bas le

« royaume de Dieu ». C’est dire que le pouvoir promis

par le Christ concerne l’ordre même des enseignements évangéliques, l’ordre du salut et de la sainteté, l’ordre spirituel et religieux. Le pouvoir promis par le Christ ne concerne donc pas (directement ) l’ordre temporel et profane, l’ordre civil et politique : pareilles choses demeurant (par elles-mêmes ) en dehors de l’Evangile du k royaume «. (Luc, XII, 13 et 14 ; cf. Marc, xii, 13-i^ ; Matth., xxii, 15-21 ;

Luc, XX, 20-25.)

Mais dans le domaine spirituel et religieux, la juridiction ecclésiastique est aussi étendue que possible.

« Tout ce que aous aurez lié… Tout ce que vous

aurez délié… » elle comprend donc le droit de permettre et celui de prohiber ; le droit d’absoudre et celui de condamner. Après sa résurrection, le Sauveur expliquera même que le pouvoir de lier et délier s’étend, non pas seulement à l’ordre extérieur de la société chrétienne, mais jusqu’au for intime des consciences, jusqu’à la rémission judiciaire des péchés. (Joan., xx, 23.)

Donc le texte de saint Matthieu (xviii, 18) promet au collège des Douze — une juridiction véritable et plénière, — dans le domaine spirituel.

d) Collation d’un pom’oir perpétuellement transmissible. — Le texte capital est celui qui termine l’Evangile de saint Matthieu (xxviii, 18-20) : « Toute

« puissance m’a été donnée au ciel et sur terrre. Allez

donc enseigner toutes les nations ; les baptisant

«. au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ; leur
« apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit.
« Et voilà que je suis avec vous, tous les jours, jusqu’à

la consommation des siècles. » — Il faut en rapprocher les passages où les autres évangélistcs résument les paroles similaires qui furent, en diverses circonstances, adressées au collège apostolique par Jésus ressuscité. (Marc, xa’i, 15-18 ; Luc, xxiv, 46-49 ; Joan., XX, 21-23 ; Act., i, 3-8.)

Dans les prérogatives que le Christ, Aainqueur de la mort, confère à ses apôtres, distinguons trois éléments principaux : (’/.) magistère enseignant ; (Jî) juridiction gouvernante ; (y) succession perpétuelle.

a) Magisti’re enseignant. — Un « magistère enseignant » consiste dans le droit de proposer avec autorité la doctrine qu’il faut tenir pour vraie. Or le Christ confère au collège des Douze le droit de proposer avec autorité la doctrine qu’il faut tenir pour vraie. Le Christ confère donc au collège des Douze un magistère enseignant.

Les apôtres « enseigneront toutes les nations, …

« leur apprenant à garder tout ce que Jésus a prescrit.

» (Matth., xxviii, 19, 20.) Quiconque ne croira pas au message des ajîôtres « sera condamné ».

(Marc, xvi, i&.) Les apôtres seront les « témoins » authentiques de l’œuvre et de la doctrine du Sauveur. (Luc, XXIV, 48 et Act. 1, 8.)

/2) Juridiction gouvernante. — La puissance de Jésus-Christ, en Aue de diriger les âmes au salut, comporte une Araie juridiction. Or le Sauveur transmet au collège des Douze la puissance qu’il possède, en Aue de diriger les âmes au salut. Le Sameur transmet donc au collège des Douze une Araie juridiction.

Que Jésus-Christ, Roi messianique et Fils de Dieu, possède plein empire et pleine puissance, en A^ie de diriger les âmes au salut, et, par conséquent, toute juridiction ici-bas, c’est ce que l’Ancien Testament, faisait nettement comprendre (e. g. Psalm., 11, 6-g et ex, A’ulg. cix, 1-7) ; c’est ce que notre texte affirme sans équiA’oque (Matth., xxa-iii, 18).

Que Jésus-Christ A’euille transmettre au collège des Douze le droit de régir en son nom, dans le domaine religieux, tous les fidèles du « roj aume », nombreux sont les textes qui l’établissent bien clairement :

« Toute puissance m’a été donnée au ciel et sur terre.
« Allez donc enseigner toutes les nations. » (Matth., 

xxviii, 18, 19.) « De même que mon Père m’a ence Aoyé, moi je vous enA’oie. » (yoa «., xx, ai.) Il faudra introduire les hommes, par un rite visible et obligatoire dans le « royaume de Dieu » ; il faudra leur intimer les obligations que contient l’EA’angile :

« les baptisant au nom du Père et du Fils et du
« Saint-Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je
« Aous ai prescrit. » (Matth., xxa’iii, 19, 20 ; cf.

Marc, XAi, 15, 16.) L’autorité des apôtres atteindra même, nous l’avons déjà mentionné plus haut, le for intime des consciences, la rémission judiciaire des péchés : « Reccvcz l’Esprit-Saint. Les péchés seront

« remis à ceux auxquels a’ous les aurez remis, et ils
« seront retenus à ceux auxquels vous les aurez retenus.

» (Joan., us., 22, 23.) Dans tous ces textes, nous trouA-ons l’exacte vérification de la promesse entendue naguère par les apôtres : juridiction Aéritable et plénière dans le domaine spirituel, pouA’oir de « lier et délier « par sentence efficace. (J/ « i ; //(.^"xviii, 18.) Il est donc bien A-rai que Jésus ressuscité confère au collège des Douze « une juridiction gouvernante) en A’ue de conduire les âmes au salut éternel.

v) Succession perpétuelle. — Un pouvoir qui doit durer jusqu’à la fin des temps doit se perpétuer légitimement par A’oie de succession. Or la prérogative conférée par le Christ au collège des Douze doit durer jusqu’à la fin des temps. La prérogative conférée par le Christ au collège des Douze dcA’ra donc se perpétuer légitimement par A’oie de succession.

Ainsi le A’eut, du reste, la nature même des choses. Tout pouvoir jiermanent exige que, par la succession continue et légitime de ses titulaires, subsiste la même personne morale et juridique. Si donc l’autorité gouA’ernante du collège des Douze doit durer jusqu’à l’époque mystérieuse de la fin du monde, s jusqu’à la consommation des siècles » (Matth., xxA’iii, 20), et si, de fait, les apôtres doiA’cnt mourir aA^ant le triomphal retour de Jésus, l’autorité gouvernante des apôtres se perpétuera, conformément à la loi générale des sociétés humaines, chez les successeurs des apôtres.

En somme, d’après les textes, les apôtres exerçaient un double rôle : celui de fondateurs et celui de pasteurs dans l’Eglise du Christ. Au rôle de fond ateurs se rattachait tout un ensemble de privilèges extraordinaires, qui, regardant la prédication initiale et le premier établissement du christianisme, dcA aient disparaître avec la personne même des apôtres. Au rôle de pasteurs correspondaient une autorité enseignante, une fonction gouvcrnante, qui dcA-aient durer, comme l’Eglise elle-même, jusqu’à la consommation des