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DIMANCHE

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elle oblige la généralité, c’est-à-dire toute l’Eglise. 3’Dans ce sens, il ressort de tont ce que nous avons vu, des dispositions des conciles, de l’enseignement des évêques et des moralistes, des sanctions de toute nature, qui atteignaient les violateurs du précepte, que l’on considérait l’obligation comme grave de sa nature, et sa violation comme une faute grave. I" Loi coutumière dans son principe et surtout dans ses applications de détail, elle subit les variations de la coutume (au vrai sens canonique), et les personnes que cette coutume en tient pour exemptes, sont réellement exemptes, a) Si les personnes qui se trouvent dans les conditions normales de liberté et de travail sont coupables de faute grave en manquant au double précepte, les personnes que la coutume exempte de l’assistance à la messe en certaines circonstances : les jeunes mères avant les relevailles, les tiancées à la messe paroissiale où se fait la publication de leurs bans, les personnes nécessaires à la garde de la maison ou des malades, celles qui n’ont pas le minimum de vêtements estimés convenables vu leur position sociale, etc., ne sont coupables d’aucune faute si, dans les limites de cette coutume, elles manquent à la messe, b) Cette loi coutumière n’a jamais été considérée comme strictement obligatoire dans chaque cas particulier où son observance imposerait de notables incommodités : une loi expresse et précise n’oblige pas citm tanto incommodo, à plus forte raison le peut-on affirmer d’une loi comme celle-ci, qui ne doit son existence pour le détail qu’à la pratique des hommes. Sans doute il sera mieux et préférable d’observer la loi, même au prix de notables inconvénients, mais il ne s’agit pas ici de ce qu’il est préférable de faire, il s’agit de ce qui est obligatoire. C’est en vertu de ce principe que l’on considère comme exempts ceux qui ne peuvent venir à l’église sans désagrément sérieux, pour cause de maladie, de fatigue, ou autre semblable.

Ce que l’on vient de dire toiichant l’assistance à la messe, on le dira avec plus de droit touchant le chômage ; car il faut l)ien noter que c’est ici une autre obligation, distincte de la première : Texemption de l’une n’entraîne pas l’exemption de l’autre. i° Les travaux que la coutume permet le dimanche : les œuvres quotidiennes d’alimentation ou de bonne tenue d’une maison, peuvent se faire sans péché ; cette coutume sera plus ou moins séAère selon les temps et les lieux, il sera parfois malaisé de bien constater jusqu’où elle s’étend, mais cette dilTiculté n’al)roge pas le principe général. L’Eglise ne nous condamne point aux minuties et aux étroitesses du judaïsme. Appuyés sur ce principe, les moralistes ont donné nombre de solutions à la fois larges et parfaitement légitimes. Il est ( ?ertain que le motif de nécessité rend légitime le travail du dimanclie ; on en fait l’application quand il s’agit, à la campagne, de rentrer une récolte niise en danger ])ar les sautes de température, on en fera tout aussi légitimement l’application à l’ouvrier des villes, réduit à vivre de son modeste salaire, qui, à l’éiioque douloureuse de la morte-saison, trouve, le dimanclie, un travail urgent à faire ; à celui qui, en tojite saison, ne peut nourrir les siens sans rap|)oint que lui procure le salaire de ce jour. A côté de la nécessité on uu-ttra, pour l’ouvrier commun, l’aubaine inespérée, qu’il trouve en ce jour, d’un gain notable. Sans doule encore, ici, dans l’application pialifjuc il faudra tenir compte d’une foule de considérations : nous n’envisagerons ici que le princi] » - strict du précepte dominical, a » On a toujours admis connue permis, le dimanche, les travaux manuels qui ont pour but et pour objet le culte divin, de même que ceux qui ont pour but de rendre au prochain un service qu’on ne peut

lui rendre un autre jour, ou qui préservent ses biens, par exemple en cas d’incendie, d’inondation, ou d’autres semblables.

L’Eglise se montre plus large pour dispenser du précepte quant au chômage qu’en ce qui concerne l’assistance à la messe, ce qui est une indication intéressante de la valeur obligatoire diverse qu’elle estime attachée aux deux préceptes.

({" Raison d’être du double précepte. — La raison d’être commune se montre avec des nuances différentes quanta chaque partie du précepte. — i. Concernant l’assistance à la messe. Voici les motifs généralement indiqués comme étant ceux qui ont fait établir ce précepte. Ils prennent racine dans l’obligation que nous avons de rendre à Dieu un culte, un culte public. Cf. S. Thom., II^ Ilae, q. J22, art. 4. in corp. art. Nous devons à Dieu un culte parce qu’il l’exige, et parce qu’il est notre Créateur. Ce culte doit être spirituel, et provenir de la partie intelligente et spirituelle de l’homme, parce que seule elle peut rendre à Dieu un culte vrai, dirigé parla raison. Mais en l’homme, Dieu n’a pas créé que l’àme, il a créé le corps ; l’homme tout entier, dans ce qui le fait homme, dans son corps et dans son àme, doit à Dieu un culte extérieur. Il lui doit de plus un culte public et social, soit parce que la société, créée par Dieu, lui doit à ce titre ses hommages, soit parce que, créé pour vi^-re en société, n’atteignant tout son développement normal que dans et par la société, l’homme reçoit du culte rendu en commun une impression religieuse plus profonde, et ne rend à Dieu le culte qu’il lui doit qu’avec le concours de ses semblables et sous l’impulsion qu’exerce sur lui le spectacle du culte rendu en même temps par ses semblables. Or l’acte le plus parfait et le plus élevé du culte divin, c’est le saint sacrifice de la messe ; l’homme et la société doivent donc ensemble à Dieu le culte rendu par ce sacrifice, l’assistance commune à ce sacrifice. Il y a en outre obligation pour tous les fidèles de s’instruire des vérités de la religion, et nul temps n’est plus apte à ce que cette instruction soit fructueuse que celui où l’homme, dans le recueillement et la prière, reçoit plus abondamment les grâces divines. Aussi ce fut toujours la coutume de l’Eglise de joindre à la lectiire des Livres saints l’homélie, qui en donnait le commentaire moral et théologique. Il n’est pas douteux, d’autre part, que l’immense majorité des hommes sont incapables de s’instruire par eux-mêmes ; il faut donc consacrera cet enseignement un jour qui soit le même pour tous, celui où l’àme est le plus détachée des préoccupations hiunaines. — a. Concernant l’abstention des œiisres servîtes. Les économistes et les physiologistes insistent sur cette vérité admise par tous, que l’homme ne peut travailler constamment, que son corps a besoin de repos, sous peine de s’étioler, de conqirometlre prématurément sa santé, la possibilité de gagner chaqiu » jour sa vie, et l’avenir de sa race. Ce sont les considérations qui inspirent aujourd’hui les lois civiles sur le cliôuiage. L’Eglise est inspirée encore par d’autres motifs : elle tient au chômage du dimanche parce que c’est le jour auquel fut reportée l’obligation divine fixée primitivement au sabbat, parce qu’il faut que, le jour consacré au culte iliviii, l’esjjrit se dépouille de toute autre préoccupation immédiate, pom- s’attacher vraiment à Dieu, qu’il faut éviter ce jour-là les occasions de péché, si nombreuses dans l’acharnement quc l’on met aux soucis de sa profession, parce qu’enlin le chômage du dimanche est le seul moyen ellicace qui permette de s’adonner tout ce jour aux œuvres de religion. On voit donc, par la valeur diverse de ces divers motifs, pourquoi l’Eglise, ou même la coutume,