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divines, in rébus divinis, ne sont pas par eux-mêmes inaccessibles à la raison humaine, puissent aussi, dans la présente condition du genre humain, être connus de tous, sans di/ficulté, a^’ec une ferme certitude et à l’exclusion de toute erreur ». L’objet de connaissance pour lequel on déclare la révélation moralement nécessaire est tout ce qui en Dieu est accessible de soi à la raison, c’est-à-dire l’ensemble des attributs qu’étudie la Théodicée : immutabilité, infinité, immensité, omniscience, absolue liberté, etc., etc., et il est clair que tous les hommes ne peuvent facilement s’élever par les seules forces de leur raison à une’pareille connaissance, de façon à exclure l’erreur et le doute. Au sujet de ce dernier texte sur la nécessité morale de la révélation, un amendement proposa de remplacer les mots « choses divines « , par ceux-ci :

« Dieu et la loi naturelle ». On répondit que la formule

à sens moins restreint avait été choisie intentionnellement, cf. Acta, col. 609, 122, emend. 19, et Chossat, art. Dieu, dans le Dictionnaire de Théol. CathoL, col. 827.

k" La condamnation de 1 agnosticisme moderniste par l’Encyclique « Pascendi ». — LEncyclique Pascendi, %Atque iiæc, Denzinger, n. 2081, reproduit contre les modernistes la condamnation que le Concile du Vatican avait portée contre le fidéisme et le subjectivisme kantien. Les modernistes repoussent

« tout réalisme ontologique comme absurde et ruineux.

.. un dehors, un au-delà de la pensée, est par définition chose absolument impensable. Jamais on ne sortira de cette objection, et il faut donc conclure, avec toute la philosophie moderne, qu’un certain idéalisme s’impose ». E. Le Roy, Comment se pose le problème de Dieu. Re’.'ue de Métaphysique et de Morale, mars et juillet 1907, pp. 49^ et 488. La critique kantienne et postkantienne aurait ruiné le fondement des preuves traditionnelles de l’existence de Dieu, l’objectivité des principes rationnels. — L’Encyclique condamne ce phénoménisme, en rappelant que ses conséquences agnostiques ont été frappées par le Concile du Vatican : « Et pour commencer par le philosophe, les modernistes posent pour base de leur philosophie religieuse, la doctrine appelée agnosticisme. La raison humaine enfermée rigoureusement dans le cercle des phénomènes, c’est-à-dire des choses qui apparaissent et telles précisément qu’elles apparaissent, n’a ni la faculté ni le droit d’en franchir les limites : elle n’est donc pas capable de s’élever jusqu’à Dieu, non pas même pour en connaître, par le moj’en des créatures, l’existence : telle est cette doctrine. D’où ils infèrent deux choses : que Dieu n’est point objet direct de science ; que Dieu n’est point un personnage historique. Qu’advient-il, après cela, de la théologie naturelhdes motifs de crédibilité, de la réi’élation extérieure i’ilest aisé de le comprendre. Ils les suppriment purement et simplement et les renvoient à l’infellectualisme, système, disent-ils, qui fait sourire de pitié, et dès longtemps périmé. Rien ne les arrête, pas même les condamnations dont l’Eglise a frappé ces erreurs monstrueuses. Car le Concile du Vatican a décrété… (suivent les canons du concile sur la connaissance naturelle de Dieu et sur la rcvélalion). » Denzinger. n. 2072. — L’Encyclique condamne également

« l’immanentisme, côté positif de la doctrine

des modernistes, comme l’agnosticisme en est le côté négatif. La théologie naturelle une fois répudiée… toute révélation extérieure abolie, l’explication du fait religieux doit être cherchée dans l’homme lui-même, dans l’immanence vitale et la subconscience ». Denz., n. 2074. Enfin l’Encyclique déclare insuffisante la preuve de l’existence de Dieu fondée sur cet immanentisine :

« Si maintenant, passant au croyant, 

nous voulons savoir en quoi, chez ce même moder niste, il se distingue du philosophe, une chosç est premièrement à noter : c’est que le philosophe adinet bien la réalité divine comme objet de la foi, mais cette réalité, pour lui, n’existe pas ailleurs que dans l’âme même du croyant, c’est-à-dire comme objet de son sentiment et de ses affirmations : ce qui ne sort pas, après tout, du monde des phénomènes. Si Dieu existe en soi, hors du sentiment et de ses afiirmations, c’est de quoi il n’a cure : il en fait totalement abstraction. Pour le croyant, au contraire. Dieu existe en soi, indépendamment de lui, croyant ; il en a la certitude, et c’est par là qu’il se distingue du philosophe. Si maintenant vous demandez sur quoi, en fin de compte, cette certitude repose, les modernistes répondent : sur l’expérience indii’iduelle. Ils se séparent ainsi des rationalistes, mais pour verser dans la doctrine des protestants et des pseudo-mystiques (cf. Erreurs de Molixos, Denz., 1278). Voici, au surplus, comme ils expliquent la chose. Si l’on pénètre le sentiment religieux, on y découvrira facilement une certaine intuition du cœur, grâce à laquelle, et sans nul intermédiaire, l’homme atteint la réalité même de Dieu : d’où une certitude de son existence, qui passe très fort toute certitude scientifique. Et cela est une véritable expérience, et supérieure à toutes les expériences rationnelles. Beaucoup, sans doute, la méconnaissent et la nient, tels les rationalistes : mais c’est tout simplement qu’ils refusent de se placer dans les conditions morales qu’elle requiert. Voilà donc, dans cette expérience, ce qui, d’après les modernistes, constitue Araiment et proprement le croyant. Combien tout cela est contraire à la foi catholique, nous l’avons déjà lu dans un décret du Concile du Vatican : nous verrons plus loin comment la voie s’entrouve ouverte à l’athéisme. » Denz., 2081. Il n’y a eu pour s’étonner de cette condamnation du modernisme, que ceux qui ignoraient les définitions du Concile du Vatican contre le fidéisme.

Nous avons vu se vérifier les pai’oles de l’Encyclique au sujet des conséquences panthéistiques de l’immanentisme. On les retrouve avec des nuances différentes chez le philosophe et chez le croyant. — C’est ainsi que M. Beugson, parti du principe idéaliste (un au-delà de la pensée est impensable) et substituant au réalisme ontologique, qui admet la valeur ontologique des principes rationnels, k l’intuition primive de la vie profonde, l’écoulement de la durée consciente d’elle-même », est amené à conclure :

« Tout est obscur dans l’idée de création, si l’on pense

à des choses qui seraient créées et à une chose qui crée, comme on le fait d’habitude, comme l’entendement ne peut s’empêcher de le faire. Cette illusion est naturelle à notre intelligence, fonction essentiellement pratique, faite pour nous représenter des choses et des états plutôt que des changements et des actes. Mais choses et états ne sont que des vues prises par notre esprit sur le devenir. Il n’y a pas de choses, il n’y a que des actions… De ce point de vue, Dieu doit être conçu comme un centre d’où les mondes jailliraient comme les fusées d’un immense bouqiu’t, pourvu toutefois que je ne donne pas ce centre pour une chose, mais pour une continuité de jaillissement. Dieu ainsi délini n’a rien de tout fait ; il est vie incessante, action, liberté. La création, ainsi conçue, n’est pas un mystère : nous l’expérimentons en nous dès que nous agissons librement. Quedes choses nouvelles puissent s’ajouferauxchoses (pii existent, cela est absurde, sans aucun doute, puisque la chose résulte d’une solidification opérée par noire entendement, cl qu’il n’y a jamais d’autres choses (pu* celles que rentcndeiucnt a constituées… Mais que l’action grossisse en avançant, qu’elle crée au fur et à mesure de son progrès, c’est ce que chacun