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CURIE ROMAINE (CONGRÉGATIONS)

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naitx du Saint-Office, approuvés dans la forme commune ?


Proportion gardée, nous deA’ons aux décisions doctrinales du Saint-Office, même approuvées dans la forme commune, un assentiment religieux du même genre que celui que nous devons aux décrets pontiticaux non infaillibles.

Proportion gardée, disons-nous, car les décisions qui émanent directement du Souverain Pontife ont une plus haute autorité que celles qui proviennent des tribunaux inférieurs, des congrégations romaines.

Cette réserve faite, hàtons-nous d’ajouter que notre assentiment est parfaitement raisonnable, justifié.

La Congrégation du Saint-Office a pleine autorité pour porter ces décrets ; nous lui devons donc respect et obéissance. Ses membres ont grâce d’état pour remplir leur office, une science théologique et canonique qui garantit leur compétence. Les questions sont longuement et consciencieusement étudiées. La prudente lenteur du tribunal le met en garde contre les surprises, et permet un mûr examen de la question ; enlin, toute la discussion de la cause est soumise au contrôle du Pape. Il y a là réunies toutes les conditions qui assurent une sentence parfaitement juste (cf. MoccHEGiANi, Jurisprud entiu, t. III, n. ^3, p. 33 ; WiLMERS, De Ecclesia, lib. IV, cap. iii, a. 3, prop. 72, 2, p. 45 1 sq., Ratisbonae, 1897).

Ces sortes de décrets relatifs à la doctrine expriment donc une direction obligatoire, à laquelle tous les fidèles doivent se conformer.

Par de semblables décisions, le Saint-Siège veut pourvoir à la sécurité de la doctrine, prévenir les dangers de perversion de la foi, plutôt que prononcer directement un jugement sur la vérité ou la fausseté absolue de la proposition elle-même.

D’ailleurs, qui dit sécurité, suppose que le contraire n’arrivera pas ; mais, absolument parlant, ce n’est pas impossible. Sous ce rapport, il y a une grande différcnce entre une définition ex cathedra et une décision doctrinale non infaillible.

Le sens d’une définition ex cathedra est celui-ci : cette proposition définie ex cathedra est absolument vraie ; cette proposition condamnée ex cathedra comme erronée, hérétique, est absolument telle, erronée, hérétique… C’est un jugement absolu, définitif, garanti contre toute erreur, de soi irréformable, immuable, qu’on doit donc admettre dans le sens où il a été porté, avec une certitude absolue, une soumission pleine et entière.

Le sens d’une décision doctrinale, qui provient de l’autorité du magistère suprême, mais qui cependant n’est pas garantie par le charisme de l’infaillibilité, est celui-ci :

Etant donné les circonstances, l’état de la science, il est prudent et sûr de regarder cette proposition comme vraie, conforme à la sainte Ecriture… etc. Ou, il est prudent et sur de regarder cette proposition comme erronée, téméraire, contraire à la sainte Ecriture, etc. (cf. Billot, De Eccl., t. II, p. 118 : Sicut igitur quando infallibile Ecclesiæ magisterium, etc. D Philipp Kneib, Wissen und Glauben, 2" édit., Mainz, 1906).

Assurément, dans l’espèce, il s’agit d’une adhésion intérieure, intellectuelle. La proposition suivante a été condamnée par le Saint-Office (décret Lamentahili ) : (( Ecclesia, cum proscribit errores, nequit a fidelibus exigere uUum internum assensum, quo judicia a se édita complectantur » (Prop. 7). Toutefois, ce n’est pas un jugement définitif absolu, de soi irréformable. Le P. Billot, dans son traité De Ecclesia (t. II, p. 1 17-1 18), exprime très clairement cette distinction fondamentale. Voici ses propres paroles. « Fit igitur distinctio intcr décréta quibus veritas specu lativa infallibiliter deûnitur, et décréta quibus securitati doctrinæ prospicilur, quin deveniatur ad formales definitiones quæ non semper expediunt, aul certe non sunt semper necessariae… Sane, distinguunt omnes in re morali speculativam veritatem vel falsitatem alicujus propositionis ab ejus securitate vel non securitate practica ; aliud quippe significo cum dico sententiam moralem esse veram vel falsam, aliud vero cum dico eam esse practice tutam vel non tutam. Et similis distinctio locum quoque habet circa doctrinas in ordine ad legem credendi.

« Dico ergo nos exinde manuduci posse ad intelligenduin

quid sit edere decretum quo non speculativa veritas definitur, scd securitati doctrinæ prospicitur : nihil aliud est quam decernere authentice aliquam doctrinam esse tutam, h. e. consonam regulæ fidei ea saltem probabilitate quæ sulficiat ut quis possit illam amplecti ; vele contra aliquam doctrinam non esse tutam, seu esse discordcm a régula fidci, idque iterum tali saltem probabilitate quæ non habeat adjunctam sufficientem probabilitatem de opposito. Et quia in hujusmodi ipsa decisio legitimæ auctoritatis semper aft’ert pondus prævalens, doctrina quæ declaratur non tuta, ipso facto evadit vere talis, amittitque innocuitatem, etiamsi aliunde illa non destitueretur. Atque hinc tandem lit ut ex natura rei non requii’atur infallibilitatis auctoritas ut jure meritoque exigatur interior mentis obedientia. » Cf. Devivieu, Cours d’apologétique chrétienne, le procès de Galilée, v. p. 52 1, 17" édit., Paris, 1904 ; Etudes, 5 juillet, 1904, p. 56.

Pour que nous soyons en effet tenus d’obéir, il n’est pas nécessaire qu’une autorité infaillible intervienne, il suffit qu’il y ait une véritable autorité, Bouix, De Curia romana, prop. 4> P- 486, Parisiis, 1859. Et très certainement nous sommes strictement obligés d’adhérer aux décisions doctrinales oy ; disciplinaires du Saint-Siège, même lorsqu’elles ne sont pas garanties par le charisme de l’infaillibilité. Par exemple, si le Saint-Office par une sentence authentique déclare une proposition vraie ou erronée, je dois dire et croire intérieurement, non pas que la proposition est vraie ou erronée absolument, comme s’il s’agissait d’un jugement définitif, de soi irréformable, mais qu’il n’est pas imprudent, qu’il est sûr de regarder cette proposition comme vraie ou erronée, ou plutôt que cette proposition est siu’e, ou n’est pas sûre.

L’assentiment religieux est sans contredit une adhésion interne, intellectuelle, au jugement porté, et il est parfaitement sincère.

Est-il ferme ? — Un assentiment ferme est celui qui est certain et exclut tout doute. Dans ce sens, l’acte de foi, qui repose sur l’autorité divine, est absolument ferme ; il est métaphysiquement certain. La foi ecclésiastique est également ferme ; la définition infaillible de l’Eglise donne une garantie entière contre toute erreur.

En est-il de même lorsque la décision n’est pas garantie par l’infaillibilité ? Dans l’espèce, notre assentiment n’est pas métaphysiquement certain : la décision, en effet, n’étant pas garantie par l’infaillibilité, la possibilité de l’erreur n’est pas exclue ; mais il est moralement certain : les motifs d’adhésion sont si plausibles, qu’il est parfaitement raisonnable de donner son assentiment à ce jugement de l’autorité compétente. Mais cette certitude morale doit être entendue dans un sens large, lorsqu’il s’agit du jugement spéculatif auv la vérité ou la fausseté de la doctrine ; c’est une probabilité très grande ; théoriquement, ce n’est pas la certitude proprement dite, la fermeté qui exclut, de soi, tout doute. Pratiquement, cependant, elle équivaut à la certitude pour la masse des fidèles ; ceux-ci, entendant la décision de l’auto-