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CURIE ROMAINE (CONGRÉGATIONS)

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manière générale, les décrets édictés par les autres congrégations sont purement disciplinaires.

Nous ne parlons ici que des décrets disciplinaires.

Une division est à signaler.

! « Décrets formellement généraux. — Les décrets

des congrégations sont formellement généruu.v ou uni’ersels, quand ils sont adressés à l’Eglise tout entière. Si le décret est intitulé : Décret général : ou s’il y a cette formule L’rbis et Orbis ; ou s’il contient la clause suivante ou une autre analogue : ce décret doit être gardé partout, dans toutes les Eglises, etc., c’est signe qu’il s’agit d’un décret formellement général. Pratiquement, de semblables décrets sont rendus par la sacrée congrégation, en vertu d’un mandat spécial du Pape, ou ne sont jamais publiés avant que le Pape, expressément consulté, les ait approuvés (cf. Werxz, t. I, not. 62, p. 178 ; Santi-Leitxer, 1. I, tit. 31, n. 47> P- Soa ; Bocix, De Ciiria romana, p. 358).

2’^ Décrets formellement particuliers. — Mais les décrets disciplinaires peuvent régler des questions spéciales, des affaires qui regardent cp^ielques personnes en particulier : telles sont les sentences portées pour terminer un différend… etc. Ces décrets sont dits formellement particuliers.

3° Décrets formellement particuliers et équivalemment universels. — Il y a cependant des décrets qui sont formellement particuliers, mais équivalemment généraux. C’est-à-dire, ces décrets sont adressés à des particuliers, mai ? ils règlent une question d’ordre général qui regarde toute l’Egli^^e ; ou la réponse de la congrégation est formulée en termes généraux, abstraits, qui peuvent s’appliquer à tous les cas du même genre ; ou ce sont de simples déclarations ou interprétations du droit commun en vigueui".

Quelle est la valeur juridique de ces différentes sortes de décrets ?

Voici les principes communément admis en cette matière :

1° Autorité des décrets formellement généraux. — Le ? décrets formellemetit universels, légitimement promulgués, ont force de loi dans toute l’Eglise ; et tous les fidèles sont tenus de s’y conformer. Ils ne sont autres, en effet, que des actes du Saint-Siège, publics et solennels, par lesquels l’autorité compétente interprète autlientiquement une loi ancienne ou édicté une loi nouvelle. Tel est par exemple le décret de la sacrée Congrégation du Concile, du 13 mars 187g, approuvé par Léon XIII, le l’y du même mois, par lequel il est statué que le mariage civil ne constitue pas l’empêchement de mariage dhonnètelé publique.. Tels sont les décrets Vigilanti (25 mai 1893), ^7 débita (i i mai 1904), de la même congrégation : le premier approuvé par Léon XIII, et le second par Sa Sainteté Pie X ; tous les deux sont relatifs aux messes manuelles… etc. (Santi-Leitxer, L I. lit. 31, n. /( ; , p 30’.>.)

Au sujet des catiiolifpies orientaux non latins, les auteurs font généralement observer qu’ils ne sont atteints j)ar les constitutions pontificales, les décrets générauxémanantdelionie.que dans lescas suivants :

a) Si ces documents ont rapport à la foi, à la doctrine catholique : la foi est essentiellement une ;

b) Si ces docunu’nts, bien que disciplinaires en lin certain sens, déclarent et prescrivent le droit naturel ou le droit divin positif : toutes les prescriptions de droit naturel ou de droit divin positif, sont absolument « tt ; icrse//e.s. Ainsi le Saint-Siège a expressément déclaré que les évêqueset les curés orientaux sont tenus de dire la messe pro populo : toutefois, la manière de remplir cette obligation divine est de droit purement ecclésiastique ; c’est pourquoi ils

peuvent, avec l’agrément de Rome, adopter un mode spécial.

c) Si les documents, bien que traitant de choses purement disciplinaires et de droit ecclésiastiqvie, sont expressément adressés aux Orientaux, ou leur sont étendus, ou encore si les décrets font mention expresse des Orientaux. Ainsi la sacrée Congrégation de la Propagande a déclaré que les Orientaux étaient soumis à la Constitution de Benoît XIV. Sacramentum pænitentiae, aux constitutions relatives à la franc- maçonnerie, et à d’auti’es semblables (cf. Collectanea S. C. de Prop. Fid., n. loio, édit. 1893 ; et édit., 1907, n. 396, 44, P- 262, t. I ; n. iS^S et 1640. t. II). L’autorité du Saint-Siège s’étend à tous les fidèles du monde entier.

2° Autorité des décrets formellement particuliers.

— Les décrets strictement particuliers créent un véritable di-oit ou devoir pour les personnes qu’ils concernent, mais ne constituent pas des lois universelles : tels sont les décrets par lesquels une Congrégation accorde un privilège, une dispense, tolèi-e une pratique à raison de circonstances spéciales.

Telles sont les sentences judiciaires des tri])unaux. Ces décisions lient incontestablement les parties intéressées ; mais, par elles-mêmes, elles n’ont pas force de loi universelle. Cela est vrai, même dans le cas ovi le Souverain Pontife prononcerait personnellement la sentence. En rendant un jugement pour trancher une difficulté dans un cas particulier, le Pape n’a pas l’intention de faire une loi qui oblige tous les fidèles (cf. c. 19, X, 1. ii, tit. 27) ; il remplit l’office de juge, et non celui de législateur. Et cette décision ne deviendrait une loi universelle, que si le Souverain Pontife, en la portant, manifestait clairement sa volonté d’obliger toute l’Eglise et la promulguait suffisamment.

Cf. ScHMALZGRUEBER, liv. I, tit. 2, n. 2.J ; Zech, Præcogaita juris canonici… Ingolstadii… 1749, lit. 10, g 208, p. 14’i sqq. ; Wernz, t. I, not. 54, p. llfi.

Cependant, des décisions judiciaires, répétées dans le même sens, peuvent donner naissance à une jurisprudence, à une véritable coutume qui a force de loi dans les tribunaux ecclésiastiques : c’est ce qu’on appelle le style de la Curie, vraiment obligatoire pour les tribunaux inférieurs. Si cette coutume détermine une procédure spéciale à suivre dans les causes ecclésiastiques, c’est proprement le style de la Curie : si elle se rapporte à la matière des jugements qui ont été uniformément portés sur une même question, c’est l’autorité des c/ioses semhlabtement jugées (auctoritas rerum similiter judicatarum). Cf. Wernz, 1. 1, n. 146, II, et n. 187, II, c. ; Zech, Præcognita…, g 382 sqq.

3° Autorité des décrets formellement particuliers et équivalemment universels. — S’il s’agit des décrets formellement particuliers, mais équivalemment généraux, la question est plus complexe. Sans contredit, ces décrets obligent les personnes auxquelles ils sont adressés, mais ont-ils, par eux-mêmes, force de loi universelle ? — On peut faire trois hypothèses :

Ou ces décrets sont vraiment extensifs, c’est-à-dire, contiennent une disposition nouvelle ; et alors, pour qu’ils obligent tous les fidèles, il faut qu’ils soient, comme toute loi nouvelle, légitimement promulgués.

Ou ces décrets sont purement comprêhensifs, c’est-à-dire, sont une simple déclaration authentique d’une disposition déjà claire du droit commun, et, dans ce cas, ils valent sans conteste pour l’Eglise universelle.

Ou enfin ces décrets contiennent une interprétation authentique d’un point de droit commun objectivement douteux, obscur, sur le sens duquel les auteurs ont disputé dès le commencement.