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CURIE ROMAINE (CARDINAUX)

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nécessairement, un certain pouvoir et une influence s’exerçant sur l’Eglise entière. Cette situation se traduisit en fait dès le m’siècle. Pendant la vacance du siège apostolique qui suivit la mort de saint Fabien et qui ne dura pas moins d’un an, nous vojons les prêtres et les diacres de Rome adresser à saint Cyprien et au clergé de Carlhage plusieurs lettres (cf. DucHESNE, Hist. ancienne de l’Eglise, 3’éd., t. I, p. 400)> parmi lesquelles une surtout très importante et très significative. Celle-ci avait trait aune fquestion alors vivement débattue, au mode et aux conditions de la réconciliation des apostats ou tombés. Elle fut, selon le témoignage de saint Cyprien (Epist. lv, 5, P.L., t. IV), « envoyée dans tout l’univers et portée à la connaissance de tous les fidèles et de toutes les Eglises ». L’illustre évêque de Carthage. dans sa réponse, rend un éclatant hommage à l’autorité du clergé romain, et il se montre aussi heureux que reconnaissant de pouvoir s’y appuyer pour justifier sa ligne de conduite à l’égard des la psi.

IV. Composition et oRGANiSATio.v DU sacré collègi ;.

— On peut déjà comprendre en quel sens et avec quelles restrictions il faut entendre ce que quelques auteurs disent de l’institution récente du cardinalat romain. Ce qui est rigoureusement vrai, c’est que le corps des cardinaux a subi des modifications successives dans le nombre et la qualité de ses membres, ainsi que dans ses attributions et ses pouvoirs.

Nous avons montré comment le presbytère romain acquit insensiblement ce caractère tout particulier de réunir dans son sein des évêques à côté des prêtres de second rang et des diacres. C’étaient les sept évêques « suburbicaires », c’est-à-dire les é^êques des sept diocèses les plus rapprochés de Rome : Ostie, Albano, Porto, Siha Candida ou Sainte-Rufine, Sabine, Préneste (Palestrina) et Tusculum ou Frascati. Il leur appartenait d’accomplir certaines fonctions ou solennités épiscopales à la place et au nom du pontife suprême. Une ordonnance d’Etienne III, en 76g, les suppose chargés à tour de rôle et par semaines du service divin dans la basilique de Latran. A propos d’ETiEXXE III, le Liber ponlificalis, édil. Duchesne, t. I, p. 4^8, dit : Hic statuit ut omni die dominico a septem episcopis cardinalihiis hebdomadariis, qui in ecclesia Sah’atoris obsen-ani inissar-um solemniu, super altare B. Pétri celebraretitr et Gloria in e.rcelsis Deo ediceretur. C’est la plus ancienne mention expresse des sept cardinaux-évêques que nous connaissions. Calixte II, en réunissant le diocèse de Sainte-Rufine à celui de Porto, réduisit à six les sièges suburbicaires et, par conséquent, les cardinaux-évêques. Ce nombre fut maintenu par Sixte-Quint, qui ramena, de plus, définitivement celui des cardinaux-diacres à quatorze et celui des cardinauxprêtres à cinquante. Le collège cardinalice comprend donc en droit, depuis lors, soixante-dix membres ; mais les cadres sont rarement pleins. L’influence et la considération exceptionnelles dont il jouit dans l’Eglise datent de plus haut ; elle sont dues surtout au droit d’élire le pontife romain, qu’il détient comme élément absolument prépondérant depuis le décret d’un concile romain sous Nicolas II, en 1069, et comme facteur unique, à l’exclusion du clergé inférieur et du peuple, en vertu d’un canon du IIP concile œcuménique de Latran (1179).

Les trois catégories ou classes de cardinauxévêques, cardinaux-prêtres et cardinaux-diacres ne sont point fondées sur le pouvoir d’ordre, comme leur nom pourrait le faire croire ; elles dépendent uniquement du titre ecclésiastique assigné à chaque élu au moment de sa promotion. Leur ensemble constitue le Sacré Collège, sorte de corps

moral dont l’organisation interne est assez analogue à celle d’un chapitre canonial. A sa tête se trouAC un doyen, qui préside les assemblées collégiales et a qualité en général pour représenter le collège. C’est régulièrement le cardinal-éA’êque le plus ancien et le titulaire du siège suburbicaii-e d’Ostie. En cette dernière qualité, il a l’honneur de donner la consécration épiscopale à un pape élu qui ne serait pas encore évêque. A côté du cardinal doyen, il y a le cardinal caniérier. Désigné annuellement par ses collègues, il est chargé de l’administration et de la répartition des revenus communs.

V. Devoirs et prérogatives des cardinaux. — Les principaux droits et devoirs des cardinaux se peuvent résumer dans cette aflîrmation : leur mission habituelle est d’assister le pape de leurs conseils et de lui prêter aide sous toute autre forme pour le gouvernement de l’Eglise. Aussi bien la législation canonique statue qu’ils auront toujours libre accès auprès de lui. Pour la même raison, la plupart résident et sont tenus de résidera Rome, les cardinaux-évêques étant dispensés de la résidence auprès de leurs églises. Font exception à cette règle les cardinaux qui sont évêques de diocèses étrangers à l’Italie ou situés en Italie, mais éloignés de la Ville éternelle.

Le pape a le droit de demander, d’exiger même, en toute circonstance, l’avis des cardinaux, mais il n’est jamais lié par leur réponse ; lui seul reste juge des conditions dans lesquelles il doit suivre l’avis exprimé. Dans l’intérêt et pour la sauvegarde de l’autorité suprême, il est défendu aux membres du sacré collège de se réunir en vue soit de délibérer ensemble soit de célébrer ensemble une solennité religieuse, sans y avoir été invités ou autorisés par le chef de l’Eglise.

A la mort d’un pape, c’est aux cardinaux exclusivement qu’il appartient de choisir son successeur, avec cette restriction que ceux-là ne sauraient prendre part au conclave, qui n’auraient pas encore reçu le diaconat. Pendant l’interrègne, le sacré collège, à la difl’érence des chapitres des cathédrales, n’est pas investi de la juridiction intégrale du pontife défunt ; car la primauté n’a pas été promise à un corps moral, mais seulement à Pierre et à ceux à qui son siège est dévolu après lui. L’asseml)lée des cardinaux ne peut donc rien innover dans la forme du gouvernement ecclésiastique, ni édicter des lois universelles, ni déroger aux saints canons, ni s’ingérer dans des afl’aires épineuses, ni conférer des bénéfices, ni modifier des décisions ou des mesures prises antérieui’ement. Elle doit se borner à parer aux dangers iiuminents qui menaceraient l’Eglise et à défendre, au besoin, le domaine temporel du Saint-Siège. Il faut que toute sa sollicitude et toute son activité se portent, se concentrent sur un seul objet : hâter l’élection d’un nouveau pontife. Voilà pourquoi ceux d’entre les cardinaux qui sont chargés de fonctions personnelles non éteintes par la mort du pape, les évêques suburbicaires, par exemple, le cardinal-vicaire, le grand pénitencier, les préfets et membres des diverses congrégations, ou sont momentanément exemptés de ces obligations particulières, ou sont tenus d’y pourvoir par les suppléants que le droit détermine.

En temps ordinaire, c’est principalement dans les consistoires et les congrégations que les cardinaux prêtent leur concours habituel au souverain pontife. Les consistoires, c’est-à-dire les réunions générales des cardinaux présents à Rome, se renouvelaient jadis deux ou trois fois par semaine, et l’on y traitait presque toutes les affaires importantes ; ils sont devenus beaucoup plus rares et ne se tiennent qu’à des intervalIes irréguliers. Ils sont publics ou secrets.