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CROIX

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à assurer le salut commun de la chrétienté. Bien que les croisades aient eu d’abord l’apparence d’une offensive hardie, elles furent en réalité, dès le début, des guerres de défense. Si l’empire byzantin eût succombé au xi « siècle, l’Europe, dépourvue d’organisation, n’aurait pu résister à l’invasion musulmane. En forçant les Musulmans à se défendre sur leur territoire, les croisades permirent aux puissances occidentales de s’organiser, et lorsque l’Islam reprit l’offensive au xv* siècle, il trouva devant lui des Etats réguliers. La civilisation européenne doit donc aux croisades d’aA’oir pu conserver son indépendance. Elle leur doit encore d’ailleurs d’autres bienfaits auxqviels ne songeaient guère les chevaliers qui partaient pour la Terre Sainte. Les croisades en effet donnèrent une intensité plus grande au mouvement d'échanges qui se produisait depuis plusieurs siècles entre l’Orient et l’Occident. Les chevaliers occidentaux, transportés en Syrie, y subirent l’influence d’une culture plus raflînée, et le commerce des Indes, favorisé par les croisades, transforma Araiment la vie matérielle des Occidentaux. Le développement déjà brillant de la civilisation occidentale à la lin du xii*^ siècle est un résultat des croisades. Enfin les croisades furent le point de déjîart des explorations géographiques qui ont révélé aux Occidentaux la connaissance du inonde entier ; la découverte de l’Extrême-Orient est due aux missionnaires qui allaient chercher des alliés à la chrétienté chez les princes mongols. La civilisation européenne doit donc aux croisades d'être devenue universelle ; elle leur doit aussi le prosélytisme généreux qui, aujourd’hui encore, anime ses explorateiu’S et ses missionnaires. Aucune race, aucune société n’a jamais ijossédé un pareil héritage.

IX. Bibliographie. — Collection de l’Histoire des Croisades, publiée par l’Académie des Inscriptions depuis iS^i (Historiens occidentaux, 5v. — Historiens arabes, 4 v. — Historiens grecs, 2 v. — Documents arméniens, 2 vol. — Lois, i v.). — Société de l’Orient Latin (depuis 18^5). i » Série géographique. 2° Série historique. 3° Archives de l’Orient Latin. l° Revue de V Orient latin (depuis iSgS).

— Michaud, Histoire des Croisades (édit. de 1829, j vol.). — Kugler, Geschichte der Kreuzziige (Leipzig, 1880). — Bréhier, L’Eglise et l’Orient au moyen âge. Les croisades (Paris, 1907). — Rôhricht, Geschichte des Kônigreichs Jérusalem (Innsbriick, 1898). — Delaville-Leroulx, Cartulaire général des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem (Pa.vis, 4 v., 18g4). — Hagenmeyer, Chronologie de la première croisade (Paris, J902). — Sybel, Geschichte des ersten Kreuzzuges (2^ éd., Dusseldorf, 1881). Schlumberger, Renaud de Châtillon (Paris, 1898) et Campagnes du roi Amaury I" (Paris, 1906). — Stubbs, The mediæval Kingdoms of Cyprus and Armenia (Oxford, 1887). — Luchaire, Innocent IIL La question d’Orient (Paris, 1907). — W. Norden, Dus Papsthum und Byzanz (Berlin, 1898). — Rôhricht, Etude sur les derniers temps du royaume de Jérusalem (Archives de l’Orient Latin). — Delaville-Leroulx, La France en Orient au XIV'^ siècle (Paris, 1880). — Gay, Le pape Clément VI et les affaires d’Orient (Paris, 1904). — Jorga, Philippe de Mézières et la croisade au XIV^ siècle (Paris, 1896). — Vast, Le cardinal Bessar ion (Paris, 1878).

— Jorga, Notices et extraits pour servir à l’histoire des croisades au XV' siècle (Paris, 1902).

Louis BuiiiiiEn.


CROIX. — Notes archéologiques sur la préhistoire de la croix, et sur quelques-unes des illusions ou confusions auxquelles elle a donné lieu.

1° La croix comme emblème religieux dans l’antiquité païenne. — On ne peut nier que la croix ait été employée comme symbole religieux par les jj^iiens. On la rencontre sous différentes formes sur un grand nombre de monuments asiatiques, européens et même américains. Il est difficile, dans quelques cas presque impossible, de lui attribuer un sens bien précis, et son origine est souvent plus obscure encore que son interprétation.

a) Croix ansée. — Parmi ces croix pré-chrétiennes, les deux types principaux sont la « croix ansée » et le « swastika h ou croix gammée. La croix ansée est formée d’un Tau surmonté d’une anse, d’où elle tire son nom. On la rencontre surtout en Egypte, où elle sert d’attribut principal aux dieux de tout rang ; quelques-uns la tiennent par l’anse, d’autres la portent suspendue, l’avant-bras passé dans l’anse. On a interprété la croix ansée de différentes façons. On l’a appelée la « clef du Nil >>, emblème de la divinité fécondatrice de la nature ; cette interprétation estpiu’ement hypothétique et ne repose sur aucun fondement solide ; on fait justement remarquer que, de tous les dieux égyptiens, le dieu du Nil est un des seuls qui n’aient pas cet emblème. D’autres n’y voient que la représentation d’un autel de sacrifice sur lequel est posé un vase. Suivant Lajard, la croix ansée serait le symbole de la divine trinité des Assyriens ou des Perses : cette explication eut d’abord un certain succès, mais elle tomba devant l’opposition unanime des égyptologues. Quelques archéologues ont voulu A’oir dans la croix ansée un symbole phallique : cette interprétation eut le même sort que la précédente. La croix ansée était la figure du soleil, emblème d’Osiris. Elle ne tarda pas à prendre une signification plus abstraite. Au iv siècle, les chrétiens d’Alexandrie, en détruisant le temple de Sérapis, y virent de nombreuses représentations de la croix ansée. Ils en furent intrigués et en demandèrent la signification. Les Egyptiens convertis, qui savaient lire les hiéroglyphes, dirent qu’elle signifiait « la vie future ». Cette signification, qui, de prime abord, peut paraître mystérieuse, est facile à expliquer. La croix ansée, nous l’avons dit, symbolisait le soleil considéré par les païens comme la source de toute vie sur la terre. L’idée religieuse, en se développant, passa de la représentation matérielle aux idées plus abstraites, du soleil au pouvoir de vivifier toutes choses, rôle principal du soleil. Ce n’est pas le soleil ni les autres êtres de la création qu’adoraient les anciens, mais les forces cachées de la natm-e, re^îrésentées par les différents êtres.

b) Sa’atiska. — La croix gammée ou s^^^astika est d’origine incertaine. Elle fut très répandue parmi les peuples anciens ; elle semble avoir été un emblème caractéristique de la race indo-germanique, car on la trouve rarement chez les autres races. Elle symbolisait le soleil : les Védas l’appellent la « roue enflammée)). Elle n'était pas un emblème d’adoration, mais un symbole religieux.

c) Monuments divers. — Les Assyriens, les Perses et les peuples de l’Asie Mineure avaient également, parmi leurs eml)lèmes religieux, la croix. Les monuments nous montrent les rois d’Assyrie et les personnes de race royale portant, suspendues au cou, des croix semblables à une croix de Malte. Ici encore ces croix se rattachent au culte du soleil dont elles sont la figure. Plus tard la croix devint le symbole du pouvoir royal, le soleil étant le roi des astres et le plus bienfaisant.

On a trouvé la croix, non seulement en Evirope et en Asie, mais même en Amérique. Son origine y est plus obscure qu’ailleurs, et son spubolisme très douteux. D’après les témoignages les plus dignes de foi,